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« Le Réel » d'Israel Galvàn : la virtuosité douloureuse

Dans tout son spectacle appelé « Le Réel », Israel Galvàn flirte avec l’impossible, l’indicible… l’infacile. Quand il apparaît sur scène parisienne du Théâtre de la Ville, dans le noir, c’est pieds nus, lui dont on attend les tremblements imperceptibles scandés par le fer de ses bottes… Eh bien non… Il ne nous fera pas ce plaisir-là… Pas tout de suite du moins.
Article rédigé par franceinfo - Isabelle Baechler
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Israel Galvan, "Lo Real / Le Réel / The Real", au Théâtre de la Ville
 (Javier del Real/Teatro Real)

D’abord il nous montrera la douleur, celle de son peuple au moment de la Seconde Guerre Mondiale… Quand les Nazis ont raflé les Roms et autres nomades d’Europe Centrale comme les Juifs pour une solution finale qui a fait moins de bruit, mais a été tout aussi redoutable.

Ce sont les chants et la musique de ses partenaires qui disent l’incrédulité gitane et l’acharnement allemand… Et c’est le corps mince et noueux, aux muscles si dessinés de Galvàn qui suggère la torture infligée… Un corps tordu, blessé, déformé, presque mutilé à force d’être persécuté.

La guitare, le violon et le saxo qui se partagent la musique sont parfois sur la pente dissonante : le doute n’est pas permis ! Il est question de rails, de trains, de 2ème ou 3ème classe, de wagons à bestiaux et, sur une tôle perforée qui lui tient lieu de parquet (le tablao), Galvàn DEVIENT ce train avec l’immense talent de percussion qui mobilise ses talons (le taconeo), ses mains et tout son corps, comme une caisse de résonance funeste aux incroyables nuances.
 
« La Mort est un maître venu d’Allemagne »
Israel Galvàn tire décidément le flamenco vers la danse contemporaine la plus radicale… à des années-lumière du folklore qui l’ensevelit trop souvent !... Point de volants et d’accroche-cœurs suggestifs… Ce flamenco-là peut se danser en survêtement sous robe de nylon cheap, sabots de bois et fichu, comme l’une des deux danseuses qui partagent la scène avec lui le prouve magistralement !
La technique époustouflante des 3 danseurs est au service du message : elle fait « griller » une gitane sur la clôture électrifiée du camp d’extermination, tremblement létal.

La seconde danseuse aura droit à quelques déhanchements chaloupés dans un intermède titré « Carmen », Oh !...  Pas pour séduire à peu de frais, mais sans doute pour figurer la vitalité indéracinable du peuple gitan, sa capacité de rébellion, son pied de nez à la mort infligée.
 
Certains spectateurs ont regretté l’excès de pathos… Auraient-ils préféré plus de joliesse ?... Elle aurait sans doute été hors sujet : 600 000 Gitans ont été éliminés dans les camps allemands.

"Le Réel", Israel Galvàn, au Théâtre de la Ville – Paris - jusqu’au 20 février

"Le Réel" à Montpellier Danse : Vendredi 28 juin 2013 à 20 h (Opéra Berlioz/ Le Corum)

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