Les destructions se poursuivent à Tombouctou
"Mon message à ceux qui sont impliqués dans cet acte criminel est clair: arrêtez la destruction de biens religieux maintenant. C'est un crime de guerre pour lequel mes services sont pleinement autorisés à enquêter", a déclaré la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, à Dakar.
"Mes services suivent de très près les événements au Mali et n'hésiteront pas à prendre les mesures appropriées si les informations recueillies indiquent qu'un crime a été commis, quel qu'en soit l'auteur", a-t-elle ajouté.
Sept mausolées détruits en deux jours
Sept des seize mausolées de Tombouctou, pour la plupart en terre crue, ont été détruits en deux jours : après les sanctuaires de Sidi Mahmoud (nord de la ville), Sidi Moctar (nord-est) et Alpha Moya (est) samedi, les hommes du groupe Ansar al-Dine ont démoli dimanche à coups de houes et burins quatre autres mausolées, dont celui de Cheikh el-Kébir, situés dans l'enceinte du cimetière de Djingareyber (sud), selon un témoin.
Les mausolées, avec des tombes portant des stèles et autres insignes funéraires, sont d'importants sites de recueillement. Les saints sont considérés à Tombouctou comme des protecteurs, ils "représentent ceux que, dans la culture occidentale, on appelle saints patrons", selon un expert malien, spécialiste de l'histoire de Tombouctou et originaire de la ville.
Pour les islamistes maliens, les mausolées sont contraires à l'islam
Ansar al-Dine, qui veut instaurer la "charia" (loi coranique) au Mali, estime que les mausolées érigés par les musulmans d'obédience soufie relèvent d'une idolâtrie bannie par l'islam. « La construction de mausolées funéraires est contraire à l'islam et nous les détruisons parce que la religion nous l'ordonne", a expliqué Oumar ould Hamaha, porte-parole d'Ansar el-Dine. Les islamistes affirment aussi agir à la décision de l’Unesco d’inscrire Tombouctou sur la liste du patrimoine mondial en péril.
"L'entrée (des mausolées) est gardée par des hommes en armes. Tout comme hier, la population n'a pas réagi. Les gens disent qu'il faut les laisser faire en espérant pouvoir un jour reconstruire les tombeaux", a indiqué dimanche un journaliste local, Yaya Tandina, à Reuters.
Tombouctou, haut lieu de culture en Afrique
Haut lieu du commerce africain, où affluaient les caravanes de sel venues du Nord et les esclaves ou l'or du Sud, Tombouctou, située en bordure du désert à un millier de kilomètres au nord-est de Bamako, a connu son apogée au XVIe siècle. La ville est alors devenue un grand centre intellectuel de l'islam rayonnant dans toute l'Afrique.
Inscrite au Patrimoine mondial par l'Unesco depuis 1988, la ville est classée depuis jeudi dernier patrimoine mondial en péril.
L'OCI déplore la destruction de mausolées à Tombouctou
L'Organisation de coopération islamique (OCI), qui compte 57 membres, a déploré lundi la destruction de mausolées à Tombouctou au Mali par des islamistes extrémistes, plaidant pour la préservation d'un "patrimoine islamique".
Dans un communiqué, un porte-parole de l'OCI a "déploré" la destruction de ces mausolées qui "font partie de notre riche patrimoine islamique au Mali et qui ne doivent pas être détruits ou mis en danger par des éléments fanatiques". Il a invité les autorités maliennes à "prendre les mesures nécessaires et appropriées pour la protection et la préservation des sites historiques" de Tombouctou.
Le gouvernement malien avait également dénoncé pendant le week-end "la furie destructrice assimilable à des crimes de guerre" d'Ansar Dine, groupe allié, menaçant les auteurs de ces actes de poursuites au Mali et à l'étranger.
Le secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Abdou Diouf, a appelé lui aussi à l'arrêt immédiat des destructions à Tombouctou par "des éléments extrémistes qui occupent la ville".
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