Flèche de Notre-Dame reconstruite à l’identique : il fallait "respecter" le "travail extraordinaire" de Viollet-le-Duc, estime un membre de la commission d’experts
"Grâce au savoir-faire des artisans français", nous sommes selon lui "toujours capables" de mettre en oeuvre "les techniques qui ont été utilisées" à l'origine.
Il fallait "respecter" le "travail extraordinaire" de Viollet-le-Duc au XIXe siècle, a estimé Philippe Toussaint, membre de la commission d’experts sur la reconstruction de Notre-Dame de Paris, vendredi 10 juillet sur franceinfo. Emmanuel Macron, qui avait envisagé de doter le monument d’une nouvelle flèche contemporaine, a désormais "la conviction" qu’il faut restaurer la cathédrale et sa flèche à l’identique, a annoncé l’Élysée jeudi. "Beaucoup de ceux qui ont travaillé sur ce dossier ont été sidérés de voir la qualité du travail de Viollet-le-Duc", a expliqué Philippe Toussaint. Par ailleurs, "les techniques qui ont été utilisées et qui ont fait leurs preuves. On est toujours capables, grâce au savoir-faire des artisans français, de les mettre en œuvre. Il faut en profiter", a-t-il ajouté.
franceinfo : Emmanuel Macron a-t-il raison de demander une reconstruction à l’identique ?
Philippe Toussaint : Oui, je crois qu’au début, on a eu un choc avec cette affaire de Notre-Dame, ce tragique incendie. Et le travail qui a été fait par les architectes et par tous les services du monument historique a été extraordinaire. On s'est plongés dans l'histoire de Notre-Dame qui est incroyable, on s'est plongés dans l'histoire des cathédrales en France, et cette recherche a abouti à une conviction, c'est que le travail qui a été fait en 1860, par Viollet-le-Duc, était un travail extraordinaire de restitution de ce monument gothique inouï, envié par le monde entier, qu’est Notre-Dame de Paris.
Il fallait donc à tout prix respecter cette histoire ?
Oui, exactement, car je ne m’en doutais pas, et je pense que beaucoup de ceux qui ont travaillé sur ce dossier ont été sidérés de voir la qualité du travail de Viollet-le-Duc. Il faut savoir qu'au XVIIIe siècle, le gothique était vraiment méprisé, et au fond, Notre-Dame avait été à moitié abandonnée et altérée. Et Viollet-le-Duc a consacré tout son travail à la restitution de ce chef-d'œuvre de l'art gothique qui, sur le plan technique, était inouï. Et il l'a fait en même temps qu'un autre endroit dont on ne parle pas en ce moment qui est la Sainte-Chapelle. Tout cela est un ensemble qu'il faut respecter.
L'autre chose qui est importante, c'est que les techniques qui ont été utilisées et qui ont fait leurs preuves - la charpente a duré 800 années, quand même -, on est toujours capables, grâce au savoir-faire des artisans français, de les mettre en œuvre. Il faut en profiter.
Philippe Toussaint, membre de la commission d’experts sur la reconstruction de Notre-Dameà franceinfo
Quant à la flèche, il y a une chose qui est extraordinaire, c'est qu'elle devait être restaurée. Et c'est ce qui a provoqué d'ailleurs, en quelque sorte, la catastrophe. Tous les anges qui la comportent avaient été démontés juste avant le feu. Donc, quand on parle de reconstruction, c’est faux, c'est une restauration.
Comment cela va se passer maintenant ? Combien de temps cela va prendre pour reconstruire Notre-Dame ?
Les équipes qui ont présenté leurs travaux hier ont indiqué qu'elles avaient comme mission de rendre au public et au culte la cathédrale pour 2024. Voilà, le challenge est là. Cela va dépendre de la façon dont le chantier va être construit, mais il n'est pas exclu qu'il faille commencer par la flèche, parce que sa reconstruction n'est pas une si petite affaire que cela. Ce sont les architectes qui nous donneront le cadencement. L’étude d’évaluation qui a été menée a, par ailleurs, permis de faire le choix d’une charpente en chêne, car c'est la construction la plus durable. On parle beaucoup d'écologie, eh bien, c'est vraiment la plus durable. Les autres constructions qui ont été faites à Reims ou à Chartres avec du métal, notamment, sont finalement peut-être moins durables que le bois.
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