L'installation de Claude Lévêque à l'Opéra Garnier fait polémique
L'année 2019 marque un double anniversaire, les 350 ans de l'Opéra de Paris, dont la scène historique se situe au palais Garnier, et les 30 ans de l'Opéra Bastille, que Lévêque a également couronné d'un diadème lumineux pour l'occasion. L'Opéra national de Paris (ONP) avait donné carte blanche à l'artiste français de 65 ans qui a conçu cet ensemble d'installations baptisées "Saturnales".
Deux pneus de tracteurs à la feuille d’or
À Garnier, les œuvres de Lévêque doivent rester un an à l'intérieur de ce temple français de l'art lyrique, monument emblématique et touristique de Paris, dont des néons inclinés diffusent une lumière bleutée dans la Rotonde, qui se reflète dans les miroirs. "C'est comme un carrousel, une invitation à la danse, à la valse", selon Claude Lévêque à l'AFP.Mais ce sont surtout deux grands pneus, de la taille de deux roues de tracteur, sculptés et couverts à la feuille d'or, et dressés sur les deux rampes du grand escalier central, qui ont attiré les regards et les critiques sur les réseaux sociaux.
"Ces deux immondices dorées sont donc prévues pour rester toute l'année 2019 à Garnier ? Joyeux anniversaire l'Opéra de Paris...", a tweeté un internaute. "Lamentable, grotesque, scandaleux ! Ou comment saccager un lieu magnifique et emblématique sous le prétexte d'art contemporain !!!", s'indigne un autre. "Le palais Garnier est sponsorisé par Michelin ?", "C'est le salon de l'auto ou quoi", ironisent d'autres sur Twitter. Certains surfent aussi sur l'actualité : "deux pneus de tracteur dorés à l'Opéra Garnier? C'est pour sensibiliser la bourgeoisie de Paris au mouvement #GiletsJaunes".
Un autre internaute trouve toutefois que "ça s'intègre assez bien", estimant que "c'est provocant mais temporaire". "Ces pneus ne sont nullement là pour provoquer", assure à l'AFP l'artiste qui y voit plutôt un dialogue constructif avec une architecture intérieure "très structurée, chargée, mécanique, organique", relevant la symbolique du mouvement.
Des précédents
L'artiste, qui confie avoir eu "beaucoup de plaisir" à concevoir ce projet, l'a imaginé dans une dialectique de lumière et d'obscurité, de contrastes et dialogues entre arts contemporain et ancien.Les commentaires ne sont pas sans rappeler les polémiques qui avaient accompagné l'érection d'œuvres d'art contemporain devant des monuments emblématiques de la capitale françaises ces dernières années.
En 2014, le "Tree" du plasticien Paul MacCarthy - un sextoy gonflable de 24 mètres de haut érigé place Vendôme - avait provoqué un torrent de réactions indignées. En 2015, le "vagin de la reine" du Britannique Anish Kapoor avait été vandalisé dans le parc du château de Versailles. Plus récemment, la sculpture "Bouquet of tulips" de l'Américain Jeff Koons, qui devait s'ériger sur le parvis du Palais de Tokyo et du Musée d'art moderne, a finalement été destinée à un autre emplacement face à la contestation de Parisiens opposés à cette installation.
À Garnier, outre les pneus et l'installation dans la Rotonde, Claude Lévêque a ajouté tout autour du bassin dit "de la Pythie", sous le grand escalier central, des lustres portant des grappes de lampes couleur fuchsia.
À l'Opéra Bastille, construit il y a 30 ans sous François Mitterrand, un diadème géant formé de 16 mâts lumineux illumine depuis une dizaine de jours le quartier la nuit, un hommage aux jambes tendues des danseurs et danseuses du Lac des Cygnes, selon Lévêque.
L'artiste n'en est pas à sa première collaboration avec l'Opéra : en 2010 il avait été le scénographe du ballet Siddharta du chorégraphe Angelin Preljocaj. L'an dernier, il avait tourné un court-métrage teinté de mystère, le Lac perdu, sur le lac souterrain et les coins méconnus de l'Opéra Garnier.
L'Opéra de Paris célèbre en 2019 ses 350 ans avec le slogan "moderne depuis 1669", date de sa fondation par Louis XIV, sous le nom de L'Académie royale de musique.
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