Benoît Jacquot s'attaque à La Traviata
"C'est une œuvre qui donne un élan, à la fois ça donne envie d'y aller, de faire quelque chose d'inédit, de personnel, de singulier, et en même temps on marche sur des œufs parce que les amateurs sont extrêmement sourcilleux à l'égard d'une œuvre qui est une pièce capitale du Panthéon lyrique", reconnaît-il.
L’histoire
Violetta (Diana Damrau), lancée dans une vie de frivolités, tombe amoureuse d'un jeune homme de bonne famille, Alfredo (Francesco Demuro). Elle change de vie, s'installe avec lui à la campagne. Mais le père d'Alfredo (Ludovic Tézier) fait appel à son sens du devoir et la convainc de quitter Alfredo, précipitant sa mort.
"C'est une figure qui évoque à la fois la chute et la résurrection, la sublimation, c'est quelque chose qui appartient à une certaine époque et que je crois crédible si on essaie pas d'en faire une Traviata d'aujourd'hui", explique Benoît Jacquot. Dans le rôle de Violetta la soprana Allemande Diana Damrau semble avoir trouvé un rôle à sa hauteur.
Reportage : D. Poncet, W. Kamli, R. Attal, F. Fontaine
La Traviata, un choix naturel pour Benoît Jacquot
"La Traviata", inspirée de la pièce et du roman d'Alexandre Dumas fils "La Dame aux Camélias" (1852) sur la vie de la demi-mondaine Alphonsine Duplessis morte de la tuberculose en 1847, semble un choix naturel pour Benoît Jacquot, dont le cinéma s'attache si souvent à des figures féminines ("La Fille seule", "La Désenchantée", "Villa Amalia"...). En 2012, "Les Adieux à la Reine" a été couronné des Césars du meilleur film et meilleur réalisateur.
A l'opéra, Benoît Jacquot met en scène en 2010 "Werther", immense succès porté par Jonas Kaufmann, "un chanteur remarquable et en plus un très bon acteur", dit-il. A contre-courant des transpositions devenues courantes à l'opéra, il a choisi de ne pas actualiser "La Traviata". "La Dame aux Camélias aujourd'hui, je ne vois pas trop!", lance-t-il.
Pas de mise en scène d'antiquaire
"Je ne veux pas non plus faire une mise en scène d'antiquaire, avec des robes exactes, etc..", précise-t-il. Mais l'esprit du 19e sera bien présent, avec un décor (Sylvain Chauvelot) et des costumes (Christian Gasc) évoquant le siècle de Dumas.
Un décor démesuré
Pour le décor, Benoît Jacquot a "pris pour chaque tableau un élément central" qu'il a grossi démesurément. Au premier acte, le lit de Violetta - "après tout, c'est son instrument de travail" - trône au milieu du plateau dépouillé.
La campagne où elle se retire au deuxième acte avec Alfredo est figurée par un arbre qui partage le plateau avec un somptueux escalier, représentant le salon de son amie Flora et la vie de plaisirs retrouvée au troisième acte. A la fin de l'œuvre, le grand lit de Violetta reparaît mais "tout déglingué", et c'est sur un lit de fortune qu'elle se consume, explique le metteur en scène.
Le mélodrame poussé à un point d’incandescence
Cinéaste de la nuance, presque de la discrétion, Benoît Jacquot a voulu "éviter qu'un soi-disant point de vue fasse écran entre ce qui est en jeu, dans le drame, le chant et la musique, et les spectateurs."
"Ce qui m'intéresse, c'est le mélodrame, poussé à un point d'incandescence par la musique, par le chant, tel qu'on est saisi et que quelque chose atteint l'universel, de l'ordre de la souffrance, de la chute, du sacrifice et du sublime qui peuvent en naître", explique-t-il.
La Traviata en version filmée bientôt sur France 2
Comme pour Werther, Benoît Jacquot réalisera lui-même la version filmée de "La Traviata", qui sera diffusée en direct dans les salles de cinéma le 17 juin, et à la télévision sur France 2 ultérieurement.
"La Traviata" de Verdi, nouvelle production à l'Opéra Bastille du 2 au 20 juin. A découvrir sur Culturebox à partir du 19 juin.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.