A l'Opéra Garnier, le conte joyeux d'Hänsel, Gretel et de la sorcière
Hänsel (le jeune Hans) et sa sœur Gretel (la jeune Margrete) sont punis par leur mère parce qu’ils chahutent et n’ont pas fait leurs devoirs : elle les envoie dans la sombre forêt y cueillir des fraises. Hansel et Gretel se perdent et s’endorment. Au matin, ils découvrent une maison en pain d’épices qui calme leur appétit. Mais c’est la maison de la sorcière qui attire ainsi les enfants égarés qu’elle cuit dans son grand four. Le rusé Hänsel la prend à son propre piège, les parents retrouvent leurs enfants et le père chante au final : « La sorcière est bien croquante et bien dure, d’un gâteau elle a pris l’allure »
Un ouvrage charmant et joyeux
Cette histoire inspirée des frères Grimm véhicule toutes les angoisses enfantines : la forêt, la nuit, la peur d’être abandonné, les monstres tapis dans l’ombre. Pourtant Humperdinck en a tiré un ouvrage charmant et joyeux. Confronté à la question : « quel opéra allemand après Wagner ? », il a opté pour un retour aux mélodies, aux vieilles chansons, qui rattachent l’Allemagne (et surtout la Bavière où il fit ses études) à l’Europe Centrale : dans les scansions et les rythmes de danses, Smetana et Dvorak, les deux compositeurs tchèques, ne sont pas loin.
Le chef, Claus Peter Flor, insiste sur la verdeur, le fruité d’un orchestre qui, souvent, double les voix en les enrichissant (Puccini use du même procédé). Mais l’orchestre de l’Opéra, si poétique dans « Siegfried », en oublie la beauté du son, il sonne un peu « gras » (surtout les cordes) et couvre trop souvent les voix.
Beau décor de Julia Hansen : à jardin, sur deux niveaux, la maison avec la douce chaleur du foyer à l’étage et en-dessous la chambre des enfants dans l’ombre. A cour le noir, le néant : la forêt ? Même pas. Cela commençait tranquille et brusquement la metteuse en scène, Mariame Clément, nous balance une lecture psychanalytique avec effets de miroirs, chanteurs doublés par des acteurs, forêt qui pousse dans la chambre, mère et sorcière confondues… On finit par ne plus rien comprendre, d’autant que le livret contredit ce qu’on voit, en des images parfois fortes mais qui deviennent étouffantes à force d’être réduites dans ces pièces de maison de poupée comme dans des boîtes à chaussures : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Hänsel et Gretel : couple charmant et homogène
Selon une tradition de la musique baroque (mais qu’un Bellini pratiquait encore) le garçon Hänsel est chanté par la mezzo Daniela Sindram. Le couple est charmant et homogène, très émouvant dans sa « Prière aux quatorze anges ». Anne-Catherine Gillet est une Gretel bien touchante. Jochen Schmeckenbecher, dans le rôle du père, est un magnifique baryton. Reste le cas de la sorcière, Anja Silja. Anja Silja, la sorcière
Largement septuagénaire, Anja Silja est une star. Mais celle qui fut à Bayreuth une wagnérienne de choc dans les années 60, à force de rôles trop lourds, a fini par perdre sa voix. On peut donc être gêné, voire exaspéré, par ses graves inexistants, ses aigus criés (pourtant la ligne de chant est toujours là dans le milieu de la tessiture !). Ou au contraire conquis par son abattage, sa présence volcanique, son humour quand elle se transforme en chanteuse de cabaret berlinois, perruque rousse, robe à paillettes fuchsia, boa vert prairie. Et après tout on pardonne toujours aux légendes de nous donner un peu de ce qu’elles ont été. L’image finale réunit sur scène des enfants et des ballons de baudruche. Les enfants dans la salle, ravis, ne se sont pas torturés le ciboulot comme leurs parents. Ils ont entendu un petit garçon et une petite fille qui leur ressemblent leur chanter des choses ravissantes et cela leur suffit. Les parents font comme eux, oublient la mise en scène, se mettent à siffloter les airs du riz au lait, des quatorze anges et de la « sorcière-pain d’épices » Hänsel et Gretel de Engelbert Humperdinck
d'après les contes des Frères Grimm
Du 14 avril au 6 mai 2013
Opéra/Palais Garnier
Hänsel et Gretel au cinéma
Lundi 22 avril 2013 à 19h30 dans 26 salles du réseau UGC en France et en Belgique, dans 45 salles du réseau indépendant en France et 200 salles dans le reste de l'Europe
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