Fiest'A Sète s'ouvre avec un hommage à Fela Kuti 20 ans après sa disparition
Il est minuit quand les instruments se taisent. La musique jusque-là entrainante et plus qu'énergique laisse place à un silence pesant. Seun Kuti prend le micro et se rapproche de la fosse. L'émotion est forte. "Il est minuit et quelques secondes ce 2 août 2017. Il y a 20 ans, disparaissait Fela Anikulapo Kuti." S'en suit une minute de recueillement scrupuleusement respectée par les 1600 spectateurs. À l'époque, son deuxième fils Seun n'avait que 14 ans.
Reportage France 3 D. De Barros / V. Banabera / S. Bonnefond
"Le fils du tigre reste un tigre", proverbe yoruba
On en oublierait presque le concert qui avait lieu à Sète. Sur scène, c'est un déferlement d'énergie avec le plus jeune fils de Fela Kuti. Aux côtés d'Egypt 80, le dernier groupe du "Black President", Seun livre un set fantastique, avec un groove infernal. On croirait voir Fela Kuti. Pour un bon afrobeat, il faut mettre en avant les percussions.D'après François Bensignor, Seun est le digne héritier de l'afrobeat. Son énergie lui permet de livrer des prestations exceptionnelles, qui rappellent parfois la période 1971-1978 de son père. Pour faire perdurer le style de Fela, son deuxième fils joue du saxophone, un instrument dont ne pouvait plus jouer "le roi de l'afrobeat" à cause de pressions très fortes de ses opposants.
En première partie, le théâtre de mer de Sète a accueilli Roy Ayers. Lui aussi connu pour son millitantisme, le chanteur alterne avec sensualité entre sonorités jazz et soul. Arrangeur musical de génie, son style particulier est nourri de multitudes d'influences, de tous les continents mais aussi de toute culture. En 1980, il avait enregistré à Lagos, ville de Keziah Jones, un album avec Fela : "Music of many colors".
La dimension mythique de Fela
S'il a écumé les plus grandes scènes du monde, Fela Kuti véhiculait aussi plusieurs messages politiques dans ses chansons. Il s'inspirait beaucoup des paroles des habitants du Nigéria. Difficile pour son ancien producteur, Martin Meissonnier, de ne pas reconnaître l'impact politique très important qu'a eu Fela Kuti, à la fois dans son pays, mais aussi sur tout le continent africain.Il était extraordinaire, plus grand que nature avec des bons et des mauvais côtés. Mais surtout, il avait un impact politique vraiment important. Il était visionnaire sur la corruption qui gangrène l'Afrique. Ce n'est seulement que 20 ans après sa mort que l'on reconnait son message.
Martin Meissonnier, ancien producteur de Fela KutiAujourd'hui, les deux fils de Fela sont les dignes héritiers de la musique afrobeat. Femi a été initié très jeune au saxophone par son père. Il a même pris la direction du groupe de Fela lors de la tournée américaine en 1984.
Parmi les "héritiers" de fela Kuti, on peut aussi citer la Guinéenne Sia Tolno en particulier avec son album "African Woman", sorti en juin 2014. Elle est l'une des rares représentantes de ce mouvement musical. Si elle admirait Fela Kuti pour son côté extravagant, elle explique qu'il était très difficile pour les femmes de s'approprier cette musique, "trop sulfureuse. Et puis les femmes avaient peur d'être aux centre des revendications."20 ans que Fela Kuti est parti. Keziah Jones de passage à Jazz à Vienne avait confié travailler sur un EP aux influences afro-beat. En attendant, ses fils continuent de faire vivre sa musique. Pour Seun, le lien qui l'unit à son père restera inscrit à jamais sur sa peau.
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