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Techno : le Teknival fête ses 25 ans avec liberté et illégalité pour mots d'ordre

Ouvert vendredi soir, le 27 avril, le Teknival, grand-messe techno française, se poursuit jusqu'au 1er mai. Organisé chaque fois dans un lieu différent, tenu secret jusqu'aux dernières heures, il se tient cette année sur une ancienne base militaire dans la Marne. Plus de 10.000 "teufeurs" s'y retrouvent pour fêter en "liberté" les 25 ans de ce festival qui joue sur son "illégalité".
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Le Teknival, édition 2018.
 (François NASCIMBENI / AFP)

"Si c'était légal, il y aurait plus de lumière, plus de marchands de bière, de kebabs sur le tarmac... Ca deviendrait une discothèque géante", explique Raphaël, 30 ans, en désignant l'ancienne piste de la base militaire de Marigny.

Chaque année dans un lieu différent, tenu secret

Grand-messe techno française, le Teknival (qui se tient jusqu'au 1er mai) est organisé chaque année dans un lieu différent, tenu secret jusqu'aux dernières heures. A de rares exceptions, il a lieu sans l'accord des autorités. Comme chaque année 60 pompiers, 250 gendarmes, le Samu et des associations de protection civile sont cependant mobilisés pour assurer la sécurité "sanitaire, publique et routière" autour de l'évènement, a dit la préfecture de la Marne. 
Le Teknival, édition 2018
 (François NASCIMBENI / AFP)
Des dizaines de sound system, des murs d'enceintes de plusieurs mètres de haut, ont été installés sur cette longue bande de bitume entourée de champs. Devant les enceintes, des centaines de jeunes dansent au son de la techno. D'autres sont assis entre des camions et voitures venus de toutes la France et garés en tout sens. Certaines plaques d'immatriculation sont cachées. Des dealers proposent des "taz" (de l'ecstasy, ndlr) ou de la cocaïne.

L'illégalité comme mot d'ordre

Quand c'est illégal, "on est moins parqués, on choisit plus ce qu'on a envie de faire", estime Raphaël, qui fait partie depuis huit ans d'un soundsystem basé à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Il est arrivé vendredi. "On était une cinquantaine de camions et voitures. On a dit aux gendarmes, Si on ne rentre pas, on bloque la route, les villages".

Mais illégal ne veut pas dire "que c'est n'importe quoi", poursuit le jeune homme. "Chaque sound system fournit 5-6 bénévoles, pour gérer le parking, les déchets, la sécurité. Au total, on est environ 200 prêts à intervenir en cas de problème." Mais selon lui, il y a "très peu d'incidents". Alors que le Teknival se déroule cette année sur une zone écologique classée "Natura 2000", il montre les nombreux sacs-poubelle accrochés aux rétroviseurs des voitures: "Le plus souvent on arrive à rendre le site aussi propre qu'on l'a trouvé", dit-il, vantant l'"esprit d'entraide" et l'"autogestion" du mouvement.
Ambiance au Teknival 2018
 (François NASCIMBENI / AFP)
Cet esprit plaît à Esteban et Florian, 20 ans, venus de Dijon. Ils cherchent le sound system "des Insoumis". "Rien à voir avec Mélenchon", rigolent-ils. Depuis un an, ils vont régulièrement en "teuf" pour "tout ce qui est défendu derrière la musique: le respect de tout le monde, la liberté". Idem pour Lucie et Manon, étudiantes en droit et en communication dans la région. "Ça peut faire peur à première vue le Teknival, mais quand on est dedans, on se sent bien". Les deux copines âgées de 20 ans vont rester quatre jours. "Ici, on ne vient pas pour plaire, comme en boîte. Là on vient pour s'amuser."

Besoin d'une "liberté temporaire"

Le besoin d'appartenir à "un mouvement", d'avoir des lieux de fêtes "moins guindés", "gratuits", c'est déjà ce qu'entendait Jean-Marc, il y 25 ans. Agé de 61 ans, il est membre depuis 20 ans de Techno, une association qui informe les consommateurs de drogue. Sur son stand, des dizaines de personnes viennent prendre des bouchons d'oreilles ou un "roule ta paille", un carré de carton individuel pour "sniffer" en limitant les risques.

Pour expliquer le succès continu des rassemblements techno, il évoque notamment le besoin d'une "liberté temporaire". Les "teufeurs" "acceptent en grande partie la société, le monde tel qu'il est. Même s'il n'est pas simple, ils s'y plient", explique-t-il. Mais, "il y a un besoin d'un espace où se libérer, faire la fête totalement". Samedi, alors que le soleil baissait et que la musique se faisait de plus en plus forte, des dizaines de voitures continuaient à arriver. "Si des jeunes sont ici", 25 ans plus tard, poursuit Jean-Marc, "c'est qu'ils en ont besoin."

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