Amadou & Mariam en quête d'universalité sur "Folila"
En langue bambara, "Folila" signifie "Venez jouer". Nombreux ont répondu à l'appel pour ce disque réalisé entre New York, Paris et Bamako. Les Américains sont ici en force : deux représentants de TV on The Radio, le chanteur des disco-dingos Scissor Sisters, la chanteuse Santigold, le funkster Amp Fiddler et le rappeur de Brooklyn Theophilus London.
Mais c'est un Français, Bertrand Cantat, qui se taille la part du lion. L'ancien chanteur de Noir Désir a posé sa voix cassée sur quatre morceaux de l'album, dont l'entêtant premier single "Oh Amadou". Et il se promène avec sa guitare et son harmonica quasiment sur tout l'album, lui offrant au passage l'homogeneité qui aurait pu faire défaut à cette interminable guest-list.
"Oh Amadou" avec Bertrand Cantat
Bertrand, ils l'ont rencontré à Bordeaux, après un de leurs concerts. "On l'a invité au Mali l'an dernier et il est resté une dizaine de jours", se souviennent Amadou et Mariam. Le trio s'est entendu à merveille. Les quatre titres sur lesquels il chante (plus deux autres qui n'ont pas été retenus sur l'album) sont des compositions du duo malien sur lesquelles il a ajouté ses textes. "Oh Amadou" était dans leurs tirois depuis "très longtemps" : elle avait été écrite à l'origine en bambara. En français et dans la bouche de Cantat, elle est en passe de devenir un hymne.
"On ne peut pas rester sur une erreur toute sa vie", répond Amadou lorsqu'on lui demande s'il ne craint pas de s'aliéner une partie du public en faisant équipe avec un musicien controversé. "Il faut savoir donner aux gens une seconde chance. Pourquoi Bertrand n'y aurait-il pas droit ?".
"Wily Kataso" avec Tunde et Kyp de TV On The Radio Créer une musique ouverte
"Folila" a une autre particularité: le mariage des instruments traditionnels et modernes, qui se mélangent harmonieusement dans leur chaudron blues-rock. "On aspirait à créer une musique ouverte, pas uniquement africaine", explique le couple qui souligne avoir écouté passionnément dans sa jeunesse Led Zeppelin et Deep Purple.
Cette fusion, plutôt réussie, brille sur toute la première moitié du disque. "Dougou Badia" (avec Santigold), "Wily Kataso" (avec TV On The Radio), "Oh Amadou" (avec Cantat), "Metemya" (avec Jake Shears des Scissor Sisters), "C'est pas facile pour les aigles" (avec la tornade britannique Ebony Bones) et "Wari" (avec Amp Fiddler), sont taillées pour porter partout leur message d'unité.
Côté paroles, Amadou et Mariam continuent d'alterner le bambara, l'anglais et le français en un esperanto moderne et réjouissant. Les auteurs de l'inusable "Je pense à toi" chantent toujours leur amour réciproque ("Sans toi", "Chérie") mais évoquent aussi la situation du continent africain sur "Afrique mon Afrique" qu'ils appellent à un changement "politique, idéologique, ethique, social et mental".
Amadou et Mariam, dont le Mali se déchire après un tout récent coup d'Etat, ont toujours voulu faire triompher la paix à travers leur musique. "Nous aimons chanter pour donner de l'espoir aux gens, pour leur montrer que l'on peut s'en sortir, qu'il faut avoir du courage." Trop naïf ? Avec Amadou et Mariam, deux aveugles porteurs de lumière, le cynisme ne passera pas.
"Folila" de Amadou et Mariam sort le 2 avril (Because Music)
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