Original et radical, le pianiste Ivo Pogorelich en concert à Paris, Salle Gaveau
A 56 ans, le pianiste jette un regard distancié sur ses jeunes années flamboyantes: "A 22 ans, j'étais mondialement connu (...) j'avais tout ce qu'on peut désirer et s'efforcer d'avoir. Mais je n'ai jamais abusé de ma position. Très vite j'ai appris comment dire non à l'argent, ce qui est essentiel".
Capricieux, difficile ? Pogorelich dit simplement n'accepter "aucun compromis avec les compositeurs"
Il récuse aujourd'hui toute étiquette: "les gens ont toujours essayé de mettre une étiquette sur moi : controversé, capricieux, difficile, etc.", rappelle-t-il. "Ce qui me caractérise je pense, et ça je peux le dire avec certitude, c'est que mon attitude vis à vis des compositeurs ne supporte aucun compromis. J'essaie d'être au plus près de leurs intentions".
Les débuts du pianiste d'origine croate sont fracassants : alors qu'il a remporté plusieurs concours internationaux (dont le Alessandro Casagrande à Terni en Italie en 1978 et celui de Montréal deux ans plus tard), c'est le concours auquel il échoue, en 1980, qui le rend célèbre : le prestigieux Concours international de piano Frédéric Chopin de Varsovie.
Rares apparitions
Propulsé sur le devant de la scène par cet événement, ivo Pogorelich donne son premier concert au Carnegie Hall à New York l'année suivante, et est invité à se produire dans le monde entier. Le "musicien rebelle" est également accueilli dans la prestigieuse maison aux étiquettes jaunes, Deutsche Grammophon. De Scarlatti à Schumann et Scriabine, la discographie de Pogorelich entre 1981 et 1995 est stylistiquement variée, avec des interprétations personnelles souvent discutées. Les tournées mondiales ne désemplissent pas mais Pogorelich décise d'interrompre la scène et tout enregistrement pour se retirer après la mort de son épouse en 1996.
Ce n'est que récemment qu'Ivo Pogorelich a repris les concerts, et chaque apparition est un événement, du fait de ses relectures très personnelles des oeuvres.
"Le sentiment est comme du sucre en trop grande quantité dans le café, il devrait être totalement éliminé de la musique du 19e siècle", dit-il par exemple. Ivo Pogorelich juge également aujourd'hui "surestimée la musique de Chopin" (qu'il a pourtant beaucoup interprétée dans ses jeunes années) "par rapport à celle de Schumann", qui dépasse selon lui "en richesse, complexité et apport révolutionnaire la musique de tout autre compositeur du 19e siècle".
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