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Le Voyage de M. Monteverdi ou observer une révolution musicale
Le programme intitulé "Le Voyage de M. Monteverdi", diffusé le 19 mai 2015 sur Culturebox en direct de la Philharmonie de Paris, propose un voyage passionnant et pédagogique à la découverte des changements majeurs opérés dans la musique entre la Renaissance et la période baroque. Voici quelques extraits, citations et vidéos, issus du concert.
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Voyage musical ludique : De la Renaissance au Baroque
Monteverdi est né il y a plus de 400 ans, en 1567. C'est la Renaissance, une époque riche où la musique, chargée de sonorités, est composée pour l'Église. Sa vocation est l'accompagnement des prières vers Dieu. Quelques décennies plus tard, la musique est devenue dramatique. Elle raconte une histoire et dépeint des émotions ; c'est la musique baroque. Comment le changement s'est-il opéré ? Par quelles étapes est-on progressivement passé de l'une à l'autre et comment cette révolution s'illustre-t-elle dans les écrits de Monteverdi ? C'est le moment d'embarquer pour un petit voyage explicatif avec Les Arts Florissants ! (Extrait de la présentation de Paul Agnew, directeur musical du programme et ténor, ci-dessous) « On ne comprend rien ! »
La première œuvre chantée par l'ensemble, "Lapidabant Stephanum", raconte l'histoire de Saint Étienne, premier martyre de l'église romaine tué à coups de rochers. Mais le lien entre le texte et la musique n'est pas évident. Lucile Richardot, contralto de l'ensemble, trouve que le drame ne se ressent pas. « C'est normal », répond Monteverdi joué par Paul Agnew, « on veut juste que la musique porte vers la prière. On aurait pu mettre n'importe quel texte avec ! Par exemple, on aurait pu chanter « Joyeux anniversaire » sur cette musique ! » (Extrait ci-dessous) « Ce serait mieux si tout le monde chantait le texte au même moment »
Pour Lucile, une meilleure manière de faire ressentir le texte serait, déjà, d'essayer que tout le monde chante la même chose au même moment, à la même vitesse que la parole. Ainsi, on comprendrait mieux. « Essayons ! », dit Monteverdi, « avec ce texte doux et suave : "Baci soavi e cari", de chanter tous ensemble à la même vitesse ». (Extrait ci-dessous) « Et si on commençait à raconter des choses avec des personnages vivants ? »
Maintenant qu'on entend et comprend très clairement le texte, l'étape suivante, en toute logique, est d'aller vers la narration autour de personnages vivants. « Oui, on peut, je n’ai jamais essayé ! », s'exclame Monteverdi. « Voici une histoire parfaite : Armida, une sorcière, est folle amoureuse de Rinaldo mais lui n’est pas amoureux d'elle. Elle a le pouvoir de lui jeter un sort pour le faire tomber amoureux d'elle mais lorsque Rinaldo se réveille de ce mauvais sort, il n’est évidemment plus amoureux. Armida reste seule et c’est à ce moment-là qu'elle s'emporte et s'écrie : Vattene pur, crudel (extrait ci-dessous) ! »
« Pourquoi est-on cinq pour dire les mots d'une seule personne ? On dirait un dragon à cinq têtes ! »
Entre l'étape trois et l'étape quatre, des instruments sont arrivés sur scène et dans l'histoire de la musique vocale : un clavecin, un luth, des instruments à cordes ; faisant ainsi passer la musique de la polyphonie (plusieurs voix) a cappella à la polyphonie soutenue et colorée de sonorités nouvelles. Cependant, comme le relève Lucile, le texte relaté dans les mélodies correspond souvent aux mots d'une seule personne. « Alors pourquoi chanter à cinq ? Ce n’est pas réaliste ! Une personne, ce serait mieux ! ». Et voilà que Monteverdi offre à une chanteuse un texte à chanter seule, accompagnée par le petit orchestre... De l'opéra ? On s'en approche. (Extrait ci-dessous) « Et si les instruments racontaient, eux aussi, quelque chose ? »
Dernière étape du voyage, celle-ci amène aux balbutiements de l'opéra tel que les siècles suivants le connaissent. De la même manière que le rôle des chanteurs a évolué, les instruments peuvent ne pas servir qu'à soutenir et accompagner. S'ils sont là, il peuvent se substituer aux décors par exemple, en les « racontant » et les décrivant. Par exemple, ils peuvent imiter le bruit des épées dans un drame chevaleresque. C’est la naissance de l'opéra. (Extrait ci-dessous) L'opéra fondateur dans l'histoire de la musique classique occidentale est "L'Orfeo" de Monteverdi, composé en 1607, quatre ans après la parution du Livre V des madrigaux de Monteverdi qui l'y prépare.
Retrouvez "Le Voyage de Monsieur Monteverdi" - Séance musicale ludique dans son intégralité ainsi que toutes les informations sur le programme.
Monteverdi est né il y a plus de 400 ans, en 1567. C'est la Renaissance, une époque riche où la musique, chargée de sonorités, est composée pour l'Église. Sa vocation est l'accompagnement des prières vers Dieu. Quelques décennies plus tard, la musique est devenue dramatique. Elle raconte une histoire et dépeint des émotions ; c'est la musique baroque. Comment le changement s'est-il opéré ? Par quelles étapes est-on progressivement passé de l'une à l'autre et comment cette révolution s'illustre-t-elle dans les écrits de Monteverdi ? C'est le moment d'embarquer pour un petit voyage explicatif avec Les Arts Florissants ! (Extrait de la présentation de Paul Agnew, directeur musical du programme et ténor, ci-dessous) « On ne comprend rien ! »
La première œuvre chantée par l'ensemble, "Lapidabant Stephanum", raconte l'histoire de Saint Étienne, premier martyre de l'église romaine tué à coups de rochers. Mais le lien entre le texte et la musique n'est pas évident. Lucile Richardot, contralto de l'ensemble, trouve que le drame ne se ressent pas. « C'est normal », répond Monteverdi joué par Paul Agnew, « on veut juste que la musique porte vers la prière. On aurait pu mettre n'importe quel texte avec ! Par exemple, on aurait pu chanter « Joyeux anniversaire » sur cette musique ! » (Extrait ci-dessous) « Ce serait mieux si tout le monde chantait le texte au même moment »
Pour Lucile, une meilleure manière de faire ressentir le texte serait, déjà, d'essayer que tout le monde chante la même chose au même moment, à la même vitesse que la parole. Ainsi, on comprendrait mieux. « Essayons ! », dit Monteverdi, « avec ce texte doux et suave : "Baci soavi e cari", de chanter tous ensemble à la même vitesse ». (Extrait ci-dessous) « Et si on commençait à raconter des choses avec des personnages vivants ? »
Maintenant qu'on entend et comprend très clairement le texte, l'étape suivante, en toute logique, est d'aller vers la narration autour de personnages vivants. « Oui, on peut, je n’ai jamais essayé ! », s'exclame Monteverdi. « Voici une histoire parfaite : Armida, une sorcière, est folle amoureuse de Rinaldo mais lui n’est pas amoureux d'elle. Elle a le pouvoir de lui jeter un sort pour le faire tomber amoureux d'elle mais lorsque Rinaldo se réveille de ce mauvais sort, il n’est évidemment plus amoureux. Armida reste seule et c’est à ce moment-là qu'elle s'emporte et s'écrie : Vattene pur, crudel (extrait ci-dessous) ! »
« Pourquoi est-on cinq pour dire les mots d'une seule personne ? On dirait un dragon à cinq têtes ! »
Entre l'étape trois et l'étape quatre, des instruments sont arrivés sur scène et dans l'histoire de la musique vocale : un clavecin, un luth, des instruments à cordes ; faisant ainsi passer la musique de la polyphonie (plusieurs voix) a cappella à la polyphonie soutenue et colorée de sonorités nouvelles. Cependant, comme le relève Lucile, le texte relaté dans les mélodies correspond souvent aux mots d'une seule personne. « Alors pourquoi chanter à cinq ? Ce n’est pas réaliste ! Une personne, ce serait mieux ! ». Et voilà que Monteverdi offre à une chanteuse un texte à chanter seule, accompagnée par le petit orchestre... De l'opéra ? On s'en approche. (Extrait ci-dessous) « Et si les instruments racontaient, eux aussi, quelque chose ? »
Dernière étape du voyage, celle-ci amène aux balbutiements de l'opéra tel que les siècles suivants le connaissent. De la même manière que le rôle des chanteurs a évolué, les instruments peuvent ne pas servir qu'à soutenir et accompagner. S'ils sont là, il peuvent se substituer aux décors par exemple, en les « racontant » et les décrivant. Par exemple, ils peuvent imiter le bruit des épées dans un drame chevaleresque. C’est la naissance de l'opéra. (Extrait ci-dessous) L'opéra fondateur dans l'histoire de la musique classique occidentale est "L'Orfeo" de Monteverdi, composé en 1607, quatre ans après la parution du Livre V des madrigaux de Monteverdi qui l'y prépare.
Retrouvez "Le Voyage de Monsieur Monteverdi" - Séance musicale ludique dans son intégralité ainsi que toutes les informations sur le programme.
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