Lulu, l'autre Gainsbourg
On pourra tout dire de Lulu Gainsbourg. Qu'on n'aime pas sa voix, qu'on le trouve trop maladroit, trop ceci ou trop cela. Mais on ne peut pas lui reprocher de manquer de courage. Car il en faut un peu pour mettre ses pas dans celui d'un père, monstre sacré de la chanson française et s'exposer ainsi aux comparaisons incessantes, voire à la jalousie de ceux qui se disent : "Tiens encore un fils de...". Mais les fils de ont le droit d'avoir leur rêve. Lulu a mis du temps à accepter que les siens passent par la musique. "J'ai réalisé que même si mon père était grand dans ce qu'il faisait, ce n'est pas pour ça que je n'ai pas le droit de faire la même chose".
Comme son père, Lulu a d'abord étudié le piano, dès l'âge de 5 ans. Il est aussi passé par la case Conservatoire puis par le Berklee College de Boston où il a fini ses études l'an dernier. Car Lulu est avant tout un musicien et un pianiste. L'album "From Gainsbourg to Lulu" (Mercury/Universal) est là pour le prouver.
Au total, l'album compte 16 titres. Et s'ouvre sur "L'Eau à la bouche", la seule que Lulu chante en solo. Certes, on n'est pas dans les vocalises mais la voix est juste, feutrée et même si elle manque d'assurance, elle porte aussi en elle de belles promesses. Pour le reste, Lulu a ouvert les portes à d'autres artistes soit en chantant avec eux, soit en leur laissant carte blanche. On saluera sa version de "Requiem pour un con" avec M, sa "Javanaise" avec Richard Bona et bien sûr le célèbre "Bonnie & Clyde" pour lequel Scarlett Johansson a prêté sa voix rauque et suave. Parmi les bonnes surprises, il y a aussi ce "Sous le soleil exactement" revu et corrigé par l'inattendu Shane McGowan, le musicien irlandais qui fut aussi dans les années 80 le chanteur du groupe The Pogues. Dans la même veine, Lulu Gainsbourg a convoqué des vétérans du rock, Iggy Pop pour "Initial BB" (un peu décevant en terme d'orchestration) et Marianne Faithfull pour "Manon". Lulu a tout supervisé : les arrangements, les musiciens, le choix des chansons, le style musical qui fait souvent la part belle aux rythmes jazzy-gipsy.
Mais là où le jeune homme confirme qu'il est avant tout un musicien, c'est lorsqu'il est seul au piano avec des compositions signées de sa main. "Black Trombone "et "Fresh News From The stars" (dédiée à son père) dégagent une véritable atmosphère qui pourrait venir se calquer sur les images d'un film.
Au final, ce premier album dégage quelque chose de doux, un peu à l'image de son concepteur qui semble encore timide dans sa démarche artistique. Timide mais honnête. Rappelons que Lulu Gainsbourg n'a que 25 ans et qu'à son âge, son père n'avait pas encore percé. "From Gainsbourg to Lulu" donne envie de voir émerger une suite. Son auteur avoue ne pas savoir quelle sera la suite du chemin. On a juste envie de lui souhaiter qu'il puisse tracer le sien. Tout simplement.
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