Gérard Manset complète son intégrale "Mansetlandia" par un livre et un CD inédit
D'un côté un CD, version inédite en numérique d'un album paru en 1972, de l'autre un album de 600 pages de photos prises autour du monde et de textes composés eux aussi dans ces interstices, presque hors du temps et de l'espace, que Gérard Manset aime à explorer depuis la fin des années 60.
L'album de musique s'intitule "Long, long chemin" et comporte huit chansons, soit une de plus que le disque vinyle original. Mais ce n'est qu'une apparence, à l'origine deux des morceaux ("Celui qu'il sera demain" et "Celui qui marche devant") n'en faisaient qu'un. Hors-série à tirage limité, il n'est pas disponible sur les plateformes de streaming ou de téléchargement. Gérard Manset ne se galvaude pas. Son travail a un prix, on pourrait presque dire qu'il faut le mériter. Il est là, comme un voyageur solitaire depuis "Animal on est mal", chanson de 1968, et l'oratorio "La mort d'Orion". Manset, maître à penser sans secte, sait que son public trouvera le chemin de l'album et du livre.
Les chansons ne surprennent pas. Si Manset a muri et s'est enrichi au fil des décennies et de ses voyages en Asie, Afrique et Amérique Latine, sa voix est restée la même. Comme mal assurée, elle garde toujours son étonnante précision dans la froide évocation de micro événements, de visages croisés, de silhouettes entrevues, de matins chauds et humides, de cafés avalés à Phnom Penh, Manaus, Djibouti ou Brazzaville. Comme désabusé. Un regret dans la forme : pourquoi avoir choisi de livrer le CD dans un format trop grand pour entrer dans le coffret de l'intégrale parue l'année dernière ?
MaNsEtLaNdIa 1978 / 2008 Escales, le livre, pourrait constituer la version papier de ces chansons. Sur six cents pages de photos, le lecteur-auditeur retrouve ces infimes parcelles d'un quotidien exotique, sans jamais être folklorique, qui font l'alpha et l'omega des chansons de Manset. Au fil de ses pages, on croise des visages, des adolescentes trop vite grandies (au Marin' bar ?), des chambres d'hôtel pour routards, chambres d'Asie, des banlieues (nord ?) tristement ensoleillées, des fruits tropicaux oubliés sur une table... Maisons sur pilotis ou chats efflanqués, l'ailleurs de Manset n'est jamais luxueux.
De chacune de ses photos, on peut se dire : "ça je pourrais le faire". La différence, c'est que Gérard Manset prend ces images que d'aucuns jugeraient banales. Leur accumulation en dit pourtant long sur l'homme et sa manière de voyager. Et sa manière d'explorer le monde pour le traduire en textes et chansons. Et puis, surprise ! Le chanteur-photographe-écrivain-voyageur apparaît plusieurs fois. Lui, si jaloux de son image, daigne nous la livrer. Toujours austère, comme préoccupé, en attente. Toujours en voyage. Il est là, caché par un appareil photo dirigé vers un miroir, assis sur un lit d'hôtel, entre quelques moinillons boudhistes, ou de très jolies et très jeunes filles asiatiques. Il vient d'arriver, il s'apprête à partir, presque absent de l'image.
MaNsEtLaNdIa 1978 / 2008 Escales est le deuxième livre que Gérard Manset publie dans le même esprit aux éditions Favre. Le premier, d'un format supérieur, était paru en 2011 sous le titre "journées ensoleillées". Contrairement à MaNsEtLaNdIa, ses photos sont légendées. Pour connaître les lieux représentés dans le livre qui vient de sortir, il faut se rendre dans les notes de fin d'ouvrage. Une volonté de l'auteur, sans doute, qui ajoute du mystère au simple feuilletage du livre mais que l'on peut regretter.
Long long chemin
CD de Gérard Manset (1972 réédition 2017) 8 chansons Parlophone
MaNsEtLaNdIa - 1978 / 2008 Escales
Livre de photos et de textes de Gérard Manset 600 pages Editions Favre 44 euros
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