Cet article date de plus de six ans.

Gauvain Sers : 2017, l'année de l'envol

Encore quasiment inconnu il y a un an, Gauvain Sers est devenu la coqueluche de la nouvelle scène française en quelques mois. Son premier album "Pourvu" sorti en juin a été disque d’or en 2 mois et demi, et sa tournée solo se joue à guichets fermés. Le 23 novembre à Lyon, nous l’avions rencontré pour revenir avec lui sur cette année qui a tout changé.
Article rédigé par Jean-François Convert
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Gauvain Sers sur la scène du 42e Paléo Festival à Nyon (Suisse), le 22 juillet 2017 (Anthony Anex / EPA / Newscom / MaxPPP)
1. Automne - Hiver : Un coup de fil magique

Début octobre 2016, Gauvain Sers décroche le téléphone : "Allo, c’est Renaud, j'aime beaucoup tes chansons, je voudrais que tu joues en première partie de mes concerts au Zénith… " Le jeune Creusois a du mal à y croire, mais pourtant c’est bien vrai : il va ouvrir les concerts du Phénix tour, et pas seulement au Zénith, mais ensuite dans toute la France, qui va le découvrir dans les mois suivants.

A Culturebox, c’est un véritable coup de cœur lors du concert du 28 février à Lyon. Et l’enthousiasme est partagé par le public, comme le disent des personnes venues le (re)voir ce 23 novembre à Lyon: "On est venu voir Renaud en début d’année, et on a repris une place pour son deuxième passage au printemps, pour le voir lui, mais aussi pour revoir Gauvain".

Aux quatre coins de la France, le public est unanime : des textes inspirés, "Un chanteur proche des gens, abordable", "Et puis il a un truc". Entre janvier et avril, on sent que quelque chose est en train de naître sur les réseaux sociaux. Twitter s’enflamme après chaque concert, et tout le monde commence à devenir amoureux de la Creuse. D’autres fans expliquent : "Quand on l’a revu en avril, on a senti la différence avec janvier, le public reprenait les chansons, c’est quand-même plutôt rare pour une première partie !" 
2. Printemps - Eté : Un premier album qui casse la baraque

Les gens nous avaient aimé en première partie, sur cinq chansons, mais on ne savait pas s'ils allaient aimer l'album, ou venir nous revoir en concert entier. Ça a été inattendu et une très belle surprise.

Gauvain Sers

Début mai, un mois avant la sortie de l’album signé chez Mercury, le clip de la chanson-titre "Pourvu" est mis en ligne sur YouTube : réalisé par Jean-Pierre Jeunet, et avec la participation de Jean-Pierre Daroussin et Gérard Darmon, il propulse encore un peu plus le nouveau gavroche. Aujourd’hui, la vidéo a dépassé les 2 millions de vues.

L’album démarre très fort : en tête des ventes devant London Grammar, Katy Perry, -M-, et Camille, dès la première semaine, il devient disque d’or au bout de 2 mois et demi. On y retrouve les chansons du premier disque autoproduit, et des nouvelles, qui séduisent tout autant. "Dès le début on a accroché sur ses textes". Et toutes les générations sont concernées, "Mes enfants demandent Gauvain dans la voiture !" Une écriture fine, à la fois légère et profonde, jamais laborieuse, qui vient assez facilement, comme il nous le confie au mois de juin.
La photo de la pochette de l'album
 (Frank Loriou)
Des textes sur les petits rien du quotidien ou sur des sujets plus graves, des portraits toujours justes, une plume qui s’inscrit dans la lignée des grands de la chanson française : Brel, Brassens, Ferrat, Barbara, Renaud, Leprest... qu’il aime à citer lors de ses concerts.
3. Eté - Automne : Une tournée solo à guichets fermés

Même si quelques dates avaient déjà eu lieu en parallèle du Phénix tour de Renaud, ainsi que plusieurs festivals (dont le Printemps de Bourges et les Francofolies), la véritable tournée solo commence à la rentrée de septembre avec 2 dates à la Cigale début octobre, puis une trentaine de concerts dans toute la France. Les salles de capacité moyenne d’environ 300 places sont très vites remplies et la tournée se joue à guichets fermés. Désormais, c'est lui la tête d'affiche qui lance d'autres artistes en première partie, comme par exemple Govrache ou le lyonnais Zim.

Des fans viennent tôt dans l’après-midi pour être assurés de se trouver au premier rang. Certains ont déjà leur place pour l’Olympia le 22 mars, point d'orgue de la tournée 2018. Cette tournée se déroulera dans des salles d’environ 1000 places, avec cette fois un groupe complet, c’est-à-dire claviers-basse-batterie, en plus de Martial Bort à la guitare. Ce dernier n’est d’ailleurs pas en reste dans le coeur et l’attention du public. "On aime bien Gauvain, et puis aussi son guitariste ! "

Le son de Gauvain Sers est en effet indissociable du travail d’orfèvre de Martial Bort : un son limpide et cristallin, un jeu tout en finesse qui souligne et met en valeur les textes du chanteur. Il nous raconte leur rencontre : "On s’est rencontrés sur un festival à Pornic où Gauvain chantait et moi j'accompagnais une autre chanteuse, on s'est croisés à plusieurs reprises… le courant est super bien passé. Il y a un an et demi, il m'a appelé pour savoir si je voulais le suivre, j'ai dit oui, et j’ai bien fait !"

En attendant le groupe pour 2018, Martial joue l’homme-orchestre en assurant par des pédales d’effet la pulsation et les basses, qui donnent de l’ampleur aux chansons, et remplissent l’espace, invitant très souvent le public à frapper la cadence. 

Ça s'est fait très vite avec la tournée de Renaud, donc pas mal d'arrangements ont été créés sur scène

Martial Bort

Gauvain Sers et son guitariste Martial Bort, sur la scène du festival des Francofolies de la Rochelle, le 16 juillet 2017
 (Citizenside / Fabrice Restier)
De son côté, Gauvain n’est pas avare d’interactions avec le public : il raconte comment lui sont venues les chansons, il plaisante et taquine les susceptibilités régionales, et il propose même en jeu de deviner le personnage d’une de ses nouvelles chansons, "qui sera sur le deuxième album", et qui raconte l’histoire d’une des silhouettes évoquées juste avant dans "Le ventre du bus 96".

Les arrangements ont été peaufinés, le chanteur délaisse parfois la guitare en étant accompagné uniquement de son comparse corrézien, notamment sur "Comme chez Leprest", "Sur ton tracteur" (superbe partie de guitare de Martial), ou cette inattendue et touchante reprise de "Mon vieux".

Le concert se termine sur le tubesque et entraînant "Dans mes poches", mais le public en redemande et a droit en rappel à un deuxième inédit, au texte abrupt, qui décrit sans détour le quotidien d’une étudiante forcée à se prostituer pour vivre. Et puis c’est le tant attendu "Pourvu", repris en chœur par l’assistance, avant de définitivement se quitter sur le texte sans musique "Le poulet du dimanche". 

4. Automne - Hiver : Une nouvelle notoriété, RTL...et Johnny

Depuis plusieurs mois, on le voit participer à des émissions télévisées, que ce soit pour reprendre "Le mauvais sujet repenti" dans l'émission "Merci Brasssens" sur France 2, mais aussi "Petite Marie" de Francis Cabrel dans "Les 50 chansons préférées des français" ou dernièrement "Mistral Gagnant" de Renaud dans "300 Choeurs" sur France 3.

Quand on voit les enfants qui chantent toutes les chansons et qui s'achètent des casquettes, c'est tout nouveau et ça fait bizarre !

Gauvain Sers

Et puis Yarol Poupaud le contacte pour venir participer sur l'album hommage à Johnny, sorti le 17 novembre, disque qui aujourd'hui prend une saveur particulière. Il y interprète "Le pénitencier" en lui donnant un côté plus folk, qui revient au style de la chanson originelle.

Le 23 novembre 2017 (2 semaines avant le décès de Johnny Hallyday - NDLR) , lors de son concert à Lyon, Gauvain nous racontait cet enregistrement un peu spécial :

Culturebox : Cette participation pouvait sembler à priori un peu éloignée de ton univers?
Gauvain Sers : A la fois oui et non. C'est de la chanson française donc on appartient à la même famille, et à la fois c'est pas l'artiste qui m'a le plus influencé musicalement, même si il y a plein de chansons que j'adore. Quand on m'a proposé ce projet, je me suis replongé dans la discographie et c'est vrai qu'il y a tellement de tubes qu'on connait tous par coeur et qui ont traversé les générations. J'étais très touché d'en faire partie parce que je sais qu'il y a que des grands noms avec moi. C'était émouvant d'en être et aussi un challenge, s'attaquer à Johnny ! A la fois parce que c'est un chanteur incroyable et aussi parce qu'il a beaucoup de fans, et quand on touche à Johnny c'est pas évident. Je suis super content de ce qu'on a fait, on l'a fait un peu à ma manière. J'aime beaucoup la chanson et j'ai choisi celle-là (chaque artiste a choisi la chanson à interpréter - NDLR) parce qu'elle correspondait bien à ma couleur musicale, et j'ai renvoyé au réalisateur Yarol Poupaud un échange guitare-voix un peu comme si c'était moi qui avait écrit la chanson en quelque sorte. Du coup il est parti là-dessus, la base rythmique a changé, l'arrangement s'est basé sur mon idée de départ, et on l'a un peu personnalisée. Les gens qui sont très attachés à la version de Johnny vont trouver que c'est bizarre de la rendre un peu plus folk, mais la chanson de base elle a été écrite comme ça. Je suis très content de la version qu'on a faite, parce qu'elle est très différente [de celle de Johnny].
  (RTL / capture écran)
Autre conséquence de sa notoriété grandissante, "Pourvu" s'est retrouvé dans les 5 derniers en lice (sur 12 au départ) pour le titre d'album RTL de l'année. C'est le public qui s'est exprimé, avec cette année un record : 59000 personnes ont voté pour leur artiste préféré. Gauvain Sers sait qu'il doit son ascension à tous ces gens qui le soutiennent, et sa soudaine célébrité ne lui monte pas à la têe, il sait garder les pieds sur terre.

J'essaie de rester proche des gens et de ne pas les abandonner du jour au lendemain, parce que c'est grâce à eux que cette aventure dingue est possible, donc je les remercie aussi pour ça.

Gauvain Sers

Martial et Gauvain avec leur public à Annecy le 22 novembre 2017
 (DR)
Quand on demande à ce public enthousiaste, venu faire la queue plusieurs heures avant le début du concert, s’il est surpris de son succès, la réponse est sans hésitation :

Pas du tout, on est plutôt surpris qu'on n'en ait pas entendu parler avant !
Sans Renaud il ne serait peut-être pas arrivé aussi vite, mais c’est sûr qu’il aurait réussi quand-même.

Gauvain et Martial sur la scène de la salle Paul Garcin à Lyon le 23 novembre 2017
 (Jean-François Convert)
En tout cas ce qui est sûr, c’est qu’on n’a certainement pas fini d’en entendre parler. Les victoires de la musique approchant, gageons qu’elles seront récompenser à sa juste valeur ce jeune talent, plus que prometteur. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.