Pierre Cardin, le couturier-académicien fait défiler 70 ans de création à l'Institut de France
Sous les bustes de Mansart, Montaigne ou Lavoisier, Pierre Cardin, 94 ans, a présenté dans la grande salle des séances de l'Académie des Beaux-Arts, qui en a fait l'un des siens en 1991, un défilé de 150 modèles passant en revue 70 ans de création et de "sculptures vivantes" (robes sur mannequins).
Reportage Nathalie Hayter
"Immigré arrivé à deux ans de Vénétie avec vos parents ruinés par la Première Guerre Mondiale, vous avez réussi l'exploit consistant à devenir, et rapidement, l'un des Français les plus connus au monde!" a déclaré dans un vibrant hommage le graveur Erik Desmazières, président de l'Académie, devant les académiciens et 200 invités, dont le styliste Azzedine Alaïa.
"C'est un jour exceptionnel pour moi. C'est la première fois qu'un couturier présente son travail à l'Académie des Beaux-Arts. Jusqu'ici, il n'y a avait que des peintres, des architectes...", a confié à l'AFP Pierre Cardin, seul styliste français indépendant, propriétaire à 100% de sa griffe. "Pour la première fois en 70 ans de mode, je n'ai pas dormi de la nuit. Je n'ai jamais eu un tel trac avant un défilé", a-t-il ajouté, visiblement ému. "Depuis que mes pairs académiciens m'ont accueilli en 1991, je ressens un immense honneur. Je n'en ai pas connu de plus grands. L'Académie des Beaux-Arts m'a encouragé à dire et à faire."
Pour cet anniversaire de carrière, Pierre Cardin a sélectionné ses créations les plus emblématiques dont son célèbre manteau pour femme en laine rouge "plissée Soleil" de 1952 qui a créé sa renommée aux Etats-Unis mais aussi ses vestes sans col pour hommes que les Beatles ont adoptées.
Des robes de cocktail "flottantes" en jersey ou lamé, ornées de cerceaux, d'empiècements géométriques ou de martingales de cuir, des tenues "Cosmocorps" en lainage de 1967, d'autres à effets cinétiques inventées deux ans plus tard, des robes "Cardines" thermo-formées de 1971, des robes manches Pagode inspirées de ses voyages en Asie, des pantalons pour hommes retenus par de larges bretelles à porter torse nu, étaient au coeur de cette rétrospective qui a mobilisé 50 mannequins. Selon la tradition, une mariée dans une robe lamée argent sous un long voile de soie blanche a fermé la marche.
Ambassadeur de bonne volonté de l'Unesco, Pierre Cardin est venu saluer en tenue d'académicien, entouré de deux mannequins également en habit vert, sa couleur préférée. "La raison d'être de ma vie, c'est la mode", a confié à l'AFP le couturier, précurseur du prêt-à-porter. "Je suis un enfant des Faubourgs, je suis devenu Pierre Cardin ! Quand j'étais jeune, bien avant d'être célèbre, une cartomancienne m'a annoncé que mon nom flotterait partout dans le monde."
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