"Mon corps n'est ni mâle ni femelle" : une mannequin belge révèle être intersexuée
Figure des défilés de mode, Hanne Gaby Odiele est devenue, lundi, l'une des premières femmes publiques à faire ce "coming out".
"C'est vraiment important pour moi, à ce stade de ma vie, de briser le tabou." La mannequin belge Hanne Gaby Odiele a affirmé, lundi 23 janvier, dans des entretiens accordés à USA Today et Vogue (en anglais), qu'elle était intersexuée. La top model de 29 ans devient ainsi l'une des premières figures publiques à révéler que ses caractéristiques sexuelles – organes génitaux, chromosomes... – ne correspondent pas à la binarité traditionnelle mâle/femelle. Cet état encore méconnu concerne entre 0,05% et 1,7% de la population, selon l'ONU.
Lorsque Hanne Gaby Odiele avait 2 semaines, ses parents se sont vus dire, lors d'un contrôle sanguin, que leur fille était atteinte du syndrome d'insensibilité aux androgènes. Son patrimoine génétique était masculin, avec des chromosomes X et Y, mais avec une résistance aux hormones masculines. Née sans utérus ni ovaires, Hanne Gaby Odiele possédait des testicules, restés dans son corps.
"Je suis fière d'être intersexe, affirme la mannequin, qui a défilé pour les plus grands noms de la mode, de Dior à Alexander Wang, en passant par Chanel, Givenchy et Prada. A notre époque, il devrait être complètement normal de parler de ça." Elle n'a jamais eu de règles et ne pourra pas avoir d'enfants. "Mais je n'urine pas debout, je n'ai pas de pénis, lance-t-elle. Je suis intersexe, mais je suis bien plus femme."
Des opérations sans "nécessité médicale"
L'une des raisons du "coming out" de Hanne Gaby Odiele est l'attitude d'une partie du corps médical à l'égard des personnes intersexuées. Ses testicules lui ont été retirés à 10 ans, sans qu'elle ne comprenne ce qui lui arrivait. Ses parents avaient été mis en garde contre des risques de cancer et de développement anormal en tant que femme si elle n'était pas opérée. A 18 ans, elle a aussi subi une opération de reconstruction vaginale.
Selon une professeure de pédiatrie citée par USA Today, il n'y a pas de données fiables et sur le long-terme démontrant un risque accru de cancer pour les personnes atteintes de ce syndrome si elles ne sont pas opérées. Dans les faits, selon cette spécialiste, la plupart des opérations sont motivées par une envie de rendre les enfants plus "normaux".
"Certaines choses n'ont pas besoin d'être changées, affirme une urologue à Vogue. Il y a parfois une nécessité médicale, mais presque toutes les opérations sont purement cosmétiques - et peuvent laisser les gens avec des cicatrices, incapables d'avoir des rapports sexuels, et exposés à des risques de ménopause prématurée."
La France concernée par cette question
"Ce n'est pas grave d'être intersexe", estime Hanne Gaby Odiele, qui se dit "très en colère que ces opérations aient encore lieu". La jeune Belge, mariée au mannequin John Swiatek, envisage à présent de s'engager au service des enfants intersexes, afin qu'ils puissent attendre l'âge adulte avant de se prononcer, par eux-mêmes, sur d'éventuelles opérations.
>> "Etre intersexe en France, c'est vivre avec la douleur et la honte"
En mai 2016, le Comité contre la torture des Nations unies s'est dit "préoccupé" par des "interventions chirurgicales non nécessaires et parfois irréversibles" pratiquées en France sur des enfants intersexués, "sans le consentement éclairé de ces personnes ou de leurs proches".
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