Journées européennes des métiers d'art : un grand week-end de curiosité entre tradition et technologie
"Le savoir-faire et le numérique permettent d'envisager des productions totalement nouvelles", explique Marie-Hélène Fremont, directrice de l'Institut national des métiers d'art. Avec 280 métiers représentés en France, un ambassadeur par région, la 11e édition a "pour mission de valoriser ces savoir-faire et de montrer que ce sont des métiers d'avenirs", indique la directrice. Signe du renouveau de ces métiers à l'image parfois poussiéreuse, "l'afflux majeur de jeunes qui sortent des filières classiques non plus par défaut, mais par un choix raisonné et très volontaire", indique Marie-Hélène Fremont.
3 métiers mode à découvrir à Paris
Dans l’atelier de la Maison Heurtault sont créés des ombrelles et parapluies que développe Michel Heurtault, Maître d’art depuis 2013. Le visiteur découvre le travail des textiles, les techniques spécifiques de coupe, de déformation de la matière, qui permettent de créer ces objets complexes. Dans l’atelier, certains outils de coupe ont plus de 200 ans et permettent d’obtenir la finition de la haute couture française. Tout l’art ici est dans le travail des ingrédients : l’acier souple et solide des baleines, la douceur des lins, des cotons et des soies, la sensualité des bois. (Viaduc des arts. 85 avenue Daumesnil. 75012 Paris).Quand le fondateur Édouard Clairvoy prend ses quartiers à Montmartre en 1945, il devient "le peintre bottier de la butte". Ses rencontres avec de grands artistes l’amènent à fréquenter le milieu du spectacle et du music-hall pour y chausser les danseuses du Moulin Rouge et du Lido notamment, dès les années 1960. La maison Clairvoy compte parmi sa clientèle des danseurs de l’Opéra de Paris, des artistes du Cirque du Soleil, des acteurs et chanteurs... Nicolas Maistriaux et son équipe réalisent des chaussures pour particuliers et professionnels à la fabrication née d’un savoir-faire précieusement gardé. Sur réservation (17 rue Pierre Fontaine. 75009 Paris).
Emil Bruno Meyrowitz est l’un des pionniers de l’optique mondiale. Il installe sa première boutique à Paris en 1904 et devient le lunetier attitré du Tout-Paris. Parmi ses clients : Sarah Bernhardt, André Gide, Paul Claudel, Sacha Guitry ou Louis Jouvet. À la fin des années 20, il crée les "Goggles", des lunettes de protection destinées aux exploits aéronautiques et à la compétition automobile. Les aviateurs Charles Lindbergh, Roland Nungesser, Jean Mermoz... s’en équipent, tout comme les pilotes de la Scuderia Ferrari. La boutique a vu défiler les stars Jackie Kennedy, Audrey Hepburn, Greta Garbo, Grace Kelly, Ingrid Bergman, Anouk Aimé, Catherine Deneuve… À l’occasion des JEMA, elle proposera des démonstrations de savoir-faire. A découvrir dans son musée : les lunettes Goggles de Maryse Bastié, les lunettes rondes de Sacha Guitry et de Marcel Achard, celles aux verres bleus de Claude Monet, les montures d’Henri Salvador ou encore le modèle des lunettes de Jacques Chirac datant des années 80. (5 rue de Castiglione. 75001 Paris).
Mais aussi en régions
Du côté des savoir-faire manuels, le plisseur Maître d'art Pietro Seminelli, dont l'un des ateliers est implanté à Molay-Littry en Normandie, a réinventé et poussé à l'extrême son activité en créant de véritables sculptures en papier kraft, assisté par un ordinateur. Il a su mettre sa technique au service des plus grands couturiers et notamment du créateur de mode japonais Yohji Yamamoto.De la créativité, désormais, accessible
L'autre enjeu de ces rencontres avec les artisans "d'une génération collaborative et interdisciplinaire" est de montrer "que le public peut faire appel à eux", explique Marie-Hélène Fremont. La plupart "s'adaptent au budget de leurs clients", et "ce n'est pas inabordable, 61% des visiteurs ont acheté ou on l'intention d'acheter", assure la directrice. Avoir un sac personnalisé ou un bijou unique "n'est pas plus cher" et "permet de créer du lien" entre les créateurs et leurs clients, insiste Marie-Hélène Fremont.Un lien économique aussi, d'abord parce que la majeure partie des artisans sont ancrés dans leurs régions, et car ils font travailler des personnes qui leur sont proches. "Ils sont là pour développer les métiers au carrefour de la culture et de l'économie. Il y a un savoir-faire et une part de créativité", sur leur territoire ajoute la directrice avant de conclure : "La transmission ce n'est pas le passé, mais c'est penser le futur."
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