La première "Black Fashion Week Paris" veut faire connaître ses créateurs
"Nous voulons simplement faire connaître, au-delà des frontières africaines, des créateurs très connus en Afrique ou dans leur pays mais qui n'ont pas accès au marché international", explique-t-elle. "Cette mode n'est pas faite par des Noirs pour des Noirs. C'est paradoxalement une mode multiculturelle, très variée et très instinctive, qui n'est pas codifiée contrairement à la mode internationale avec ses couleurs et ses tendances", précise la styliste. "Pour les mannequins, en majorité noires, c'est aussi l'occasion de défiler car la plupart des podiums font appel à des blanches, plus chères, dont certaines se sont d'ailleurs désistées de la Black Fashion Week au profit d'autres défilés mieux payés", souligne-t-elle.
Interview d'Adama Ndiaye, créatrice et organisatrice de la Black Fashion Week
"Il n'y a qu'en France que le mot black pose problème. Ailleurs, exprimer sa différence n'en pose pas", déplore-t-elle, évoquant la "Black Fashion Week" de Prague (novembre 2011) et celles à venir de Montréal (novembre 2012) et de Salvador de Bahia, au Brésil (mars 2013). Elle déplore aussi que trois stylistes, deux Angolaises et une Malienne, n'aient pu obtenir de visa pour venir en France.
Katherine Pradeau, une passionnée des cultures nomades
C'est une habituée des Fashion Week Black (Tunisie, Maroc, Burkina Faso...), qui ne défile pas ce week-end mais devait y participer, trouve dommage qu'il n'y ait pas d'interaction entre ces fashions week. "C'est compartimenté. C'est pourtant intéressant de ne pas se marginaliser" explique-t-elle avant de rajouter que "la mode africaine organise plus des shows-évènements que des fashions commerciales".
La créatrice Française, dont les collections sont marquées par l'empreinte des cultures nomades du désert du Sahara, s'y rend depuis bientôt 12 ans et collabore avec les artisans du Niger. Elle s'intéresse au travail de recherche autour du cuir et de l'artisanat Touareg ainsi qu'à celui des broderies traditionnelles et des bijoux en argent. 'C'est tout un travail également autour du vêtement. Mon objectif est de réussir avec la culture d'un pays, à lier la mode et le design" insiste-t-elle.
Backstage du défilé Katherine Pradeau haute couture 2006 à Paris
Des avis, cependant, partagés
Jean-Jacques Picart, consultant de la mode et du luxe, est dubitatif : "Pour moi, le talent n'a ni couleur ni nationalité. S'il s'agit d'une mode folklorique, typiquement africaine, pourquoi pas. Mais si ces créateurs ont pour ambition d'habiller les femmes de la planète alors c'est sectaire." Noir ou pas, accéder à un premier défilé "relève du parcours du combattant et coûte cher même si le talent, quand il existe, se repère et fait très vite du buzz", relève un agent artistique sous couvert d’anonymat. "C'est encore plus difficile pour les créateurs africains, assure Adama Paris. Car en Afrique, la mode n'est pas encore perçue comme une industrie. Une collection, même réalisée, ne parvient souvent pas à se vendre."
Adama Paris, organisatrice de la Dakar Fashion Week, a lancé fin 2011 la 1re Black Fashion Week Prague, avant de venir ce week-end à Paris
Une quinzaine de créateurs noirs d'Afrique ou vivant en France, en Haïti ou aux Etats-Unis présentent leurs collections : Laquan Smith (Etats-Unis), Jamila Lafqir (Maroc), Sophie Nzinga Sy (Etats-Unis/Sénégal), J-Cheikh (Etats-Unis), Olivier Couturier (France/Martinique), Mame Fa Gueye Ba (Sénégal), Martial Tapolo (Cameroun), le créateur du Festival international de mode africaine (Fima) Alphadi (Niger), Karim Tassi (Maroc), Zacometi (Haïti), Thula Sindi (Afrique du Sud), Elie Kuame (Côte d'Ivoire/Liban) et Soucha (Tunisie/Egypte).
Black Fashion Week. Pavillon Cambon. 46, rue Cambon. 75001 Paris. Les 5 et 6 octobre 2012, défilés à 18h
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