Fashion Week printemps-été 2023 : trois moments intenses avec les défilés Ester Manas, Balenciaga et Victoria Beckham
106 maisons ont présenté leur collection féminine printemps-été 2023 du 26 septembre au 4 octobre 2022. Trois d'entre elles ont retenu notre attention.
Robes, talons, corps dénudés : la féminité est à la mode à Paris, outrageusement théâtrale ou relevée par une pincée de folie pour oublier les temps difficiles. Dans la boue avec Kanye West et Balenciaga, avec les femmes rondes d'Esther Manas ou dans les coulisses du défilé dans la Ville Lumière de Victoria Beckham... Pour prolonger le plaisir de cette semaine féminine printemps-été 2023, voici trois de nos coups de cœur solidement ancrés dans la société d'aujourd'hui.
Ester Manas : faire oublier aux femmes rondes les "obsessions ridicules"
"Les femmes rondes n'ont plus de mal à exister", déclare la Belge Ester Manas connue pour ses robes allant à tout le monde. La collection sensuelle dévoile la peau et les courbes : "C'est l'ADN de la maison, soyons clairs". Baptisée Sunset body (Corps au coucher du soleil), c'est une réflexion sur "le summer body", la ligne la plus parfaite possible qu'on est censé avoir pour aller à la plage, à force de régimes et de sport. "La collection est partie du fait que beaucoup de femmes ont une obsession un peu ridicule, qui est le summer body. On c'est posé la question : C'est quoi ? Le corps dans lequel on va s'aimer le mieux", explique la créatrice dans les coulisses du défilé au Palais de Tokyo.
Les robes "seconde peau" sont taille unique et extensibles, marque de fabrique du duo composé d'Ester Manas et Balthazar Delepierre, demi-finalistes du Prix LVMH en 2020 et vainqueurs du Prix Galeries Lafayette au Festival international de Hyères en 2018 pour leur collection Big Again. La palette copie celle du coucher du soleil, vibrant avec le rose, l'orange, le violet ou la lavande. Les tenues sont ornées de volants et de froufrous, histoire de se faire remarquer et affirmer : "J'existe". Outre les robes de soirée, la collection offre des maillots de bain très échancrés et des robes de mariée sexy.
Venu des pays anglo-saxons, le mouvement "body positive", qui lutte contre les normes stéréotypées, gagne du terrain en France et s'infiltre sur les podiums - la mannequin star américaine ronde Ashley Graham a ainsi défilé pour Balmain en mini-robe -, sans toutefois faire la loi. "Avec les réseaux sociaux, il y a une prise de pouvoir des femmes rondes là où elles étaient solitaires avant. Il y a une communauté immense qui est en train de se créer où elles peuvent discuter entre elles et s'affirmer", souligne Ester Manas. "Il y a quelque chose de très rassurant dedans. Étant donné que les clientes, les filles dans la rue, ont envie de ça, la mode doit se plier", ajoute-t-elle, même si son défilé fait figure d'exception qui confirme la règle. Les rondes "existent mais pas forcément dans le luxe où il est un peu difficile d'avoir accès à de belles choses quand on est grande taille. C'est ce qu'on essaie de changer". La styliste est pour la "démocratisation totale" de la mode, qu'elle juge trop "élitiste".
Balenciaga dans la boue avec Kanye West
Le rappeur Kanye West a ouvert le défilé Balenciaga, Casquette sous une capuche, pantalon en cuir et veste noire avec des poches multiples, chaussé de grosses baskets, l'artiste américain et ami du styliste géorgien, Demna, a inauguré le show à Villepinte, au nord de Paris, loin du faste de la Fashion Week. Sombre et dérangeant, il s'est déroulé dans un décor de chantier avec une forte odeur de boue.
Les hommes en étaient les vedettes : tantôt en shorts et bombers noirs, tantôt en ensemble vert fluo composé de short et pull à capuche entre sportswear et tenues d'intérieur. Un jean blanc était taché de boue. Certains d'entre eux ont arboré comme accessoires des porte-bébé ou des sacs à main colorés et enfantins évoquant les peluches. D'autres avaient de grands sacs roses pour faire des courses ou des sacs carrés portés sur l'épaule avec une manche intégrée, la pièce forte de cette collection. Pour ce défilé mixte en marge de la Fashion Week, les femmes foulent la boue en talons aiguilles tandis que les hommes sont en sabots et sneakers. Robes roses, blanches ou noires moulantes, tenues scintillantes et transparentes en dialogue chromatique avec la boue, robes argentées ou à traîne, elles semblaient prêtes à aller faire la fête.
Après avoir annoncé qu'il abandonnait son nom Gvasalia dans le monde de la mode, où il se présente désormais par son seul prénom, il a indiqué qu'il n'expliquerait plus ses collections. En tant qu'"art visuel", la mode "n'a pas besoin d'histoire pour être vendue", a souligné Demna, semblant se joindre aux designers qui n'accompagnent leur show d'aucun communiqué. "Je déteste le cadre et les étiquettes", poursuit celui qui aime toutefois exhiber le logo Balenciaga sur ses créations.
Victoria Beckham : cool, glamour, ultra féminine
Avec un casting 5 étoiles sur le podium, sa famille se mêlant aux invités, Victoria Beckham a débuté à la Paris Fashion Week, la plus prestigieuse au monde. L'ex-Spice Girl n'est pas venue saluer les invités comme le veut l'usage après le show qui s'est déroulé au Val-de-Grâce, ancienne abbaye et hôpital militaire devenue musée. Vêtue d'une longue robe noire ajustée et de bottes chaussettes mettant en valeur sa minceur, au bras de son mari David Beckham, la styliste britannique est sortie dans la cour pour poser. "C'est Londres qui vient à Paris et c'est cool", pouvait-on entendre.
Sur le podium, l'ultra-féminité était de mise : talons aiguille, découpes, transparences, robes moulantes... présentée par des mannequins très minces à l'image de la styliste de 48 ans, aux 30 millions d'abonnés sur Instagram et qui promeut sur Tik Tok son régime à base de poissons et légumes vapeur. Rose, bleu, mauve et lilas : les couleurs printanières s'ajoutent au noir cher à la créatrice : la mannequin Bella Hadid porte une robe verte avec la taille soulignée et de hauts gants noirs. Sa soeur Gigi est en tailleur pantalon noir.
Lancée en 2008, la marque, qui a défilé à New York et à Londres, a fait une pause de deux ans. La PFW "valide les marques qui ont une vraie identité créative", estime Benjamin Simmenauer, professeur à l'Institut Français de la Mode. Pour Victoria Beckham, défiler à Paris signifie entrer "dans la cour des grands", a expliqué Ralph Toledano, président du conseil d'administration : "C'est une femme qui parle aux femmes avec des vêtements qui sont en même temps créatifs et désirables et sont le reflet de Victoria", qui incarne une "femme active", un style "sexy, élégant et subtil, avec une touche British", énumère-t-il.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.