"Les clients vont vouloir de la transparence sur la provenance du produit" : la créatrice Nathalie Blanc lance un manifeste pour consommer mieux, après le confinement
La créatrice de lunettes Nathalie Blanc a toujours fait le choix de la qualité à celui de la quantité. Sa philosophie est depuis toujours de consommer mieux en pleine conscience. Rencontre avec une femme engagée qui vient de lancer un manifeste en faveur du savoir-faire français.
Depuis le début du confinement, la créatrice de lunettes Nathalie Blanc a mis en place un Facebook live hebdomadaire chaque mercredi à 17h pour "faire preuve de solidarité et d'entraide". Elle y répond aux questions et échange avec les opticiens, les fabricants et les marques, pour trouver des solutions afin que tous puissent sortir entiers de cette crise induite par la pandémie de coronavirus. Elle vient aussi de lancer un manifeste en faveur du savoir-faire français pour alerter les pouvoirs publics et leur demander des aides.
Depuis la création de sa marque, Nathalie Blanc a fait le choix d’une fabrication 100% française pour tout ce qui concerne les montures qu’elle dessine et réalise. Associée à deux usines, basées à Evreux et dans le Jura, elle produit made in France avec tout le savoir-faire des lunetiers français car pour elle "défendre le savoir-faire français ne peut plus attendre".
La créatrice explique à Franceinfo Culture les raisons qui l'ont poussé à organiser ces Facebook live et à lancer ce manifeste. Rencontre avec une femme engagée.
Pourquoi avez-vous lancé un Facebook live hebdomadaire depuis le 18 mars ?
Pour garder le contact avec la filière de mon métier : le monde de l'optique, du fabricant aux distributeurs. Pour ne pas se faire oublier, pour rassurer et préparer le monde d'après.
Quels enseignements tirez-vous de ces Facebook live ?
Gardez le lien a été capital. Le niveau de connaissance des solutions pour sortir de la crise est très hétérogène : certains savent tout, d'autres sont complètement perdus. Je les accompagne pour sortir de la crise et ensemble nous avons trouvé de vraies solutions pour garder la tête hors de l'eau : paiement retardé grâce aux usines qui vont faire des efforts, mise en avant des boutiques malgré la fermeture... Dans ces moments confinés, j'ai aussi mis en place des moments joyeux avec cours de cuisine avec des chefs pour nous occuper et nous divertir... Les gens sont très disponibles donc les Facebook live ont cartonné. À venir aussi des échanges en Facebook live avec mes fabricants.
Pensez-vous que cette pandémie va changer nos réflexes ?
Oui, les gens vont acheter français à la sortie de la crise. Le consommateur est maintenant très concerné par ce problème. Nous sommes totalement dépendants de l'Asie. 90 % des lunettes viennent de Chine ! Nos savoir-faire, nos cerveaux, nos richesses disparaissent. Il y a 50 ans, il y avait 200 usines de lunettes en France, aujourd'hui il n'en reste que neuf ! Ce savoir-faire ancestral magnifique est en train de disparaître, c'est terrible. Les lunettes françaises sont les plus belles du monde. C'est un peu notre culture, notre intelligence qui disparaît.
Quels sont les changements que vous envisagez ?
Je mettais très en avant la fabrication française. C'est mon mantra depuis longtemps. Mais là nous avons repensé toutes nos publicités sur le lieu de vente avec le fabriqué français mis en avant. Nos étuis aussi. Il va falloir que les assurances et la sécurité sociale augmentent le remboursement de la monture, pour que les gens puissent porter des lunettes françaises et non pas des montures chinoises. Les clients vont vouloir de la transparence sur la provenance du produit. Il faudrait un yuca (application pour scanner les produits alimentaires, ndlr) pour avoir la traçabilité du produit.
Pourquoi lancer ce manifeste en faveur du savoir-faire français pendant le confinement ?
Pour toutes ces raisons. Je suis bouleversée de voir que nos hommes politiques ne se rendent compte qu'aujourd'hui du drame que cela représente de délocaliser à ce point. Après avoir sinistré en 50 ans les vallées du Jura (Nathalie Blanc est associée à une usine dans cette région, ndlr), après avoir fait du lobbying avec les assurances pour rembourser au minimum les montures de lunettes - et donc imposer des produits chinois qui au bout de 15 jours seront cassés -, il vous faudra attendre deux ans pour être à nouveau remboursé.
Que propose ce manifeste ?
Déjà, il crée une communauté de gens qui se sentent concernés, il fédère. En deux jours, près de 1.000 signatures de ministres, de chefs d'entreprises et de personnalités : Pierre Hermé, Jean-Louis Borloo, Jean D'Arthuys (Lejaby)... Ensuite nous pourrons être plus forts pour imposer une protection du produit français.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.