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A Damas, un des derniers artisans de la soie veut transmettre son savoir-faire ancestral

Sur un toit de la vieille ville de Damas, Mohamed al-Rihaoui s'apprête à teindre des fils de soie utilisés pour confectionner le brocart damascène. Ce pays est réputé depuis des siècles comme l'un des plus grands foyers de l'artisanat arabe. Mais avec la guerre "Plus personne ne travaille dans la teinture de la soie, on doit être deux ou trois dans toute la Syrie", déplore le quinquagénaire.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Mohamed al-Rihaoui sort des fils de soie de la teinture
 (LOUAI BESHARA / AFP)

Pourtant, son activité est essentielle : sans ces artisans, il n'y aurait plus de brocart de Damas, cette étoffe qui fait la fierté de l'industrie syrienne, tissée à la main avec de la soie naturelle et des fils d'or. La renommée des artisans de Syrie est mondiale. Une légende urbaine voudrait qu'en 1947 le président de l'époque, Choukri al-Koutli, ait offert un morceau de ce tissu à la reine Elizabeth II, qui l'aurait utilisé pour confectionner sa robe de mariage.

Mohamed al-Rihaoui regarde ses fils de soie après teinture
 (LOUAI BESHARA / AFP)
"Le métier lutte contre la mort. Ces fils, c'est la base pour la fabrication du brocart damascène, et sans eux, le brocart aussi va mourir", indique Mohamed al-Rihaoui, s'activant sur un toit de Damas dans son petit atelier simplement protégé d'une bâche. "On n'a plus de touristes, plus de visiteurs étrangers", regrette cet artisan de 53 ans. En cause, la guerre dévastatrice qui ravage la Syrie depuis 2011, dans un pays réputé depuis des siècles comme l'un des plus grands foyers de l'artisanat arabe.

"Mes mains resteront belles tant qu'elles seront enveloppées de soie"

Avec son fils Nour, 15 ans, Mohamed al-Rihaoui soulève de gros bâtons en bois sur lesquels sont disposés les fils de soie blancs, qui sont plongés de manière répétée dans de l'eau bouillante pour éliminer les impuretés. Les fils sont rincés dans un bassin d'eau froide avant d'être disposés en pelote et accrochés au plafond, où ils vont sécher pendant une heure.
Mohamed al-Rihaoui lave ses fils de soie pour ôter les impuretés
 (LOUAI BESHARA / AFP)
Il hésite devant des petits pots renfermant des pigments naturels de couleur en poudre : jaune, rouge, vert. Puis mélange un peu d'eau. Verse le tout dans un récipient où les fils tremperont pour absorber la couleur. Résultat : une pelote de fil d'un vert éclatant et d'une grande souplesse.
Mohamed al-Rihaoui prépare ses fils de soie avant la teinture
 (LOUAI BESHARA / AFP)
Sa journée terminée, il observe ses mains calleuses couvertes de peinture verte, abîmées par des années passées à manier les barres en bois. "Mes mains resteront belles tant qu'elles seront enveloppées de soie", dit-il, dans un large sourire.

Fuyant les violences, il a abandonné en 2011 sa localité d'Aïn Tarma, à l'est de Damas, dans le fief rebelle de la Ghouta orientale. Depuis, le secteur est retombé aux mains du régime. Là-bas, il possédait un atelier de plusieurs pièces, richement équipé, et employait 14 personnes. Aujourd'hui, tous ont fui le pays en guerre ou ont été enrôlés dans l'armée.
Mohamed al-Rihaoui trempe le tissu de soie dans un bain de teinture
 (LOUAI BESHARA / AFP)

Faible demande et problème de transmission

"Avant la guerre, je travaillais tous les jours de la semaine. Maintenant, on travaille parfois un ou deux jours seulement, en raison de la faible demande", déplore cet homme qui, pour s'en sortir, s'est partiellement reconverti en repasseur. "Plus personne ne veut apprendre le métier, il ne rapporte pas grand-chose", se désole-t-il. "La génération actuelle ne s'intéresse plus au travail manuel, qui nécessite patience et méticulosité", dit-il, en lançant à Nour, qui travaille à ses côtés, des consignes sur un ton ferme.

Les fils de soie autrefois produits en Syrie sont aujourd'hui importés d'Inde ou de Chine en raison du conflit. La guerre a porté un coup de massue à une activité déjà en déclin. Avant 2011, les artisans étaient présents partout en Syrie, notamment à Alep, connue pour ses commerçants de soie et de textile.

"Ce métier, c'est un vieil homme qui attend sa mort, et nous faisons tout pour le relancer", lâche le quinquagénaire, expliquant qu'il veut transmettre son savoir-faire ancestral et compte sur son fils Nour pour prendre la relève.

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