Un inédit de Jean Giono, longtemps considéré comme perdu, vient d'être publié

Un chercheur en histoire a retrouvé un carnet de voyage de l'écrivain provençal, mort en 1970, récit d'une longue marche dans la Haute-Drôme.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'écrivain Jean Giono dans son bureau en 1955. (ERWIN BLUMENFELD / CONDE NAST COLLECTION EDITORIAL)

Un récit de voyage inédit de Jean Giono, longtemps considéré comme perdu, paraît jeudi 3 octobre 2024 après avoir dormi dans des archives judiciaires pendant plus de quatre-vingts ans. "Voyage à pied dans la Haute-Drôme", aux éditions des Busclats, une collection de Gallimard, raconte un périple fait par l'auteur du Hussard sur le toit en juillet 1939.

Giono mentionnait ce cahier sans préciser où il s'était égaré. Et les experts n'espéraient plus le lire un jour. Mais en faisant des recherches pour un mémoire consacré à la section spéciale de la cour d'appel de Paris, une juridiction d'exception mise en place pendant l'occupation nazie, le chercheur en histoire Antoine Crovella est tombé sur ce texte conservé aux Archives nationales.

L'ultrapacifiste Giono était une cible

Giono fut en 1941 l'une des cibles de cette juridiction créée pour réprimer les militants du Parti communiste, alors interdit. L'écrivain de Manosque avait eu, comme beaucoup d'auteurs avant-gardistes des années 1920-1930, des affinités avec le parti. Mais il avait rompu avec lui en 1936.

Jean Giono, ancien soldat de la Première Guerre mondiale, ultrapacifiste, désapprouvait qu'on prenne les armes pour défendre les Républicains en Espagne. Le romancier est mis en cause dans une obscure affaire autour d'un groupe communiste supposé à Landry (Savoie), qu'en réalité, il ne connaît pas. Son carnet de voyage est l'une des preuves montrant qu'il n'est jamais allé dans ce village. Il ne lui sera pas rendu par ses juges.

L'antisémitisme des années 1930

Paradoxalement, à cette époque, Giono est sympathisant du régime de Vichy, lequel satisfait son pacifisme. En juillet 1939, il a consigné ses impressions de la région de Nyons, qu'il a parcourue en vue d'un roman qui paraîtra en 1951, Les Grands chemins. Entre les notes sur la beauté des paysages ou le récit de ses rencontres avec les habitants, qui constituent presque tout ce "voyage", on relève un passage caractéristique de l'antisémitisme des années 1930, quand Giono aperçoit un avion de ligne.

"Imaginer la carlingue avec ses passagers, sans doute des banquiers ou des modèles de mode, des mannequins de grand tailleur ou Madame Grünbaum quelque chose ou Madame Rothschild ou des marchands d'huile", écrit-il. Antoine Crovella commente ainsi ces lignes : "La démarche – littéraire et politique – de Giono se veut antimoderne, défendant le paysan – et les valeurs fantasmées de la terre qui lui sont attachées – contre les puissants et l'internationalisme."

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