Sébastien Fresneau et Gauthier Morax, le binôme pensant d'un Salon Livre Paris renouvelé
Pavillon 1 du parc des expositions de la Porte de Versailles. Jeudi 14 mars, mi-journée. Il est plutôt calme, doudoune sans manche (il fait frais), estampillée Livre Paris ("ça fait un peu BTP", sourire en coin), sacoche sous le bras, le directeur, Sébastien Fresneau nous embarque dans les allées bordées de cartons, d'aspirateurs, les personnels affairés à bichonner les stands quelques heures avant l'inauguration du 39e Salon Livre Paris, qui se déroule Porte de Versailles du 15 au 18 mars prochain.
"Une ligne directrice et des choix"
"Il faut juste espérer que l'on ne va pas croiser dix personnes qui ont des questions à me poser !", s'amuse-t-il. Sébastien Fresneau est directeur du salon Livre Paris depuis deux ans, et sous son impulsion, cet événement a pris un sacré virage. "Moi ce que je voulais apporter sur cet événement, c'est une ligne directrice et des choix. Sur un événement comme ça, le plus difficile, faire des choix, et s'y tenir".Diplômé de l'Essec, passé par la musique avant d'échoir, et "c'est un bonheur", comme directeur de ce gigantesque événement Sébastien Fresneau s'est jeté dans l'entreprise avec enthousiasme. "Quand j'ai été nommé, j'ai commencé par une immersion complète pendant les quatre jours du salon 2016. J'ai interviewé des tas de gens, et notamment les éditeurs, pour savoir ce que les gens attendaient du salon", raconte-t-il.
Avant c'était "je vous en mets combien? (de mètres carrés)"
"Ce qui est ressorti, c'est que le public avait envie de savoir ce qu'il y a derrière les livres, dans les coulisses de l'édition, comment tout ça se fabrique et aussi une demande de sens", souligne Sébastien Fresneau. "Sur la scène Les Coulisses de l'édition, nous allons donc mettre dans la lumière ceux qui habituellement restent dans l'ombre, les éditeurs", explique Sébastien Fresneau. "Jusqu'ici les rapports avec les éditeurs, c'était un peu : 'je vous en mets combien' (de mètres carrés pour le stand)".Aujourd'hui, l'idée, c'est de les associer à la programmation, de les inciter à proposer des choses. Il y a ceux qui préfèrent rester sur la présentation des livres et les dédicaces, et ce n'est pas un problème, il faut que chacun trouve son compte, mais nombre d'entre eux sont ravis de proposer des animations sur leurs stands", confie Sébastien Fresneau.
Une idée des éditions Zulma cette année, par exemple : inviter les visiteurs à proposer le titre d'une chanson à un écrivain présent sur le stand (Hubert Haddad, Jean-Marie Blas de Roblès) qui associera cette musique à un livre du catalogue de la maison pour construire ensemble une bibliothèque littéraire et musicale.
"Plus vivant, plus interactif", avec des "nouvelles voix"
Sébastien Fresneau vient du monde de la musique, "et ce qui est très fort dans la musique, c'est le côté émotionnel, que l'on retrouve notamment dans les concerts. C'est quelque chose de très vivant, de pas statique, et j'ai essayé de recréer ça dans la mesure du possible, même si le livre est bien évidemment une expérience différente, j'ai essayé de créer quelque chose de plus vivant et de plus interactif"."Une autre ambition du salon est trouver un équilibre entre les auteurs que les gens connaissent, lisent déjà, et la découverte. On est vraiment fiers par exemple de mettre en valeur sur la scène Europe des nouvelles voix", se réjouit le directeur du salon en passant devant une belle galerie de portraits photographiés des jeunes auteurs européens à découvrir.
Un programme comme une grille de radio
Pour mettre en œuvre ce chantier, Sébastien Fresneau s'est associé avec Gauthier Morax, responsable de la programmation du salon, lui-même épaulé par une équipe, un programmateur pour chaque scène. "Pour moi, il y a une différence entre un programme, et une programmation. Un programme, c'est une succession de rencontres thématiques, qu'on voit un peu partout, qu'on pourrait voir au salon du livre comme ailleurs, sans qu'il y ait un lien entre elles et surtout qui pour le public n'est qu'une source de proposition possible. Faire une programmation, à mes yeux, c'est essayer de donner un sens, une cohérence, une lisibilité, à la fois sur le fond, mais aussi sur la forme".Résultat : autour d'une grande thématique, suffisamment large pour intéresser la majorité des éditeurs, cette année "La norme et ses limites", il propose une sorte de grille de programmation, comme celle d'une radio, ou d'une télévision, avec des "rendez-vous", des "formats de dialogues différents avec les auteurs". Ces programmes sont proposés chaque jour avec des intervenants ou des thèmes différents.
"Des points de repère"
"C'est une manière de donner des points de repère aux visiteurs. Exemple : tous les jours sur la grande scène, on fait un Grand Entretien, pendant lequel des écrivains aussi divers qu'Orhan Pamuk, que David Diop, que Sarah Chiche, qui vont dialoguer autour de ce que l'on a appelé "la fabrique de l'écriture". Sur la Grande Scène également, des "rencontres improbables", où on pourra retrouver par exemple une rencontre entre le dessinateur de bande dessinée Jul et le philosophe Michel Serres ou bien le Goncourt 2012 Jérôme Ferrari avec l'artiste Natacha Nisic."J'aimerais faire ressembler Livre Paris plus à un festival qu'à un salon", explique Gautier Morax. Chaque scène aura ses rendez-vous, que les visiteurs pourront retrouver sur une grille des programmes, distribuée chaque jour à l'entrée du salon.
Sébastien Fresneau a travaillé pendant quelques années au Japon, "là-bas, le bien-être du client est une priorité absolue. C'est une bonne école. Et nous avons donc travaillé aussi sur ce que l'on appelle l'expérience visiteur", dit-il. Il s'agit autrement dit de donner des outils au visiteur pour vivre de manière plus agréable sa visite. "En gros, avec le plan, les fiches temps fort, et dédicaces, et le plan, le visiteur est paré", résume Sébastien Fresneau.
"Surprendre les visiteurs"
"Programmer un salon du livre, c'est un exercice complexe, parce qu'il faut à la fois tenir compte de la diversité éditoriale, de la diversité des écritures. Et il faut écouter ses propres envies, et aussi celles du public", souligne Gauthier Morax."L'idée est vraiment de trouver un équilibre entre les habitudes, les rendez-vous, et la découverte. On a les grands rendez-vous comme la Dictée, le Prix des lycéens, ou les Petits champions de la lecture, auxquels sont attachés les visiteurs", reconnait Gauthier Morax, "mais l'objectif, c'est de renouveler un tiers du programme, on tient à surprendre les visiteurs", conclut Sébastien Fresneau. "Ma seule frustration, c'est que je ne vois rien du salon. L'année dernière, j'ai réussi à suivre un seul débat du début à la fin !", lâche-t-il, avant de rejoindre ses équipes pour les derniers réglages avant l'inauguration.
Salon Livre Paris
Du 15 au 18 mars
Porte de Versailles à Paris
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