"Qui après nous vivrez", "Les Parias", "L’Araignée"… Sept polars et thrillers incontournables de la rentrée

Hervé Le Corre bouleverse cette rentrée avec "Qui après nous vivrez", livre post-apocalyptique crépusculaire. Arnaldur Indridason et Joseph O’Connor regardent le passé dans les yeux.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Devanture de la libraire "Le Merle moqueur", rue de Bagnolet, à Paris. (MOHAMED BERKANI)

Toute sélection est forcément subjective, celle-ci ne déroge pas à la règle. Le roman noir se porte bien et représente près d’une vente de livres sur quatre. Les thrillers et polars scrutent le présent, mais s’intéressent aussi au passé, comme avec Joseph O’Connor qui revient sur la vie de Hugh O'Flaherty, prêtre irlandais rattaché au Vatican qui a défié les nazis et sauvé plus de 6 000 juifs et soldats alliés en 1943.

"Qui après nous vivrez" d’Hervé Le Corre : le futur n’a pas d’avenir

C’est LE livre à ne pas rater, sous aucun prétexte. Hervé Le Corre sonne le glas dans ce livre crépusculaire. Il siffle avec Qui après nous vivrez (éditions Rivages/Noir) la fin de la récréation, de l’insouciance. L’ancien professeur de lettres acte la fin d’un monde. L’idée de ce livre lui est venue pendant le confinement, avec cette lancinante et angoissante question : demain a-t-il un futur ? Demain n’est pas loin, il se situe à la moitié du XXIe siècle, il arrive dans moins de trente ans. Pourtant, ce futur décomposé ressemble furieusement à un passé lointain où le vernis social craquelle de toutes parts. C’est dans une ambiance post-apocalyptique que se déroule cette dystopie qui met en avant la crise climatique, la fin d’un système politique et économique à bout de souffle, la résurgence des vieux démons, mais aussi un combat pour ne pas désespérer de l’humanité. Dans ce monde sans technologie, Hervé Le Corre nous raconte sur trois générations la naissance d’une utopie. Engagé, féministe, lumineux.

(Qui après nous vivrez, Hervé Le Corre, éditions Rivages/Noir, 21,90 euros)

Couverture du livre "Qui après nous vivrez "d'Hervé Le Corre. (EDITIONS RIVAGES)

"Les Parias" d’Arnaldur Indridason : la retraite lui va si mal

L’auteur islandais a le don de regarder le passé de son pays dans les yeux. Ses personnages sont denses et humains jusqu’au tréfonds de leur méchanceté. Et qui d’autre que Konrad, inspecteur à la retraite, pour sonder ce passé douloureux. Les Parias (éditions Métailié) est un roman noir addictif, un page-turner captivant. L’histoire commence par un fait anodin. Une veuve fait son devoir de citoyenne en amenant à la police un vieux revolver trouvé dans les affaires de son mari décédé. Le revolver s’avère être l’arme d’un crime commis de nombreuses années auparavant. Et c’est ce passé qui intéresse l’inspecteur Konrad, anti-héros par excellence, qui cherche à découvrir l’assassin de son père, tué devant les abattoirs de Reykjavik. Un père au passé sulfureux. Livre après livre, Arnaldur Indridason continue de faire un travail de mémoire remarquable. Les Parias, un roman sans concession.

(Les Parias, Arnaldur Indridason, traduction de l’islandais par Éric Boury, éditions Métailié, 22,50 euros)

Couverture du livre "Les Parias" d’Arnaldur Indridason. (EDITIONS METAILIE)

"La Protégée" de Marlène Charine : la muse du vampire

L’être et le paraître, et entre les deux, une zone grise où chiens et loups sont difficilement discernables. Ainsi, le commandant Theven ne sait pas s’il protège une innocente ou une meurtrière. L’une ou l’autre, ange ou démon ? Qui est Mady, "la muse du vampire" ? Mady laisse sa vie d’avant derrière elle pour se consacrer aux autres. Compagne d’un criminel, elle témoigne contre lui et se retrouve dans un programme de protection des témoins. Une nouvelle vie s’offre à elle. Professeure dans un institut pour enfants en réinsertion sociale ou présentant des troubles cognitifs ou mentaux, elle est intriguée par Abel, un petit garçon autiste. Se noue une relation spéciale, dense. Entretemps, le passé refait surface et exige sa part du présent. Avec une écriture fluide, soutenue, l’écrivaine suisse, et ingénieure en chimie, Marlène Charine s’amuse à perdre le lecteur dans de fausses pistes. Avec La Protégée, elle confirme tout son talent d’écrivaine inspirée.

(La Protégée, Marlène Charine, Calmann-Lévy, 21,50 euros)

Couverture du livre "La Protégée" de Marlène Charine. (EDITIONS CALMANN-LEVY)

"L’Araignée" : Lars Kepler tisse sa toile

Comme un animal pris dans les phares d’une voiture, le lecteur se retrouve happé dès les premières pages. Le dernier livre de Lars Kepler, pseudonyme du couple d’écrivains Alexander et Alexandra Ahndoril, L’Araignée (Actes Sud) est fascinant par son originalité et par son rythme. On retrouve le célèbre duo d’inspecteurs, alter ego des auteurs Joona Linna et Saga Bauer. Cette fois-ci, ils affrontent un tueur en série particulièrement retors qui nargue la police en envoyant une figurine avant chaque disparition. Au total, neuf victimes sont annoncées. Toutes sont proches de l’enquêtrice Saga Bauer. Et Joona Linna est la neuvième cible. La toile, tissée par l’assassin, laisse peu de liberté aux policiers, pris dans une course contre-la-montre mortifère. L’Araignée, un thriller psychologique sombre et haletant.

(L’Araignée, Lars Kepler, traduit du suédois par Mariane Ségol-Samoy, Actes Sud, 24,50 euros)

Couverture du livre "L’Araignée" de Lars Kepler. (EDITIONS ACTES SUD)

"L’Été d’avant" de Lisa Gardner : à la recherche des gens perdus

Que cherche donc désespérément Frankie Elkin ? Que veut-elle prouver, à elle-même et aux autres ? La détective mène deux combats. Elle se bat contre l’alcoolisme, pour ne plus boire une seule goutte d’alcool, et elle lutte pour retrouver des personnes, en particulier quand elles appartiennent à des minorités, ces victimes snobées par les médias et oubliées par la police. Le personnage de Frankie est terriblement attachant. À la lecture de L’Été d’avant (éditions Albin Michel), on imagine déjà une adaptation en une série décapante sur une plateforme. Ancienne alcoolique donc, la quarantaine, séparée, revenue de tout sans être totalement blasée, la détective Frankie Elkin est d’une ténacité à toute épreuve. Quand elle apprend qu’Angelique Badeau, une adolescente haïtienne, a disparu dans un quartier chaud de Boston, elle se lance à sa recherche. Au risque de déranger tout le monde. L’Été d’avant, un thriller psychologique bien rythmé.

(L’Été d’avant, Lisa Gardner, traduit par Cécile Deniard, Albin Michel, 22,90 euros).

Couverture du livre "L’Été d’avant" de Lisa Gardner. (EDITIONS ALBIN MICHEL)

"Dans la maison de mon père" de Joseph O’Connor : le pape, les nazis et le prêtre

Dans la maison de mon père (éditions Rivages) est un exploit littéraire, un livre coup de poing. Tout y est, et nous y sommes, dans Rome sous le joug nazi en 1943. Avec son écriture cinématographique, Joseph O’Connor nous emmène dans un thriller historique fort original. Le livre est inspiré de l'histoire vraie de Hugh O'Flaherty, prêtre irlandais rattaché au Vatican qui a défié les nazis et sauvé plus de 6 000 juifs et soldats alliés de l'enfer romain à deux années de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Dans la maison de mon père n’est pas un livre d’histoire, mais bien une expérience littéraire, avec une narration explosive. C’est aussi un livre sur l’engagement, sur le rôle d’un homme en temps de haine et de mort. L’écrivain irlandais, frère aîné de la chanteuse Sinead O’Connor, livre un roman poignant, une plongée dans les rouages d’une machine à broyer les humains.

(Dans la maison de mon père, Joseph O’Connor, traduit par Carine Chichereau, Rivages, 23,90 euros)

Couverture du livre "Dans la maison de mon père" de Joseph O’Connor. (EDITIONS RIVAGES)

"Disparue à cette adresse" de Linwood Barclay : Qui a tué Brie Mason ?

Linwood Barclay est un formidable narrateur, et un manipulateur extraordinaire qui prend grand plaisir à brouiller les pistes. Avec lui, le lecteur ne s’ennuie jamais. Avec Disparue à cette adresse (éditions Belfond), l’auteur américain vivant au Canada multiplie les rebondissements sans jamais baisser de rythme. Comme dans chaque disparition d’une femme, l’époux est le premier soupçonné. À qui profite le crime ? Brie Manson a disparu sans laisser de traces. L’enquête piétine puis tourne au ralenti. Son époux, Andrew Manson, finit par refaire sa vie et change même d’identité pour laisser le passé derrière lui. Jusqu’à cet appel d’un voisin qui affirme avoir vu Brie devant l’ancien domicile. Elle était restée longuement devant la maison avant de hurler et de s’enfuir. Le passé meurt rarement. Vertigineux.

(Disparue à cette adresse, Linwood Barclay, traduit par Renaud Morin, Belfond, 22,90 euros)

Couverture du livre "Disparue à cette adresse" de Linwood Barclay. (EDITIONS BELFOND)

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