Portrait de Lydie Salvayre, le souffle venu d'Espagne
Née Lydie Arjona en 1948 d'un couple de républicains espagnols exilés dans le sud de la France, Lydie Salvayre est l'un des romanciers français les plus reconnus de sa génération.
Son oeuvre, composée d'une vingtaine de livres, est traduite en une vingtaine de langues. Son écriture se prête très bien à la forme théâtrale et plusieurs de ses livres sont transposés à la scène, comme "Les belles âmes", adapté par Laurence Février en 2000 au Théâtre national de Chaillot. Son quatrième ouvrage, "La compagnie des spectres" (Verticales, 1997), lui avait valu le prix Novembre (aujourd'hui prix Décembre) et avait été élu meilleur livre de l'année par le magazine Lire.
Camp d'Argelès
Lydie Salvayre passe son enfance près de Toulouse. Ses voisins sont aussi des réfugiés espagnols et elle apprend à parler la langue française sur le tard. Puis découvre la littérature au lycée de Toulouse où elle est interne. Dans son livre "La Puissance des mouches", en 1995, elle raconte avec émotion comment ses parents se sont rencontrés: "Dans le camp d'Argelès où ma mère arrive épuisée après quarante jours de marche en Catalogne, sous les bombardements de l'armée de Franco (...) mon père la distingue au milieu de la foule à son air de jeunesse, à ses yeux infinis."
Psychiatrie et écriture
Après son bac, la jeune Lydie obtient une licence de Lettres modernes option littérature espagnole et se destine à l'enseignement. Mais elle découvre la psychanalyse et c'est une révélation. Avec courage, elle entame en 1969 des études de médecine. Elle se marie et exerce plusieurs années comme psychiatre. Elle commence à écrire de petits textes dans des revues littéraires à la fin des années 1970. En 1983, elle quitte son mari et s'installe à Paris, travaille comme psychiatre pour enfants.
Pendant son temps libre, elle écrit un premier roman qu'elle soumet en vain à quelques éditeurs. Remanié, il sort finalement en 1990 chez Julliard sous le titre "La Déclaration". Bien accueilli par la critique, il se vend à quelque 4.000 exemplaires et obtient le Prix Hermès du premier roman. Surtout, il lui ouvre le coeur du fondateur des éditions Verticales, Bernard Wallet, dont elle devient la compagne. En 2008, elle écrira "BW", portrait très intime de son compagnon qui venait de subir une grave intervention aux yeux.
Lydie Salvayre continue de conjuguer écriture et psychiatrie. Elle publie en 1991 un second roman, "La Vie commune". Puis l'éditeur et écrivain Jean-Marc Roberts la fait entrer au Seuil qui publie en 1993 "La Médaille". Suivront de nombreux livres.
Cette grande dame des lettres affectionne aussi les titres clins d'oeil, même si le ton de ses livres est plus grave. Ainsi, elle publie en 1997 "Quelques conseils aux élèves huissiers", puis "Et les vers mangent le boeuf mort" en 2002, "Portrait de l'écrivain en animal domestique" en 2007 ou "Petit traité d'éducation lubrique", en 2008...
Hommage à la mère
"Ma mère a été belle", écrit-elle dans "Pas pleurer", le roman primé par le Goncourt dans lequel elle rend un magnifique hommage à Montse, sa mère, qu'elle adore. "On me dit qu'elle avait autrefois cette prestance très particulière que conférait aux femmes espagnoles le port du cantaro (peigne ouvragé, ndlr) sur la tête et qu'on ne voit plus aujourd'hui qu'aux danseuses", écrit Lydie Salvayre qui a hérité de ce port altier.
"Pas pleurer" est "un très bon livre, émouvant dans la présentation de la mère. La langue maternelle est très bien rendue. Ce mélange de l'intime et de l'histoire est très réussi", salue avec justesse la romancière Camille Laurens, jurée du Femina, qui avait aussi retenu la romancière.
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