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Maltraitance et limites du système : "La maladroite", premier roman bouleversant d'Alexandre Seurat

Premier roman d'Alexandre Seurat, "La maladroite" est le récit d'un martyre, celui d'une enfant maltraitée quotidiennement par ses parents de sa naissance jusqu'à l'âge de 8 ans. Le romancier donne la parole tous les protagonistes de l'affaire, sauf la petite fille et les parents. Glaçant.
Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Alexandre Seurat signe "La maladroite", un premier roman sur la maltraitance et les limites du système
 (Renaud Monfourny)
L'histoire : tout commence avec un avis de recherche. Une petite fille de 8 ans a disparu. Une photo : "gilet blanc à grosse maille, autour du cou un foulard noué au-dessus de sa chemise, une tenue incongrue, d'adulte – pas d'enfant de huit ans – mais surtout, cette manière bizarre de se tenir, les bras étrangement croisés, comme quelqu'un qui se donne une contenance". C'est son institutrice qui parle. Ce jour-là quand elle découvre l'avis de recherche, elle sait que c'est trop tard…

Alexandre Seurat remonte le fil du calvaire. Une mère instable : elle a quitté le père de son premier enfant pour un autre homme, tombe enceinte, projette de l'épouser. Puis tout tourne mal. Elle le quitte, retourne chez sa mère, accouche, abandonne l'enfant. Puis elle retourne avec le père du premier, récupère sa fille. Et c'est le début du cauchemar pour Diana. Les premiers à sentir que quelque chose ne tourne pas rond sont les membres de la famille. La sœur. La grand-mère. Les parents maltraitants les écartent. Puis viendront les instituteurs, les signalements, les déménagements, et le déni constant des parents si "charmants". Jusqu'à l'issue fatale.

La bonne distance

Inspiré d'un fait divers (le décès de la petite Marina en 2009 dans la Sarthe, à la suite des mauvais traitements de ses parents), ce court et dense roman dessine l'enchaînement implacable des faits qui mènent inexorablement à la catastrophe. On voit bien comment chacun des protagonistes essaie de réagir, tente de faire son devoir, est ému par ce qu'il comprend, et pourtant, rien ne se produit. Personne ne réussit à sauver cette enfant. Pourquoi ? Comment ? C'est ce que montre ce roman accablant : la lourdeur d'un système qui met trop de temps à s'ébranler malgré les bonnes volontés, malgré les signalements répétés, malgré les enquêtes.

Le romancier déroule son récit à la bonne distance. Sans pathos. Il dessine le martyre par couches successives, à travers les témoignages des uns et des autres, à la manière d'un dossier d'instruction. Le lecteur sent littéralement l'étau se resserrer, la catastrophe arriver. Ni voyeur, ni accusateur, le premier roman d'Alexandre Seurat tend une main à "La maladroite", cette main qui lui a manqué pendant les huit ans de son existence.

La lecture de ce roman est insupportable. Et indispensable.
 
La maladroite Alexandre Seurat (Le Rouergue – 128 pages – 13,80 euros)

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