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"Les grands cerfs" de Claudie Hunzinger : une ode à la nature et à sa faune

Dans son dernier roman, Claudie Hunzinger raconte la fascination de son personnage pour les grands cerfs peuplant la montagne. 

Article rédigé par Manon Botticelli
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Claudie Hunzinger, artiste et plasticienne française, publie Les grands cerfs pour la rentrée littéraire 2019. (BALTEL/SIPA)

Bibliothèques de cendres, pages d'herbes, romans aux décors montagneux et boisés … la nature est au cœur de l'œuvre de Claudie Hunzinger, romancière et artiste plasticienne. Une règle qui n’échappe pas à son dernier roman, Les grands cerfs (Grasset). L'auteure de L'incandescente revient à un de ses thèmes de prédilection : la montagne et ses secrets. Elle est en lice pour le prix Médicis 2019.


"C'était devenu une obsession. Contempler les cerfs". Pamina et son mari, Nils, habitent aux Hautes-Huttes, un endroit reculé au fin fond de la montagne. La narratrice est fascinée par les cerfs qu'elle entend rôder autour de chez elle : "au début, ce n'était que de légers craquements, d'imperceptibles frôlements, moins que le vent (…) Puis, chaque fois mi-juillet, ni avant ni après, la nuit, de grandes cérémonies guerrières se déroulaient sous la maison".

Contempler les cerfs

Un jour, Léo, photographe et fin connaisseur du clan de cervidés qui s'est installé aux Hautes-Huttes, demande au couple la permission de construire un affût aux abords de leur maison. Il va initier Pamina aux secrets des grands cerfs. Wow, Geronimo, Merlin … La narratrice va apprendre à connaître ces animaux sauvages et mystérieux. Observer les cerfs devient son quotidien : "ce rituel, je le devinais, n'était pas tant pour contempler un cerf que pour m'extraire avant tout de moi-même". Avec les créatures secrètes qui la peuplent, la forêt décrite par la plume riche de Claudie Hunzinger se pare de magie.

Dans ce récit à la première personne, la narratrice nous prend par la main, jusqu'à ce que les cerfs qu’elle côtoie nous deviennent familiers. Mais elle n’est pas la seule à s'intéresser à ces animaux : les chasseurs les traquent et les "tirent" un à un. Pamina voit avec effroi le clan s'amoindrir. Le récit prend alors une dimension politique. Car cette disparition suit celle du reste de la faune, un écosystème que la narratrice voit s'éteindre peu à peu. "Il me semblait entendre s’élever de la terre un immense Office des morts. Que personne n’entendait". Ode à la nature, à sa fragilité et à son pouvoir, Les grands cerfs est un roman contemplatif et poétique où la vie animale revêt une aura mystique.

Les grands cerfs, Claudie Hunzinger.  (GRASSET)

Les grands cerfs, Claudie Hunzinger (Grasset - 192 pages - 17 €)

Extrait

"J'aurais aimé approcher leurs présences, connaître leurs pensées, pénétrer leur méditations, dormir dans leurs yeux, écouter dans leurs oreilles, me glisser dans leur mufle, être leur salive verdie du suc des herbes, frémir sous leur pelage, bondir dans leurs muscles, m'enfoncer profondément dans leurs sabots, dans leurs fonds d'expérience, parcourir le temps qui existe et le temps qui n'existe pas, nager dans les vapeurs qui montent des prairies ou dans celles qui montent des grottes, cinq cerfs nageant dans la brume aux parois de Lascaux, porter le poids de leur couronne, connaître une seconde, une seule, leur souveraineté, la mêler aux branches des forêts traversées, ne plus savoir si je suis cerf ou forêt traversées, ne plus savoir si je suis cerf ou forêt en train de nager, de bondir. D'exister."

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