Cet article date de plus de neuf ans.

Colombe Schneck, si peu sérieuse à "Dix-sept ans"

Colombe Schneck a déjà raconté son enfance dorée et ses parents qui la chérissaient. Elle livre ici un épisode inédit : celui de son avortement à dix-sept ans, à un mois du bac. Ni banal ni dramatique : mais jamais oublié. En librairie le mercredi 7 janvier.
Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
L'écrivain Colombe Schneck
 (JF Paga pour Grassey)

Faut-il encore seriner Rimbaud, "on n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans" ?  Plus que jamais. Ni à Charleville-Mézière, ni à Paris. Ni quand on est garçon ni quand on devient femme.

Elle y a pensé, bien sûr, l'écrivain et journaliste Colombe Schneck, en intitulant son dernier livre "Dix-sept ans". Le récit court, dense et sobre, de son avortement, à un mois du bac. Il y a trente ans.

Vivre sans contrainte

Paris, 1984. La narratrice est en terminale, à la très chic Ecole Alsacienne, temple des élites décontractées de la rive gauche. Elle décide de se débarrasser de cette virginité qui la gêne, avec un garçon de la classe. En fille libre, elle fuit toute contrainte. Fût-ce celle de prendre quotidiennement sa pilule (notons que le garçon ne semble pas davantage s'astreindre à quoi que ce soit).

La vie est belle, jusqu'au jour où l'adolescente s'aperçoit avec horreur qu'elle n'a pas eu ses règles depuis des semaines. Le bac approche. S'encombrer d'un bébé quand l'avenir vous sourit, que New York vous tend les bras, qu'on rêve de devenir journaliste, écrivain, présentatrice du 20 heures ? Pas question.

L'après-Annie Ernaux

Ce sera l'IVG, naturellement. Rien à voir avec l'avortement clandestin vécu, dix-sept ans plus tôt, en 1967, année de la naissance de Colombe Schneck, par Annie Ernaux, à qui elle se réfère. Dans "L'événement", Annie Ernaux a en effet raconté crûment les scènes de boucherie, la violence subie par les femmes jusqu'à l'hôpital. On rajoutait de la souffrance à la souffrance après un avortement devenu hémorragie, les soignant sans anesthésie pour les punir dans leur chair.

Pas de ça ici : le fœtus est aspiré au cours d'une opération propre, dans une clinique confortable. Sans culpabilité ni culpabilisation : la loi Veil a autorisé l'avortement, en 1974. Mais de temps à autre, dit-elle, elle y repense. Cet enfant là aurait maintenant trente ans.

Une sexualité qui se pensait libre

Le ton sonne juste. Les lecteurs-trices de Colombe Schneck y reconnaîtront les signes de reconnaissance des beaux quartiers parisiens, à l'aube des années 80. Les T-shirts Agnès B, les vacances dans le Lubéron, une sexualité qui se pensait libre, avant l'arrivée des années SIDA. Jusqu'au moment où la narratrice se découvre enceinte : "Ce que je suis, une fille et pas un garçon, me rattrape". Libre, mais pas autant qu'elle l'aurait cru. L'égalité des sexes serait-elle un mensonge ?

L'insouciance collait à l'époque, à son âge. Sans gravité, sans conséquence, l'épisode -inoublié- marque son entrée dans la vie adulte. Ecrit en phrases courtes, sans fioritures, le livre est à coller dans des mains de 17 ans. Un peu de littérature n'empêchera pas leur coeur fou de robinsonner.

Dix sept ans Colombe Schneck (Grasset - 91 pages -10 euros)

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.