"Riviera" le premier roman de Mathilde Janin, croqueuse de rock
Au fil de ce premier roman, « Riviera », on découvre une écriture toute musicale, rythmée, syncopée, pleine de heurts et de malheurs, de petits bonheurs et de sueurs d’un duo infernal Nadia et Philippe. Elle, directrice de label musical et lui, artiste de rock indépendant. Leurs chemins sont complexes, irréguliers, amoureux et pas toujours clairs.
A l’instar d’un « Sailor et Lula », les états d'âmes de cette émigrée juive d’Europe de l’est à New York et de cet artiste varient au fil des années 80. Du New York des clubs de Bowery où l’on croise un Keith Harring ou la bande d’un Warhol, aux scènes parisiennes à la fin de la décennie évoquée, Mathilde Janin nous embarque dans cette dérive d’un continent à l’autre sur fond d’une pandémie. Le virus de souche Ebola envenime le climat des voyages des Etats-Unis vers le continent européen.
La dérive de cet îlot-duo d’un couple auquel vient se joindre Frédérique, la sœur de Philippe est livrée par fragments. La blonde, la brune face à l’artiste. Le récit change de narrateur selon les chapitres sans crier gare. Comme les morceaux d’un album rock, ils créent les ruptures par leurs alternances d’atmosphère. Une instabilité du couple illustrée par l’instabilité de l’histoire, ou plutôt par le manque de fiabilité des narrateurs.
Quelles sont leurs vérités, quelles sont les légendes qu’ils s’inventent par posture, par recherche d’un mythe éphémère tout ce qu’il y a de plus rock ? Seules certitudes, Nadia, Philippe et Frédérique, trio d’excès de jeunesse, d’amours, d’alcool et surtout de musique fuient une pandémie aux Etats Unis en se rendant à Paris. Philippe est retrouvé mort à Berlin en 1992 ce qui rapprochera la sœur et la veuve. Nadia et Frédérique deviennent une sorte de « Thelma et Louise ». Et puis le chemin les mènera sur l’île d’Europe de l’est source de vie et de déchirure pour Nadia, la comète blonde.
Une philosophie de la musique
Et voilà ces fragments d’histoires et ces moments de vie qui prennent sens comme à la fin de l’écoute d’un album rock des années 80. Tous les morceaux n’ont pas forcément été bien vécus à la première écoute. Mais à l’instar d’un album-concept, l’atmosphère générale laisse une trace dans les esprits. Plus qu’une histoire sexe, drogue et rock’n roll, c’est une philosophie de la musique que propose en coda la critique musicale Mathilde Janin : « la vérité, c’est que la musique quelle qu’elle soit est une expérience de l’instant. C’est pourquoi en tant que mouvement, elle est vouée à l’échec. » Ce n’est pas le cas de ce roman.
"Riviera" de Mathilde Janin (éditions Actes Sud)
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