Le Guide du Routard, 40 ans et toujours fringant
40 millions d’exemplaires vendus dans le monde, 150 titres et un style unique, le Routard est né au début des années 70, en pleine révolution beatnik. En 1972, son fondateur, Philippe Gloaguen revient d'un voyage en Inde avec le premier guide du routard, 22 pays dans un volume. Les éditeurs n'en veulent pas, il essuie 19 refus. "Comment voulez-vous qu'on publie votre "Guide du routier" à côté des Mémoires du général de Gaulle ?", lui dit-on chez Plon. Un petit éditeur finit par l'accepter. Le guide est encensé par la presse, de gauche comme de droite. L'aventure commence.
Le Routard a fait son chemin
En 1975, Hachette se lance dans l'aventure et publie quatre volumes dont la couverture est dessinée par Solé. En 1980, la collection compte 10 titres 100 000 exemplaires vendus. Dans les années 80, le guide s'exporte : Etats-Unis, Espagne, Allemagne de l'Ouest. Le guide du routard devient une institution, tout en continuant à défendre une certaine idée du voyage, faite de liberté et de curiosité, mâtinées d'humanisme.
Dans les années 90, c'est l'explosion, plus d'un million de ventes par an, une équipe qui s'étoffe, des locaux qui s'agrandissent, une géographie qui s'élargit : de la Normandie à la Malaisie, en passant par le Chili ou l'Allemagne, peu de terra incognita pour le routard… C'est aussi la période où le routard s'engage, contre le racisme, pour l'écologie, lutte contre le SIDA... Pendant la guerre en Bosnie, la rédaction offre même 10 000 guides du Routard Yougoslavie aux Casques Bleus !
L'Empire du Routard
Le Routard devient une marque déposée et les produits dérivés voient le jour : une compil, un jeu de société, un couteau Lagnole, une Kangoo Routard, la valise "Trailer max" le sac à dos "Boarder", le bob Sao Paulo, la sandalette Bonanza et les chaussures de marche Lhassa. Le Routard a même son polar, dont le héros, Edmond Benakem, est un beur breton et les bonnes adresses françaises du guide sont vendues sous forme de bases de données à Orange, Bouygues et SFR.
Philippe Gloaguen règne sur un filon bien exploité. Il est le seul et unique auteur officiel des guides, et donc bénéficiaire des droits qui en découlent (3 millions d'euros par an, selon le magazine Lire). Il perçoit aussi les royalties des produits dérivés estampillés Guide du routard. Selon le magazine Lire, "l'ancien baba cool, qui avait débuté dans une chambre de bonne du XVIIe arrondissement, investit désormais massivement dans l'immobilier à Paris et aux Antilles, roule en Saab décapotable, passe ses vacances sur l'île de Ré." Le fondateur du Routard se défend "le Routard emploie 17 salariés permanents et 80 pigistes payés entre 110 et 155 euros par jour, plus note de frais, ce qui est plutôt au-dessus du marché".
Philippe Gloaguen veille jalousement sur son domaine : il a dernièrement attaqué Gallimard en justice, accusant la maison d'édition de plagiat de ses "Géo-Guides". Il exigeait 12 % sur les droits des volumes vendus depuis leur sortie. Il a été débouté mais fait appel de la décision de justice.
Le Routard virtuel
Le guide du Routard a fait sa révolution numérique : il a développé ses applications pour Smartphones et son site, routard.com se présente comme le premier site francophone dédié au voyage, avec 2,3 millions de visiteurs uniques par mois. Alors, vieux routard le guide? A 40 ans, ce guide est devenu une institution et un modèle de marketing éditorial, s'éloignant sans doute un peu des grandes idées de sa jeunesse, qui ont prévalu à sa naissance, mais il n'a en tous cas rien perdu de sa vigueur.
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