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Le Goncourt, le plus convoité des prix littéraires francophones

Les relations compliquées entre l'Occident et l'Orient sont au cœur des romans des quatre écrivains en lice pour recevoir mardi à la mi-journée le plus prestigieux des prix littéraires du monde francophone : le Goncourt.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Les quatre derniers finalistes du Goncourt Kaddour, Nathan, Enard et Azoulay 
 (Joel Saget / AFP)

Le nom du successeur de Lydie Salvayre ("Pas pleurer", Seuil) sera annoncé vers 12H45 au restaurant Drouant à Paris devant la presse internationale, une cérémonie qui donne traditionnellement lieu à de bruyantes bousculades. À peine le Goncourt  2015 proclamé, ce sera au tour du lauréat du Renaudot d'être désigné au même endroit. Les quatre finalistes du Goncourt, dévoilés le 27 octobre au musée du Bardo à Tunis, sont Hédi Kaddour et son roman "Les prépondérants" (Gallimard), Mathias Enard, auteur de "Boussole" (Actes Sud), Tobie Nathan pour "Ce pays qui te ressemble" (Stock) et Nathalie Azoulai, la seule femme du groupe, avec "Titus n'aimait pas Bérénice" (POL).

"Une histoire, une écriture, une ambition"

Pour mériter le Goncourt, il faut "une histoire, une écriture, une ambition", a résumé Bernard Pivot, président de l'Académie Goncourt, sur France Inter. Le lauréat du Goncourt  recevra un chèque de... 10 euros. Mais l'enjeu est ailleurs. Un roman estampillé Prix Goncourt se vend en moyenne à environ 400.000 exemplaires, le Renaudot à un peu moins de 200.000. Toutes les œuvres en lice cette année pour le Goncourt  ont l'Orient en commun. Racine lui-même, au cœur du roman de Nathalie Azoulai, a pris son inspiration en Orient pour sa pièce Bérénice, "reine de Palestine", a rappelé Philippe Claudel, un des dix membres du jury.
 
Bernard Pivot, président de l'académie Goncourt, en mai 2015 à Paris
 (Thomas Samson / AFP)
Au jeu des pronostics, neuf des 16 critiques interrogés vendredi par l'hebdomadaire spécialisé Livres Hebdo s'attendaient à voir Hédi Kaddour récompensé. Chronique d'un monde en train de sombrer, son roman "Les prépondérants" est une fresque implacable d'une société coloniale figée dans les années 1920 en Afrique du Nord. Ce livre figure également dans la sélection du Femina (attribué mercredi) et du Médicis (décerné jeudi).
 
Le principal handicap de Kaddour est d'avoir déjà été récompensé il y a quelques jours par les Immortels. Jusqu'à présent, seuls deux écrivains ont reçu la même année le prix de l'Académie française et le Goncourt, le dernier en date étant Jonathan Littell en 2006 pour "Les bienveillantes". Cela pourrait favoriser Mathias Enard, 43 ans, dont 7 des 16 critiques interrogés par Livres Hebdo affirment qu'il "mérite" le prix. En septembre, Mathias Enard a reçu celui des libraires de Nancy-Le Point. Or, depuis 2013, les lauréats du prix de Nancy ont été récompensés ensuite par le Goncourt.

Un jury qui aime surprendre

Roman ambitieux, "Boussole" entend réhabiliter l'Orient, face aux clichés de l'Occident. Le livre, enfiévré, tient parfois du poème. Les références culturelles innombrables font aussi parfois pencher "Boussole" vers l'essai érudit. Cette complexité est le bémol qui pourrait empêcher Enard de décrocher le Goncourt, seul prix pour lequel il a été sélectionné.
 
Cela va-t-il ouvrir un boulevard pour les outsiders Nathalie Azoulai et Tobie Nathan? On sait que le jury du Goncourt aime surprendre. L'an dernier, tout le monde attendait l'Algérien Kamel Daoud et ce fut Lydie Salvayre. Avec son roman sur l'Egypte de son enfance et la communauté juive du Caire, l'ethnopsychiatre Tobie Nathan, 66 ans, livre un roman puissant qui possède toutes les qualités romanesques pour séduire un large public: soubresauts de l'Histoire, personnages attachants, amour contrarié...
 
Savant sans être pesant, le roman de Nathalie Azoulai, 49 ans, est une histoire d'amour déçu d'aujourd'hui, à l'ombre du grand Racine. Servi par une écriture sobre et limpide, ce livre est lumineux. Outre le Goncourt, il figure d'ailleurs également dans les sélections du Femina et du Médicis. Depuis 1975, le Goncourt  n'a couronné que six femmes, dont Lydie Salvayre l'an dernier.
 

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