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"Végétal - L’École de la beauté" aux Beaux-Arts de Paris : le regard de l'homme sur la nature au travers d'œuvres d'art et de joaillerie

Pour cette exposition d'une très grande richesse, 70 musées, fondations, galeries et collectionneurs privés ont prêté des œuvres.  

Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Gouache de Barbara Regina Dietzsch (1706 - 1783)  : tulipe avec papillon et hanneton. Hamburger Kunsthalle (BPK, Berlin Dist. RMN/Grand Palais. Christoph Irrgang)

L’exposition Végétal - L’École de la beauté célèbre le caractère intemporel du végétal en invitant à regarder la nature à travers le prisme de l’art et de la beauté. Le commissaire d'exposition Marc Jeanson montre le regard de l'homme sur la nature à travers des oeuvres d'art et de la joaillerie. Et certaines oeuvres sont bluffantes de réalisme !

400 oeuvres pour observer la nature 

Initiatrice du projet, la maison Chaumet a puisé dans son patrimoine pour faire résonner son identité naturaliste et son regard botaniste avec toutes les formes artistiques qui se sont penchées sur le végétal. Ici, 400 oeuvres offrent une flânerie à travers 7 000 ans de dialogue entre peintures, dessins, gouachés, sculptures, textiles, photographies, mobilier et quatre vingt objets joailliers de Chaumet et d’autres maisons. Une profusion incroyable d'oeuvres et d'interprétations de l'univers du végétal.

Soixante dix musées, fondations, galeries et collectionneurs privés ont prêté des œuvres dont la provenance est raisonnée avec 81,6 % des pièces rassemblées provenant de France et 12,69 % d’Europe. 

Des créations joaillières dans l'exposition "Végétal - L’École de la beauté" aux Beaux-Arts de Paris (JEAN-LUC PERREARD)

Tourner les pages d'un herbier géant fabuleux

Le commissaire d’exposition, le botaniste Marc Jeanson, ancien
responsable de l’Herbier du Muséum national d’histoire naturelle de Paris, aujourd’hui directeur botanique du Jardin Majorelle de Marrakech, a imaginé l'exposition comme un herbier composé à partir des espèces présentes dans les créations de la maison Chaumet. 

Ces créations joaillières croisent sur le parcours des oeuvres de Delacroix, Fantin-Latour, Gustave Caillebotte, Claude Monet, Gustave Courbet, Émile Gallé, Odilon Redon, Otto Dix…en passant par les photographies de Brassaï, Dora Maar, Mapplethorpe. L'occasion de redécouvrir de grandes figures féminines comme Joséphine qui y tient une place à part. Fidèle de la maison Chaumet depuis 1805, la souveraine, passionnée de sciences naturelles, était reconnue pour l’impulsion novatrice qu’elle a insufflée à la botanique et à l’horticulture. Au fil de la déambulation, le regard se perd dans la forêt en carton d’Eva Jospin tandis que l'oreille capte le design sonore imaginé par Laurence Equilbey, sans imaginer un seul instant que cette pluie qui tombe avec force est le fruit d'une installation artistique.

Affranchie de toute chronologie, l’exposition est une déambulation libre : les plantes présentées sont regroupées au sein du paysage dans lesquels
elles vivent : la grotte, la forêt, l’estran, la roselière, l’ager, l’hortus, mille-fleurs…Ces sept décors naturels constituants les sept chapitres du parcours, dans les salles Foch et Melpomène des Beaux-Arts de Paris.

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Le regard scientifique du botaniste croise celui de l'artiste

Au rez-de-chaussée, l'oeuvre en carton de l'artiste Eva Jospin qui nous accueille donne le ton : le parcours débute dans "La Forêt" où chêne, cèdre, noisetier, laurier, mais aussi lierre, houx, gui et fougère sont à l'honneur. Dans cette salle, les pièces joaillières Chaumet sont nombreuses dont un maillechort (ndlr : une maquette) d'un diadème lierre de 1890 (avec gouache et vernis) ainsi qu'une broche feuilles de houx également de 1890 en or, argent, perles fines et diamants. Ces deux pièces délicates semblent réelles tant leur représentation est proche des végétaux trouvés dans la nature.

Joseph Chaumet : broche feuilles de houx. Vers 1890. Or, argent, perles fines, diamants Paris, collections Chaumet (Nils Herrmann – Chaumet)

Dans la section suivante, "L'estran" (ndlr :partie du littoral située entre les limites extrêmes des plus hautes et des plus basses marées), les algues voisinent avec les coquillages et les perles qui sont autant de sources d'inspiration. Un magnifique collier bayadère en semences de perles fines de Chaumet côtoie les superbes cyanotypes (ndlr : technique photographique manuelle activée par la lumière du soleil et révélée par l'eau) de la botaniste anglaise Anna Atkins représentant des algues.

Mention spéciale pour un intéressant album de plantes marines qui contient aussi des échantillons de tissus d'Augustin Balleydier de Helle.

Anna Atkins, Photographs of British Algae : Fucus vesiculosus, 1841-1853. Cyanotype sur papierParis, Muséum national d’Histoire naturelle (Muséum national d’Histoire naturelle)

Dans le paysage suivant, "La roselière", les roseaux et les fleurs de nénuphars sont à l'honneur. On s'arrêtera devant un dessin étude documentaire de têtes d’oiseaux de Jules Fossin datant de 1840 qui retient notre attention par sa délicatesse tout comme cette planche de fleurs de nymphéas. Elles étaient piquées dans la momie de Ramsès II, sous les bandelettes, et ont traversé le temps. Chaumet a lancé un appel à souscription pour leur restauration.

La nature domestiquée 

A l'étage, on découvre la nature domestiquée avec les céréales comme le blé mais aussi des carottes sauvages, des chardons, des trèfles que l'on trouve le long des champs, ainsi que les plantes du jardin potager. L'incroyable diadème aux épis de blé de Nitot (1811) est mis en regard d'un tailleur du couturier Yves Saint Laurent brodé de blé d'or tandis qu'un peu plus loin, c'est une robe Dior ornée de son muguet fétiche que l'on découvre.

Dans une vitrine une robe Dior roéne de son muguet fétiche ans l'exposition "Végétal - L’École de la beauté" aux Beaux-Arts de Paris (JEAN-LUC PERREARD)

La salle regroupe encore d'autres espèces - rose, églantine, orchidée, lys, muguet, passiflore, jacinthe, lilas, pivoine… - que de nombreux peintres ont représenté. L’abeille et le colibri, eux, sont capturés en broches. Un tableau d'une huile sur toile de Bartolomeo Bimbi, Garofani giganti (deux œillets dans un cadre sculpté doré de Vittorio Crosten) capte l'attention par son intensité.

Bartolomeo Bimbi, Garofani giganti : deux oeillets dans un cadre de Vittorio Crosten, 1699. Huile sur toile, avec cadre sculpté et doré Poggio a Caino  (Museo della Natura Morta. Su concessione del Ministero della Cultura -Direzione regionale Musei della Toscana – Firenze)

La dernière salle "Mille-fleurs" présente, entre autres, deux toiles de Giuseppe Archimboldo, Le Printemps et L’Été. Dans cette exposition, ce sont les seuls exemples de peintures présentant une figure humaine. La Tapisserie aux milles fleurs du XVIe siècle, qui conclut l’exposition, bénéficie d’une restauration de ses bordures ; la maison Chaumet assurant la restauration d’une trentaine d’oeuvres.

Deux oeuvres de Giuseppe Arcimboldo dans l'exposition "Végétal - L’École de la beauté" aux Beaux-Arts de Paris (JEAN-LUC PERREARD)

Exposition Végétal - L’École de la beauté jusqu'au 4 septembre 2022. Palais des Beaux-Arts. 13, quai Malaquais. 75006 Paris. Du mercredi au dimanche de 12 heures à 20 heures sur réservation sur www.chaumet.com.

Affiche de l'exposition "Végétal – L’École de la beauté" jusqu'au 4 septembre 2022 au Palais des Beaux-Arts. 13, quai Malaquais. 75006 Paris (Exposition "Végétal – L’École de la beauté")

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