"The Secret Man" : Mark Felt - Gorge Profonde, pionnier des lanceurs d'alertes
"Personne n'arrête le FBI. Pas même le FBI". Tant d'années passées au côté du sulfureux J. Edgar Hoover, n'ont pas ébranlé les convictions et les valeurs de Mark Felt, numéro deux de l'agence fédérale américaine. Et lorsque son insubmersible patron finit par s'éteindre après avoir servi (et fait trembler) huit présidents, la zone de turbulence qui s'annonce va permettre de jauger sa capacité de résistance.
C'est d'abord l'arrivée d'un nouveau boss, bien moins étanche que Hoover aux pressions de la Maison Blanche. Puis, très vite, ce petit dossier qui va devenir énorme, jusqu'à pousser à la démission un président. Le Watergate. Du nom de cet immeuble dans lequel sont arrêtés des cambrioleurs occupés à fouiller les locaux du Parti Démocrate. Nous sommes en 1972 et personne n'imagine encore les proportions que va prendre l'affaire.
Mais qui informe le Post ?
C'est la presse qui va souffler sur la minuscule braise : qui sont ces malfrats ? Pour qui travaillaient-ils ? Ne seraient-ils pas d'anciens employés de la Maison Blanche ? Le "Washington Post" distille ses révélations, de plus en plus embarrassantes pour le pouvoir du Républicain Nixon. Mais qui est la source ? Qui informe le "Post" ? On ne le saura que bien des années plus tard, c'est Mark Felt, ce haut dirigeant aussi élégant qu'intransigeant, qui va changer le destin politique de l'Amérique.Gorge Profonde, c'était donc lui. Pourquoi ce moine-soldat a-t-il choisi de livrer les secrets de son administration, lui qui jusque-là s'était révélé une tombe ? Sans doute parce qu'il considère que sa maison et son pays sont en danger. On le soupçonne mais on le craint au moins autant. Le cabinet de Richard Nixon a de gros doutes sur sa loyauté mais n'ose pas l'attaquer frontalement, inquiet des secrets que pourraient contenir les dossiers amassés par Hoover, susceptibles de mettre un terme à la carrière de n'importe quel homme politique américain.
Froid et feutré
Cette période exceptionnelle, Peter Landesman choisit de nous la faire vivre à l'intérieur même du FBI. Thriller politique et biopic, son film est délibérément froid et feutré, mais les tensions sont maximales. L'étau se resserre autour de Felt (extraordinaire Liam Neeson, impeccable de sobriété et de détermination glacée), pionnier des lanceurs d'alerte, mais il ne cède pas. Animal à sang froid, il se voit en bouclier contre la reprise en main de l'administration Nixon.Anti-héros absolu (il mettra trente ans à reconnaître formellement qu'il était bien "Gorge Profonde" et a toujours mal vécu cette trahison nécessaire), Felt mène une autre vie et un autre défi dès qu'il quitte son bureau : affronter chaque soir une épouse alcoolisée et dépressive, et retrouver sa fille disparue dans des communautés baba-cools.
"The Secret Man" tient sa trajectoire, sans effets ni scènes spectaculaires. On ne décroche pas un instant, le film est parfaitement mené, porté par un comédien fait pour le rôle.
La fiche
Biopic américain de Peter Landesman – avec Liam Neeson, Diane Lane, Marton Csokas et Tony Goldwyn – Durée : 1h43 – Sortie : 1er novembre 2017
Synopsis : Agent spécial devenu numéro deux du FBI, Mark Felt enquête sur une affaire qui pourrait coûter son poste au Président des Etats-Unis. La Maison Blanche et le directeur des services secrets cherchent à enterrer l’enquête. Mark Felt, malgré les pressions énormes du pouvoir, choisit de poursuivre son investigation pour faire éclater la vérité.
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