"La Femme du 5ème" : le bal des schizos
Tom Ricks, romancier américain, la quarantaine, vient à Paris dans l’espoir de renouer avec sa fille. Mais rien ne se passe comme prévu : démuni, logé dans un hôtel miteux, il se retrouve contraint de travailler comme gardien de nuit. Alors qu’il croit toucher le fond, Margit, sensuelle et mystérieuse, fait irruption dans sa vie. Leur relation passionnée déclenche une série d’évènements inexplicables, comme si une force obscure prenait le contrôle de sa vie.
Schizo blues
La maladie et le handicap s’invitent régulièrement dans les films sous des formes très diverses et constituent actuellement un sujet majeur (« La Guerre est déclarée », « Intouchable », « Contagion », « Toutes nos envies »…) La maladie mentale est sans doute plus rare. Mais l’on se souvient de « Rain Man », « Le 8e jour » ou « L’Humanité ». « La Femme du Ve » de Samir Guesmi traite de la schizophrénie, sujet déjà abordé par David Cronenberg dans « Spider ». Leurs deux approches sont très différentes, Guesni s’avérant plus sobre, mais non moins pertinent en parvenant à visualiser et transmettre le caractère pernicieux de la maladie.
Trouble de la perception du réel et de son vécu, la schizophrénie de Tim Ricks, qu’interprète Ethan Hawke, n’est jamais nommée et semble totalement intériorisée, comme nombre de schizophrènes la vivent autour de nous en étant parfaitement insérés dans la société.
Fantômes
La pertinence de « La Femme du Ve » relève pour beaucoup de cette dimension qui progressivement s’altère jusqu’à une révélation qui fait flirter le film avec le fantastique. Tim Ricks, écrivain américain, auteur d’un premier succès, se marginalise une fois arrivé en France, suite à ce qu’il dit être le vol de ses bagages. Le rejet de son ex-épouse dont la véhémence reste énigmatique est un premier indice, son petit boulot de veilleur de nuit pour un groupuscule qui semble à la limite de la légalité, en est un deuxième, sa rencontre avec une femme étrange (Kristin Scott-Thomas) va s’en avérer la quintessence.
Samir Guesmi insuffle beaucoup d’atmosphères à son filmage, percevant un Paris qui pourrait être aussi qualifié de schizo, dans la cohabitation d’un univers interlope (l’hôtel minable où loge Tim) avec l’élite intellectuelle que fréquente l’écrivain dans les beaux quartiers. Le cinéaste joue souvent du manque de profondeur de champ, les arrière-plans restant dans un flou indistinct où semble stagner un autre monde, latent. Une forme non ostentatoire mais qui recoupe le sujet.
Beaucoup de charme émane de cette « Femme du Ve » qui prend le temps de se raconter sur une durée courte (1h25) avec une subtilité constante et plus d’un fantôme qui viennent à notre rencontre.
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