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"Phantom Boy", un dessin animé ambitieux, entre polar et poésie

Tous les ingrédients du succès sont réunis dans ce dessin animé "à l’ancienne", entièrement fait à la main et réalisé par Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli, les auteurs oscarisés d’"Une envie de chat", en 2012.
Article rédigé par franceinfo - Camille Boudin
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
"Phantom Boy" de Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli programmé au festival d'animation de Pontarlier (25)
 (Diaphana Distribution)

D’abord, "Phantom Boy" est très bien servi par le jeune héros de son intrigue policière, Léo, 11 ans. Léo est un petit bonhomme génial, mais hélas, malade, très malade. Forcément, la situation est émouvante : c’est terrible ce si jeune garçon cloué sur son lit d’hôpital, aux prises avec le cancer. On a envie, d’emblée, de s’attacher à lui, de le suivre, de l’accompagner.

Car Léo a le super pouvoir de sortir de son corps, d’où le titre du film : l’enfant peut se dédoubler, et si son enveloppe physique reste assise, les yeux fermés, dans le fauteuil qui meuble sa chambre aseptisée, son esprit, lui, s’envole, et vole, au dessus des buildings de New York, léger comme l’air, fluide comme le vent, libéré de tout. Seule contrainte : il doit réintégrer son "lui" charnel dans un certain délai, s’il ne veut pas définitivement disparaître.


Ce pouvoir, lui permet de venir en aide à son nouvel ami Alex, policier de son état, très maladroit, un peu le Pierre Richard du commissariat : des intuitions redoutables, mais une maladresse chronique qui anéantit tout espoir de crédibilité auprès de ses collègues. Résultat : le jeune flic trentenaire trouve souvent la clé de nombreuses enquêtes bien avant les autres, mais il finit toujours par se fourrer dans des situations inextricables, et plus personne ne veut le croire. Bref, à la suite d’un énième imbroglio policier, Alex se retrouve avec une jambe cassée, et rencontre Léo à l’hôpital, où vient régulièrement le voir son amie journaliste, Mary.

Le trio devient vite inséparable, et grâce à son don d’ubiquité, Léo accompagne Mary dans l’enquête qui va la confronter à un terrible gangster, "L’homme au visage cassé". Ce dernier réclame 1 milliard de dollars sous peine d’anéantir New York grâce à nouveau un virus informatique capable de débrancher – littéralement - la ville, en quelques secondes.
  (Diaphana Distribution)

Le héros, donc, atout majeur du film. Ensuite, il y a le casting haut de gamme des voix françaises, avec Edouard Baer pour incarner Alex, Audrey Tautou pour interpréter Mary, et le fantastique Jean-Pierre Marielle dans la peau de l’homme au visage cassé. Et puis, tout de même, c’est une œuvre d’animation entièrement fabriquée en France, du scénario à la réalisation, du montage au mixage, de la musique aux décors et des studios à la production. Des heures et des heures de travail, avec des animateurs qui, patiemment, on d’abord tout dessiné à la main, sur du papier, avant le recours final indispensable à l’outil informatique. Cela force l’admiration, et mérite un vrai coup de chapeau. Pour finir, l’intention est belle : parler aux petits et aux ados de la maladie, de l’imaginaire, de la liberté, du bien, du mal, et leur faire découvrir la Grosse Pomme de manière spectaculaire, comme un pont (le mythique Brooklyn Bridge) entre deux rives, celle de l’imaginaire et celle du réalisme.
  (Diaphana Distribution)

Ce dessin animé est l’exemple parfait du "septième art bis" que revendiquent la centaine d’artistes et de techniciens du studio Folimage ("La Prophétie des Grenouilles", "Mia et le Migou", "Une Vie de Chat", "Tante Hilda"), pour lesquels l’artisanat et le savoir faire traditionnel restent les garants d’un cinéma anticonsumériste ; ce petit bijou graphique, pour ses qualités intrinsèques et une belle intention, mérite un accueil très favorable. Seuls petits bémols : des références à Marvel et aux Super Héros d’un Manhattan vintage, tellement présentes qu’elles en deviennent imposantes ; une intrigue au genre peu renouvelé, calquée sur les scénarii classiques de films de gangsters. Un peu fatiguant aussi, ce trait de crayon des dessinateurs, laissé volontairement visible à l’écran et qui crée, avec le montage image par image, une sorte de "flou" permanent, comme un effet stroboscopique entêtant. La musique symphonique enfin, aux accents frôlant parfois la grandiloquence, ne nous a pas convaincus. Mais au final, "Phantom Boy" a une âme. Et c’est bien ce qui compte. 


Dessin animé franco-belge d'Alain Gagnol et  Jean-Loup Felicioli - avec les voix d'Edouard Baer, Jean-Pierre Marielle, Audrey Tautou et Jacky Berroyer - Durée : 1h24 - Sortie : 14 octobre 2015

Synopsis : Leo, 11 ans, possède un pouvoir extraordinaire. Avec Alex, un policier, il se lance à la poursuite d'un vilain gangster qui veut s'emparer de New York à l'aide d'un virus informatique. À eux deux, ils ont 24 heures pour sauver la ville…


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