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"La fille au bracelet" : Stéphane Demoustier nous met dans la peau d'un juré d'assises

Avec ce second long-métrage, Stéphane Demoustier réussit le pari du "film procès", en nous questionnant sur les mystères de l'adolescence, sur la justice et sur la vérité.

Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Affiche du film "La fille au bracelet", de Stéphane Dumoustier (2020) (Le Pacte)

Le second long-métrage de Stéphane Demoustier, en salle le 12 février 2020, met en scène une jeune fille accusée du meurtre de sa meilleure amie. La jeune fille au bracelet. Le titre sonne comme un conte de fées. Mais ici le bracelet n'est pas serti de diamants, il est électronique. Lise (Melissa Guers), 18 ans, le porte à la cheville depuis qu'elle a été mise en liberté provisoire. Deux ans plus tôt, Flora, sa meilleure amie a été retrouvée morte dans son lit. Lise avait dormi chez elle après une soirée entre amis. Elle est la dernière à l'avoir vue vivante. 

Après la scène d'arrestation sur la plage, filmée en plan large, de loin, inaudible, le film s'ouvre la veille du procès. Le père de Lise (Roschdy Zem), l'accompagne, sa mère (Chiara Mastroianni) préfère rester à distance.

La presque totalité de l'action du film se déroule dans le huis-clos des assises. Les plans sont fixes, les débats tournés comme une pièce de théâtre. La caméra quitte régulièrement le tribunal pour l'extérieur, en mouvement, et en musique, dans la voiture, sur le chemin de la maison familiale (moderne, vitrée, bourgeoise) ou bien vers l'autre maison, celle du bord de mer, pas loin du lieu du crime.  

Pratiques sexuelles décomplexées

Ce que l'on découvre au fil des débats, comme les jurés, comme les parents, c'est une jeunesse aux mœurs libérées. Lise dispose comme elle l'entend de son corps. Libre, sans gêne, ni honte, elle pratique le sexe sans amour, "pour se faire du bien", explique-t-elle aux jurés. Mais quand sa copine poste sur les réseaux sociaux une scène de sexe la mettant en scène, Lise se met en colère et se fâche avec son amie. La dispute a eu lieu peu de temps avant la mort de Flora.

La caméra ne juge pas, se contentant de consigner les débats, les témoignages, les réquisitoires et les plaidoiries, installant le spectateur dans la position du juré, qui espère, comme chacun dans le huis-clos du tribunal, voir surgir la vérité des faits qui se sont déroulés deux ans plus tôt.

Roschdy Zem et Chiara Mastroianni dans "La fille au bracelet", de Stéphane Dumoustier (2020) (Mathieu Ponchel)

Mais le procès prend une autre tournure. Ce qui se révèle, ce n'est pas la vérité sur les faits, mais comme souvent aux Assises, le dévoilement d'une vérité humaine. Qui est Lise ? Qui sont ses parents ? La connaissent-ils vraiment ? Qui sont ces jeunes gens aux pratiques sexuelles décomplexées ? N'est-on pas en train de transformer ce procès en jugement de moralité ?  L'avocate de la jeune fille s'interroge. 

Melissa Guers, jeune actrice prometteuse

Lise a toujours nié le meurtre dont on l'accuse. Aux attaques incessantes d'une avocate générale zélée (Anaïs Demoustier), la jeune fille reste laconique, presque mutique, ne laissant jamais transparaître aucune émotion, aucun sentiment. 

Melissa Guers dans "La fille au bracelet", de Stéphane Dumoustier (2020) (MATTHIEU PONCHEL)

Le réalisateur ne s'écarte jamais de son parti pris, laissant jusqu'à la fin le spectateur en position de juré, mis en face de ses interrogations, et de zones de mystère persistantes, jusqu'à ce que le verdict tombe, logique.

La jeune comédienne Mélissa Guers, débutante (elle a été recrutée par le réalisateur via un message posté sur les réseaux sociaux) donne au personnage de Lise une incroyable épaisseur et intensité. Roschdy Zem et Chiara Mastroianni interprètent avec justesse la détresse et l'incompréhension des parents de Lise. Anaïs Dumoustier campe parfaitement l'avocate générale qui prend son rôle très au sérieux.

Anaïs Dumoustier dans "La fille au bracelet", de Stéphane Dumoustier (2020) (MATTHIEU PONCHEL)

La fille au bracelet questionne tout autant la justice que l'énigmatique période de la vie qu'est l'adolescence. Réalisé dans une économie de moyens, s'appuyant sur des acteurs très convaincants, ce deuxième long-métrage de Stéphane Demoustier réussit plutôt bien l'exercice périlleux du film procès.

Cinéma : "La fille au bracelet", une adolescente dans le box des accusés
Cinéma : "La fille au bracelet", une adolescente dans le box des accusés Cinéma : "La fille au bracelet", une adolescente dans le box des accusés (France 3)

La fiche

Affiche du film "La file au bracelet", de Stéphane Dumoustier (2020) (Le Pacte)

Genre : drame, judiciaire
Réalisateur : Stéphane Demoustier
Acteurs : Melissa Guers, Roschdy Zem, Chiara Mastroianni
Pays : France
Durée : 1h36
Sortie : 12 février 2020
Distributeur : Le Pacte
Synopsis : Lise, 18 ans, vit dans un quartier résidentiel sans histoire et vient d'avoir son bac. Mais depuis deux ans, Lise porte un bracelet car elle est accusée d'avoir assassiné sa meilleure amie.    

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