Jamel Debbouze, Olivier Gourmet: "La Marche résonne aujourd'hui... hélas"
Sorite le 27 novembre 2013 - Durée 2h00
La Marche de Nabil Ben Yadir s'inspire de faits réels, de la marche pour l'égalité et contre le racisme, rapidement surnommée la Marche des Beurs par les médias. Un mouvement initié par des jeunes du quartier des Minguettes, à Vénissieux près de Lyon pour répondre aux violences racistes. En 1983, la France est en proie aux intolérances et à plusieurs crimes racistes. Cette même année, trois jeunes adolescents et le curé des Minguettes mettent en place une grande marche pacifique pour répondre par la non-violence à ces agressions. Une trentaine de marcheurs partirent de Marseille, pour finalement rejoindre Paris à plus de 60 000. Le film entend nous fait vivre cette marche de l'intérieur et rendre hommage à ces marcheurs.
Les acteurs Jamel Debbouze et Olivier Gourmet étaient à Lyon sur le plateau de France 3 pour en parler.
Interview : France 3 Rhône-Alpes-Auvergne
30 ans après qu'en reste-t-il ?
C'est la question que l'on ne peut s'empêcher de poser. Les jeunes issus de l'immigration ne se font certes plus tuer comme le rappelle Jamel Debbouze, mais le contexte ne leur est guère favorable et c'est même un euphémisme. "Le cœur des gens s’est fermé. On leur répète à longueur de temps que c’est la crise. On leur parle de rigueur, de délinquance. J’ai peur". Ces propos auraient pu être tenus ces derniers jours par n'importe quel sociologue, mais ils sont prononcés par l’acteur Olivier Gourmet dans "La Marche".
Un contexte économique et politique proche de celui des années 80
Nabil Ben Yadir le déclarait lui-même sur le tournage de son film, en avril dernier : "c’est un constat d’échec, finalement : rien n’a changé. C’était la deuxième génération qui marchait en 1983. Si on se reporte à ces années-là, c’est le moment où à Dreux, le RPR passe aux élections grâce aux voix du Front National. Ça fait méchamment penser aux tentations actuelles d’une frange de la droite. Et trente ans plus tard, on est au même point." Au même point, si ce n'est pire. L'arabe, est toujours suspecté de ne pouvoir s'intégrer du fait, cette fois, de sa religion. Le racisme à l'égard des musulmans est venu remplacer celui à l'encontre des arabes comme l'explique l'éditeur et journaliste Thomas Deltombe dans le Monde du 01 novembre dans une tribune intitulée "une idéologie rance et raciste abritée derrière un masque humaniste".
Une bascule qui a également commencé en 1983. Mais c'est le même racisme. Celui qui raconte une histoire coloniale mal cicatrisée. Résultat, on assiste à l’impensable, une ministre de la République noire, victime de propos racistes sans que cela ne déclenche de grandes réactions de la classe politique ou de la population comme le dit Christaine Taubira elle-même ce 6 novembre dans un article du Monde : "Ce qui m'étonne le plus, c'est qu'il n'y a pas eu de belle et haute voix qui se soit levée pour alerter sur la dérive de la société française, dit-elle. [Il] s'agit très clairement d'inhibitions qui disparaissent, de digues qui tombent."
Force est de constater que ces derniers mois, voire ces dernières années, on a assisté à un retour du racisme qui s'est longtemps caché derrière la fin du politiquement correct. Un phénomène que le journaliste Harry Roselmack dénonce à son tour dans une tribune du Monde du 4 novembre 2013 intitulé La France raciste est de retour.
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