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Cannes 2016. "Rester vertical" : Alain Guiraudie se perd sur un causse de Lozère

Pour son cinquième long métrage, Alain Guiraudie filme les errances d’un scénariste à la dérive. Inutilement trash et bien loin de la flamboyance de son "Inconnu du lac".
Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
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  (Les Films du Losange)

Une petite route de campagne. Sinueuse. Interminable. Sur le bas-côté, assis sur une chaise, un vieil homme, casquette vissée au crâne, distrait son ennui en regardant les rares voitures qui passent. Dans l’une d’elle, Léo, un scénariste en perte de motivation, en perte d’élan, qui semble s’être retrouvé là sans trop savoir comment. Le quadra sort de son véhicule, croise un jeune homme, Yoann. Entre eux, une discussion s’entame. Improbable. "Dites-moi, vous n’avez jamais pensé faire du cinéma ?", lance le premier. "Non", répond l’autre, sibyllin, avant de s’en aller. Une scène d’ouverture étrange, taiseuse, comme la suivante.

  (Thierry Valletoux)

Sillon  

Nous voilà projeté au beau milieu d’un immense causse. Au loin, des brebis, un chien. Et une femme. Elle s’appelle Marie, est bergère. Léo s’en rapproche. Ils se parlent. Lui confie qu’il est passionné par les loups. Elle le touche. Le ramène chez elle, où elle vit avec son père et ses deux enfants. Puis soudain, en gros plan, son vagin. Et dès ces premiers instants, on se dit qu’Alain Guiraudie a décidé de creuser encore un plus son sillon.
 
Celui de "L’Inconnu du lac" où le cinéaste nous contait l’été de Franck. Un saisonnier qui se rendait au bord d’un lac pour retrouver des hommes venus comme lui s’abandonner, nus, aux autres et aux rayons du soleil. Des êtres qui passaient de corps en corps, implacablement. Un rituel quotidien. Perpétuel. Pour un film magistral, d’une infinie simplicité et vivement accueilli à Cannes il y a trois ans où il était présenté dans la section Un certain regard. Et des thématiques classiques, les mêmes que l’on retrouve dans ce "Rester vertical", qu’ils parvenaient à sublimer. Le sexe, l’amour, la mort. Mais il faut bien le reconnaître, elles sont cette fois traitées avec beaucoup moins de flamboyance.
 
  (Emanuelle Jacobson-Roques)


Forcé

Léo et Marie vivront ensemble, quelque temps. Marie tombera enceinte. Accouchera. Accouchement auquel le spectateur est contraint d’assister dans sa totalité. Puis Marie s’en ira, quelques instants après avoir tenter de le masturber sans grand succès. Pour garder sa compagne, rester vertical, semble vouloir nous dire Guiraudie avec malice. Et Léo de poursuivre ses pérégrinations, collé à son bébé, jamais bien loin quand il vivra de soudaines expériences homosexuelles.

Si Guiraudie a souvent filmé des hommes avec des hommes, en en faisant des héros ardents et lumineux, c’est sans doute la première fois qu’il le fait avec si peu de crédibilité. Comme si le réalisateur avait trop forcer le trait. Trop souligner son cinéma. En nous imposant des scènes pas toujours très utiles. Pour le choc. En voulant verser dans ce qu’il a toujours fait, en dépit de tout.
 
Et malheureusement, ça ne prend pas vraiment. La faute peut-être aussi à un acteur, Damien Bonnard, jamais vraiment convaincant. Subsiste malgré tout, une jolie musique de fond. Un film sur la vie. Son cycle imperturbable. Et sur des hommes qui semblent d’abord et avant tout des loups les uns pour les autres.

LA FICHE

Drame de Alain Guiraudie - Avec Damien Bonnard, India Hair, Raphaël Thiéry et Christian Bouillette - Durée : 1h40. Sortie le 24 août 2016.

Synopsis : Léo est à la recherche du loup sur un grand causse de Lozère lorsqu’il rencontre une bergère, Marie. Quelques mois plus tard, ils ont un enfant. En proie au baby blues, et sans aucune confiance en Léo qui s’en va et puis revient sans prévenir, elle les abandonne tous les deux. Léo se retrouve alors avec un bébé sur les bras. C’est compliqué mais au fond, il aime bien ça. Et pendant ce temps, il ne travaille pas beaucoup, il sombre peu à peu dans la misère. C’est la déchéance sociale qui le ramène vers les causses de Lozère et vers le loup.

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