Mostra : Jean-Paul Belmondo reçoit un Lion d'Or pour sa carrière
"Je ne pense jamais à mon passé. Devant, devant, devant", a assuré jeudi Jean-Paul Belmondo à son arrivée à la Mostra de Venise.
L'acteur, physiquement diminué depuis un accident vasculaire cérébral en 2001, est arrivé soutenu par deux personnes. Essoufflé, il s'est dit "très heureux, très honoré d'être à Venise", lors d'une conférence de presse précédant la remise officielle de ce Lion d'Or.
"Quand j'étais jeune, je venais à Rome et je cherchais Cinecittà (les légendaires studios de cinéma romains, ndlr). Je suis retourné à Paris et Vittorio De Sica m'a appelé et ma dit +je fais un film avec Sofia Loren+ et ce film s'appelait "La Ciociara" (connu aussi sous le titre : "La Paysanne aux pieds nus", ndlr), a raconté l'acteur, évoquant son premier film en Italie sorti en 1961.
"Je suis venu plusieurs fois à Venise. (...) Je suis venu en 1960 et je suis revenu souvent. Il a une chose qui m'a plu, c'est quand j'ai survolé Venise pendu à un hélicoptère", lors du tournage du film "Le guignolo", s'est-il souvenu. "Puis j'ai tourné avec Gina Lollobrigida, Claudia Cardinale et c'est pour ça que j'ai toujours aimé le cinéma italien", a-t-il plaisanté.
"Un jour on rit, un jour on pleure"
L'acteur aux 130 millions de spectateurs à aussi évoqué son amitié avec Alain Delon, dont il fut le rival au box office dans les années 1970 et 1980. Ces deux monstres sacrés du cinéma français ont été plusieurs fois associés à l'écran, en particulier dans "Borsalino" de Jacques Deray (1970). "Je suis copain avec Alain Delon et c'est pour la vie lorsqu'on est copains."Interrogé sur sa carrière exceptionnelle, aussi bien dans des films d'auteur que dans le cinéma populaire, il a assuré "s'amuser dans les deux". "C'est comme dans la vie, un jour on rit, un jour on pleure."
Accompagné de l'actrice Sophie Marceau, de son fils Paul (auteur d'un documentaire sur son père) et de son ami l'acteur Charles Gérard, il a reçu son prix ovationné par une salle debout dans le Palais du Cinéma.
"Jean-Paul Belmondo est une star populaire, un acteur complet, multifaces, producteur de cinéma, un patron de théâtre et aussi le patriarche d'une grande et belle famille", a déclaré Sophie Marceau. "+L'Incorrigible+, +Borsalino+, +L'As des As+, "Le Solitaire+, +Pierrot le fou+, +L'Homme de Rio+... Tous nous ont fait vibrer et rêver."
Celle qui fut sa partenaire à l'écran dans "Joyeuses Pâques" (1984), de Georges Lautner, a aussi rappelé le passé de boxeur de l'acteur. "Tu avais 15 ans et tu apprenais déjà à devenir un homme à coups de poings, à coups de bras d'honneur aussi lorsqu'on te refuse l'entrée de la Comédie-Française et que l'on déclare qu'avec ta gueule, tu ne pourras jamais prendre des femmes dans tes bras (...) Je me rappelle quand tu m'as prise dans tes bras et je me rappelle aussi de Claudia Cardinale, de Sofia Loren, d'Ursula Andress, de Jean Seberg, d'Anna Karina, de Françoise Dorléac, de Catherine Deneuve, d'Annie Girardot, d'Emmanuelle Riva... parce que même en soutane, tu les faisais toutes craquer."
En un demi-siècle de carrière, Jean-Paul Belmondo a abordé de nombreux genres cinématographiques.
La Nouvelle vague
Après des débuts sur les planches, Jean-Paul Belmondo a 27 ans quand Jean-Luc Godard, alors critique de cinéma, lui confie son premier grand rôle au côté de Jean Seberg, dans "À bout de souffle", qui deviendra le film emblématique de la Nouvelle vague.Après ce premier triomphe public et critique, Belmondo enchaîne plus de trente films au cours des années 60. Avec Godard, il tourne encore "Une femme est une femme" (1961) et "Pierrot le fou" (1965). Sous la direction de grands réalisateurs, il révèle très vite ses multiples facettes: "Moderato cantabile" (Peter Brook, 1960) d'après le roman de Marguerite Duras, "Léon Morin, prêtre" (Jean-Pierre Melville, 1961), "Un singe en hiver" (Henri Verneuil, 1962) avec Jean Gabin, qui le voit comme un autre lui-même, à 20 ans. En 1969, il tourne "La sirène du Mississippi" avec une autre grande figure de la Nouvelle vague, François Truffaut.
Les films d'aventures
Acteur très physique, adorant tourner sans doublure, Jean-Paul Belmondo joue dans de nombreux films d'aventures qui vont connaître des succès retentissants auprès du public. C'est d'abord "Cartouche" (Philippe de Broca, 1961) qui triomphe avec 3 millions d'entrées, puis, avec le même metteur en scène, "L'Homme de Rio" (1963) avec Françoise Dorléac, qui atteindra les 5 millions d'entrées.Fort de ces succès, il enchaîne avec "Les tribulations d'un chinois en Chine" (Philippe de Broca, 1965), tournage au cours duquel il tombe amoureux de sa partenaire Ursula Andress.
Les polars
Les polars vont constituer un autre volet des grands succès de "Bébel". Il s'attaque au genre avec "L'aîné des Ferchaux" (Jean-Pierre Melville, 1963) puis, avec le même réalisateur, "Le Doulos" (1963). Il enchaîne avec "Le Cerveau" (Gérard Oury, 1969), grand succès commercial, "Borsalino" (Jacques Deray, 1970) avec Alain Delon, "Le Corps de mon ennemi" (Henri Verneuil, 1976), "Peur sur la ville" (Henri Verneuil, 1975) où il exécute quelques cascades risquées.Si le succès public est toujours là, les critiques commencent à être moins convaincus. "Pour l'intelligentsia parisienne, j'étais devenu un cascadeur", dira "Bébel" plus tard. Il poursuit néanmoins avec "Flic ou voyou" (Georges Lautner, 1979), "Le Marginal" (Jacques Deray, 1983) ou encore "Les Morfalous" (Henri Verneuil, 1984).
Retour sur les planches
Adoré par le public, Belmondo est moins présent au cinéma à partir du milieu des années 80, malgré quelques films populaires réalisés par Claude Lelouch ("Itinéraire d'un enfant gâté", 1988, "Les misérables", 1995).Près de trente ans après avoir quitté les planches, il remonte sur scène en 1987 dans "Kean" mis en scène par Robert Hossein puis "Cyrano de Bergerac" (1989).
Acteur emblématique de la Nouvelle Vague mais aussi flic ou voyou du cinéma français, Jean-Paul Belondo a été en compétition à deux reprises à Venise avec "Léon Morin, prêtre" de Jean-Pierre Melville (1961) et "Pierrot le fou" de Jean-Luc Godard (1965). Il avait été honoré par le Festival de Cannes en 2011 par une soirée spéciale.
Interrogé sur ses envies en matière de cinéma, le héros d'"A bout de souffle" a déclaré: "J'ai fait tout ce que j'ai voulu faire. Aujourd'hui, le soleil, la mer..."
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