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Lumière 2016 : Jean-Loup Dabadie "avec Sautet, nous décrivions le monde où nous vivions"

Le scénariste et dialoguiste Jean-Loup Dabadie est l'un des grands invités de l'édition 2016 du festival Lumière qui se tient à Lyon jusqu'au 16 octobre. Plusieurs des films de ses films sont projetés sur grand écran après restauration. C'est le cas de "César et Rosalie", de Claude Sautet ou de "Un éléphant ça trompe énormément" d'Yves Robert. Il donnera une masterclass. Cuturebox l'a rencontré.
Article rédigé par franceinfo
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Jean-Loup Dabadie à la soirée d'ouverture du festival Lumière le 8 octobre 2016 à Lyon
 (Jean-François Lixon)

A parcourir les collaborations de Jean-Loup Dabadie, on ne peut se faire qu'une réflexion : cet homme-là a accompagné toute notre vie depuis les années 60. Qu'il s'agisse du cinéma ou de la chanson, il est au coin d'un nombre impressionnant de succès populaires du dernier demi-siècle. Et même s'il est convié à participer à la grande fête lyonnaise du festival Lumière pour ses scénarios et ses dialogues, il est impossible d'oublier tous les refrains que nous avons tous, un jour ou l'autre fredonnés. On lui doit ainsi des chansons « de » Julien Clerc, Serge Reggiani, Michel Polnareff, Yves Montand, Juliette Gréco, Michel Sardou, Henri Salvador, la liste est loin d'être complète. Et surtout, puisque l'on parle ici films et acteurs, il faut se souvenir que c'est à lui que l'on doit les paroles, plus dites que chantées, de « Maintenant, je sais », interprétée deux ans avant sa disparition par Jean Gabin.

César et Rosalie

Au cinéma, le nom de Jean-Loup Dabadie est entouré de ceux de réalisateurs comme Claude Sautet, Yves Robert, François Truffaut, Jean-Paul Rappeneau, Jacques Monnet, Jean Becker ou Philippe de Broca. Avec eux, il a signé ou cosigné des scénarios et des dialogues dont certains ont largement contribué au succès de leurs oeuvres, voire à leur statut de films cultes.

C'est le cas par exemple pour « César et Rosalie », réalisé par Claude Sautet en 1972 et que Jean-Loup Dabadie présentait au public du festival Lumière ce dimanche 9 octobre. Ce film est aujourd'hui l'un des préférés des Français. L'histoire d'une femme (Romy Schneider) déchirée entre deux hommes, le flamboyant César (Yves Montand), et le sombre David (Sami Frey). On y retrouve une France pas si éloignée et déjà presque entrée dans l'histoire. Une France qui commence à connaître des ratés, une société où la femme prépare encore l'omelette ou le panier de glaçons pour son homme qui joue au poker avec des amis tout aussi gentiment machos. Une femme partagée entre deux hommes, mais aussi entre soumission et désir d'indépendance. Tout cela dans une France où l'on fume comme des pompiers, où l'on conduit les voitures sans ceinture de sécurité et où l'on doit s'arrêter dans un café quand on veut passer un coup de fil.

Panique

Parmi les anecdotes rapportées par Jean-Loup Dabadie, cette panique qui le prend en pleine écriture du scénario de "César et Rosalie". D'un coup, il se dit la sueur au front : "mais je suis en train de réécrire Jule et Jim, le film de François Truffaut". Il appelle donc le cinéaste et lui explique son problème. Truffaut l'invite aussitôt à déjeuner chez lui (anecdote dans l'anecdote, Dabadie raconte les côtelettes trop cuites et les haricots carbonisés). Après avoir expliqué son histoire, en avoir listé les interprètes, Dabadie entend son interlocuteur lui dire (et on croirait entendre sa voix) : "Sautet n'est pas moi, tu n'es pas Henri-Pierre Roché (l'auteur du livre original), Romy n'est pas Jeanne. Fais ton film et tu verras, personne ne fera le rapprochement". Dabadie conclut qu'en effet, hormis deux lignes dans un article publié dans une revue de cinéma très spécialisée, personne n'a fait le rapprochement entre les deux films.

L'air du temps

Au delà de l'histoire d'amour, Dabadie et Sautet ont su, comme dans tous les films dont ils partagent la paternité, saisir l'air du temps. Et ce n'est pas si facile quand, justement, ce temps est celui du présent. Il faut un recul et un sens de l'observation hors du commun pour saisir dans sa propre époque ce qui en fait le fumet, le charme et surtout la vérité. A ce titre, le duo Sautet-Dabadie peut être comparé à ceux qu'a pu former Marcel Carné à son époque avec Jacques Prévert ou Henri Jeanson. Pour Jean-Loup Dabadie l'explication en est simple :


Films sur l'amitié

Jean-Loup Dabadie a donc beaucoup écrit d'histoires d'amitié, de copains, de familles. Que ce soit dans le registre comique avec les films d'Yves Robert "Nous irons tous au Paradis" (1977)  ou dans un esprit plus sombre avec Claude Sautet "Les choses de la vie" (1970) et ce n'est pas un hasard, comme il le raconte très bien.


Réussite ou échec, comment prévoir ?

Nombre de ses films ont connu un énorme succès. D'autres, pourtant souvent tout aussi excellents, comme la comédie "Clara et les Chics Types" (1981) de Jacques Monnet, n'ont pas eu cette chance malgré un casting prestigieux (Isabelle Adjani, Thierry Lhermite, Josiane Balasko, Christian Clavier, Daniel Auteuil, Christophe Bourseiller, Marianne Sergent) mais sans doute un peu en avance sur son temps.



Parmi les films projetés dans le cadre de Lumière 2016, trois portent la signature de Jean-Loup Dabadie : "César et Rosalie" (Claude Sautet 1972), "Le Sauvage" (Jean-Paul Rappeneau 1975) et "Un éléphant ça trompe énormément" (Yves Robert, 1976). Le scénariste et dialoguiste donne une masterclass le 11 octobre à 15h.

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