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"Le champ des possibles" ou l’amour en temps de haine dans un Brésil tourmenté

Aly Muritiba signe avec "Le champ des possibles" un film dense et engagé. Le réalisateur brésilien interroge la masculinité et questionne l’altérité. Il se penche aussi sur les identités blessées.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
L'acteur Antonio Saboia dans le film "Le champ des possibles" (Divulgação)

La violence est sous-jacente, jamais loin, durant les deux heures que dure le film. Une violence physique animale, primaire, et une autre plus intériorisée, moins visible qui détruit de l’intérieur celui qui la subit. Daniel, policier quadra mis à pied pour des violences sur un jeune collègue (on ne saura jamais lesquelles), trouve son oasis dans une relation virtuelle. Ce sera sa béquille, lui qui doit faire face à des problèmes familiaux et professionnels. Un refuge où il pense pouvoir laisser sa nature, sa virilité, s’exprimer. Attention aux inconnus qui vous veulent du bien, parfois ils le désirent réellement. Et Daniel succombe aux charmes de Sara. Un jour, Sara coupe toute relation avec Daniel.

Cherche Sara désespérément

 

Qui est Sara ? Aly Muritiba, en réalisateur averti, sème des indices sans rien révéler. Pour le savoir, laissant tout derrière lui, Daniel parcourt 3 000 km. Sara devient sa destination et les rencontres qu’il fait pour enfin faire sa connaissance de visu un cheminement intérieur. Daniel se découvre en allant vers les autres. Il est confronté à d’autres logiques, d’autres regards. L’altérité prend tout son sens. Daniel, policier et fils de policier, aux idées bien tranchées voit son univers se fissurer. D’abord ébranlé dans sa masculinité, il mène un combat violent contre lui-même, en silence car il est avare de mots, contre lui-même, contre ses certitudes. "La question qui m’habitait et m’habite encore aujourd'hui est la suivante : comment nous, les hommes, aimons-nous ? Comment pouvons-nous exprimer ce que nous ressentons sans nous blesser les uns les autres ? Comment le faire, si on nous apprend tout le temps qu'il faut être fort, ferme et froid ?", explique Aly Muritiba.

L'acteur Pedro Fasanaro dans "Le champ des possibles" (Optimale distribution)

Que sont nos amours devenues ?

Le réalisateur brésilien regarde son pays au fond des yeux. Avec lucidité et affection. Il interroge le patriarcat, la religion, la société. Il en veut à l’ancien président Bolsonaro d’avoir fait du Brésil un pays divisé. "Après l'élection de Jair Bolsonaro, toutes les minorités, les femmes, les indigènes, la communauté LGBTQI+, les Noirs, entre autres, ont commencé à être systématiquement persécutés et le pays a été divisé entre le sud conservateur et le nord/nord-est progressiste. À de nombreuses reprises, nous avons été au bord de la confrontation armée", se désole-t-il.

Le champ des possibles, (Deserto Particular, titre original) a reçu le prix du public à la Mostra de Venise et a représenté le Brésil dans la course aux Oscars de 2022. Le champ des possibles est un film d’amour en des temps tourmentés.

Affiche du film "Le champ des possibles" (Optimale distribution)

La fiche

Titre : «Le champ des possibles », (Deserto Particular, titre original)

Durée : 2 heures

Langue : portugais STT en français

Réalisation : Aly Muritiba

Distribution : Antonio Saboia, Pedro Fasanaro, Thomas Aquino

Synopsis : Daniel, 40 ans, a été suspendu de ses fonctions d’agent de police suite à une bavure. Il se focalise alors sur une relation virtuelle avec une personne mystérieuse qu’il n’a encore jamais rencontrée. Lorsqu’elle cesse de répondre à ses SMS, il décide de parcourir des milliers de kilomètres pour la retrouver.

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