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La perte de la Ligue 1 par Canal+ fragilise le cinéma français
L’énorme coup dur subit par Canal+ suite à l’annonce de la perte de la diffusion de la Ligue 1 de football après 34 ans d’exclusivité, risque d’impacter par ricochet le cinéma français en raison du rôle prépondérant de la chaîne cryptée dans le financement des films et la perte constante de ses abonnés qui pourrait s’accélérer suite à ce désistement.
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Canal+ "unijambiste"
"Le cinéma français, qui s'est livré corps et âme à Canal+ et a oublié de se réformer, en passe de s'écrouler", a lancé sur Twitter le producteur Vincent Maraval, connu pour ses positions tranchées. Depuis sa création en 1984, Canal+ - qui diffuse les films en avance par rapport aux autres chaînes hertziennes - est le premier financeur privé du cinéma français."Canal+ marchait sur deux jambes, d'un côté le sport et de l'autre, le cinéma et la création audiovisuelle, et là il est devenu unijambiste", explique à l'AFP Pascal Rogard, directeur général de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD). Invoquant "un changement de paradigme" majeur, il juge nécessaire de "repenser le financement du cinéma" sans plus tarder.
Canal+, qui comptait fin mars un peu plus de huit millions d'abonnés, en a perdu environ un million en cinq ans. En perdant les droits de diffusion de la Ligue 1 sur la période 2020-2024, il risque de voir partir de nouveaux abonnés, avec des retombées sur la filière cinéma. "C'est un séisme pour le secteur et pour la diversité des œuvres", juge Mathieu Debusschère, délégué général de l'ARP (société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs).
Car Canal+ a pour obligation de consacrer une part de ses investissements aux films de moins de 4 millions d'euros. Et via les systèmes de coproduction, la chaîne finance également le cinéma étranger.
Recherche de nouveaux partenaires
Si les scénarios catastrophes se confirment, qui pourrait reprendre une partie du flambeau ? "Ce qui s'est passé hier soir (mardi) doit nous interroger sur le rôle que devra jouer demain France Télévisions", estime Mathieu Debusschère, espérant que la création sera au cœur de la future réforme de l'audiovisuel public, même si elle devrait comporter de lourdes économies.Dans ce contexte, les yeux se tournent vers les plateformes de type Netflix. Un premier pas a été fait avec la révision au printemps d'une directive européenne (SMA) qui, une fois entrée en vigueur, devrait contraindre des plateformes à financer le cinéma français, même si elles sont établies à l'étranger.
"Nous sommes en contact étroit avec les dirigeants de Canal+", a affirmé mercredi la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, lors d'une audition à l'Assemblée. "Nous devons être vigilant pour le modèle économique de Canal+ qui est essentiel au financement du cinéma. Pour agir nous avons un moyen fort: la future loi audiovisuelle qui transposera la directive SMA, car tous les diffuseurs auront la même obligation de financer le cinéma et la création audiovisuelle", a souligné la ministre.
En quête d’apaisement
Dans le milieu du cinéma, certains se veulent moins pessimistes à l'image du producteur et distributeur Jean Labadie (Le Pacte). "Canal+ aura toujours l'avantage d'être en avance (avec une diffusion des films dix mois après leur sortie), il n'y a pas de raison qu'ils n'arrivent pas à garder leur clientèle, en proposant plus de cinéma", estime-t-il.Le président du directoire de Canal+, Maxime Saada, se voulait quant à lui rassurant. "Il n'y a pas un abonné à Canal+ qui ne regarde que la Ligue 1. (...) Il y a deux millions de nos abonnés qui regardent occasionnellement de la L1, cela peut être moins d'un match par mois. Nos abonnés regardent essentiellement du cinéma, des séries", a-t-il déclaré.
Le groupe va en attendant examiner la possibilité d'accords de sous-licence, après l'attribution à d'autres entreprises des droits de la Ligue 1 pour plus d'un milliard d'euros par an.
"Pour moi, Canal+ n'a pas encore perdu", estime M. Labadie. Même si le nombre d'abonnés baisse, "ça ne l'arrêtera pas de financer des films français", souligne-t-il, s'inquiétant plutôt des dangers du piratage, qui représente un manque à gagner de 1,3 milliard d'euros par an.
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