John Cassavetes par Gena Rowlands, ou l'homme qui comprenait les femmes
Evoquant les films de son mari, l’actrice de 82 ans confie : « Je ne les regarde pas, c’est trop émouvant. Mais je pourrais vous les raconter plan par plan, car je m’en souviens parfaitement. »
John Cassavetes, décédé en 1989 à l’âge de 59 ans, a inspiré des générations de cinéastes en rompant le carcan formel et dramatique des films hollywoodiens. Il était "un artiste unique. Il aimait tellement les acteurs... Il nous donnait une liberté énorme", se souvient-elle.
Cassavetes ne faisait pas répéter ses acteurs
Le cinéaste donnait aux acteurs l'entière responsabilité de leur rôle. "Quand un acteur venait le voir avec une question, il disait: ‘J'ai écrit le scénario, je te l'ai donné, tu l'as accepté, maintenant tu es la personne la mieux placée au monde pour savoir qui est ce personnage’", dit-elle. "C'était très excitant parce que toute la responsabilité du rôle reposait sur vos épaules", ajoute-t-elle.
Cassavetes ne faisait pas répéter ses acteurs, pour encourager la « fraîcheur » du jeu, « mais on faisait une lecture" du scénario avant le tournage, se souvient l'actrice. "John n'aimait pas non plus que les acteurs se parlent de leurs personnages. Il disait: ‘Dans la vraie vie, vous ne savez pas ce que les gens vont dire. Votre personnage non plus’".
Le couple formé par Gena Rowlands et John Cassavetes, jusqu'à la mort de ce dernier, a été l'un des plus féconds de l'histoire du cinéma. Leurs trois enfants, Nick, Alexandra et Zoe, ont d'ailleurs repris le flambeau et sont tous acteurs et réalisateurs.
Rowlands ne savait rien de ses rôles à l'avance
Gena Rowlands a tourné avec Cassavetes les chefs-d'oeuvre "Faces", "Une femme sous influence", "Opening night" et "Gloria". Elle était pourtant maintenue dans le secret et Cassavetes ne lui parlait jamais des rôles qu'il écrivait pour elle. « La surprise était totale », dit-elle.
Elle assure n'avoir jamais dit non à un rôle écrit par Cassavetes sauf pour celui de Mabel dans "Une femme sous influence", d'abord écrit pour le théâtre, et qu'elle a finalement incarné au grand écran. "Je voyais bien en le lisant que ce serait trop difficile à faire sur scène tous les soirs. C'était un rôle très physique", raconte-t-elle. "J'ai dit à John: ‘Tu sais, je vais mourir d'épuisement’". Il m'a dit qu'il allait arranger ça. Il est revenu trois semaines plus tard avec une nouvelle version (pour le cinéma) où il avait gardé le personnage mais changé l'action, pour que l'intensité émotionnelle soit mieux répartie".
Cinq films de Cassavetes sur les écrans français cet été
Dans ce film comme dans tant d'autres de sa filmographie, Cassavetes mettait à nu la sensibilité féminine comme peu de cinéastes. "J'ai toujours été surprise de la connaissance qu'avait John des sentiments féminins, de sa profonde tendresse pour les personnages de femmes", dit-elle. "Il touchait à des choses auxquelles les femmes pensent, mais qu'on n'attend pas d'un homme."
Le 11 juillet, cinq films de John Cassavetes ressortent sur les écrans français, en version remasterisée : "Shadows", "Faces", "Une femme sous influence", "Meurtre d’un bookmaker chinois", "Opening night".
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