Hommage à Sophia Loren : Lyon ovationne la "Ciociara"
Si Thierry Frémaux , le patron du festival Lumière (et aussi de celui de Cannes) n'avait pas invité Sophie Loren à s'asseoir sur l'un des trois fauteuils qui occupaient le centre de la scène, le public de l'auditorium de Lyon applaudirait sans doute encore l'entrée de la mythique actrice. La standing ovation a duré de longues minutes et la dame en robe rouge en a paru sincèrement émue.
Reportage : J. Sauvadon / F. Gramond
Et puis elle est entrée.
Au bras de son fils Eduardo Ponti, Sophia Loren a traversé la scène pour rejoindre Thierry frémaux et Régis Wargnier. Comme la veille avec l'arrivée de Jean-Paul Belmondo, chacun a pu faire la différence entre une vedette et une star. Quand Sophia Loren suit le faisceau de lumière qui la conduit face à son public, elle est accompagnée de tous ses personnages, elle porte toute l'Italie des années 60, le glamour des années américaines, elle est un peu de notre histoire à nous, les amoureux du cinéma. Alors, cette femme au charisme hors du commun, n'a plus 81 ans, elle a tous les âges de sa vie. Elle a 17 ans, elle a 20 ans, elle a 40 et 50 ans. Elle a tous les âges de Sophie Loren et en a gardé la beauté. Sophia Loren est sans aucune possibilité de contestation l'une des rares grandes stars vivantes, pourtant elle ne s'enferme pas dans l'apparence ni les convenances.
Simplicité et naturel
A Thierry Frémaux qui lui demande en prélude à la discussion si elle s'étonne de l'accueil du public, de cette standing ovation , elle répond avec beaucoup de naturel que, non, elle n'est pas étonnée "Quand on fait dans la vie quelque chose qu'on réussit très bien, on s'attend à ce genre d'accueil". Une analyse qui, sans la distinction et la sincérité de la dame, aurait paru de la part de tout autre déplacé et prétentieux. C'était avec elle juste et sincère.
La discussion a couru ensuite sur sa carrière mais aussi sur sa vie personnelle. Elle assure que Dieu a été là avec elle, dans cette famille sans père, quand elle a bataillé, beaucoup travaillé "comme une petite fille qui fait bien ses devoirs à l'école".
Ponti, De Sica, Mastroianni
Interrogée sur les réalisateurs, elle répond que Vittorio de Sica a été pour elle comme le père qu'elle n'avait pas eu. Qu'elle ne parvenait pas à croire que le grand Charlie Chaplin voulait d'elle pour un film (La comtesse de Hong-Kong). Quand elle l'a rencontré, la jeune actrice était impressionnée au point de devoir s'asseoir tant ses jambes tremblaient alors sous elle. Elle a rappelé le souvenir de Carlo Ponti, ce producteur de 22 ans son aîné qui fut son mari pendant plus trente ans mais qui fut surtout son grand amour : "Je l'aimais, et il m'aimait". C'est souvent dans les mots les plus simples que se tient la vérité des sentiments. Ce sont en tout cas ceux que Sophia Loren avait choisi pour parler d'elle, de sa carrière et de sa vie au public du Festival Lumière.
Humour et vivacité
Si Carlo Ponti fut l'homme de la vie de Sophia Loren, un autre italien fut son principal compagnon à l'écran. "Quand Marcello Mastroianni est mort, dit-elle avec émotion, j'ai perdu un peu de moi". Et elle évoque, les yeux tournés vers son passé ce partenaire de quinze films qui a tant compté. "Mais le soir il rentrait chez lui, je rentrais chez moi, on avait chacun sa vie" précise-t-elle, croyant discerner dans les questions de Thierry Frémaux des allusions grivoises qui n'y étaient probablement pas. Le public a maintes fois ri aux éclats lors de cette rencontre exceptionnelle. Quand par exemple, était posée à Sophia Loren la question suivante : "Avec Carlo Ponti, alliez vous au cinéma, assistiez-vous aux premières ?", réponse immédiate de l'actrice : "J'allais à mes premières!", Eclat de rire dans la salle suivi de ces quelques mots de Sophia Loren avec un sourire complice: "J'ai honte, Monsieur!"...
La Ciociara, drame de la fin de la guerre en Italie
Le public lyonnais a eu l'exceptionnel privilège d'approcher une des dernières véritables stars du cinéma mondial. C'est l'un des grands atouts de ce festival Lumière. Sans compétition, il rapporche réalisateurs, acteurs et public dans un même amour du 7e art. Sophia Loren est repartie en remerciant une nouvelle fois et sous une nouvelle ovation. Le spectateur l'a retrouvée quelques instant plus tard mais 54 années plus tôt, en 1961 dans "La Ciociara" de Vittorio de Sica. Le film était présenté dans un somptueux noir et blanc auquel ne rend pas hommage l'extrait en version originale non sous-titré que voici. On y retrouvait une autre grande personnalité invitée de ce 7e festival Lumière : Jean-Paul Belmondo.
Curiosité
"La Ciociara" est, avec "Une Journée Particulière" et le premier film qu'elle a tourné à 17 ans l'un des trois films préférés de Sophia Loren. Il faut noter une bizarrerie. Elle a tourné en 1988 un remake en couleurs de La Ciociara pour la télévision italienne. Elle avait alors l'âge du personnage dans le roman d'Alberto Moravia dont est tiré le film. Cette version qui reprend presque scène pour scène le film de Vittorio de Sica n'apparaît quasiment jamais dans la filmographie de l'actrice.
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