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DécÚs de Vittorio Taviani, réalisateur avec son frÚre Paolo de "Padre Padrone"

Le cinéaste Vittorio Taviani qui, avec son frÚre Paolo, a signé certains des grands films du cinéma italien est mort à Rome, à 88 ans, ont annoncé dimanche les médias, citant des sources familiales.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Temps de lecture : 6min
Vittorio Taviani à Berlin, en février 2012
 (GĂ©rard Julien / AFP)

Vittorio Taviani, malade depuis longtemps, avait réalisé avec son frÚre Paolo une quinzaine de longs métrages, dont le plus célÚbre, "Padre padrone", avait reçu la Palme d'Or du Festival de Cannes en 1977.
 
NĂ© le 20 septembre 1929 Ă  San Miniato en Toscane (centre de l'Italie), Vittorio Ă©tait ĂągĂ© de deux ans de plus que son frĂšre Paolo, avec qui il a formĂ© un duo quasi unique dans l'histoire du septiĂšme art, qui parlait toujours d'une mĂȘme voix, et Ă©crivait Ă  quatre mains ses colĂšres, ses indignations, mais aussi son amour de l'art et de la beautĂ©.

Les deux frÚres : comme le café au lait

"Nous ne voyons pas comment nous pourrions travailler l'un sans l'autre. (...) Tant que nous pourrons mystĂ©rieusement respirer au mĂȘme rythme, nous ferons des films ensemble", disaient les frĂšres Taviani lors d'une confĂ©rence de presse Ă  Cannes en 1977 : "Nous sommes comme le cafĂ© au lait. Impossible de dire oĂč finit le cafĂ© et oĂč commence le lait."
 
 
Fortement inspirĂ©s par le maĂźtre du nĂ©o-rĂ©alisme Roberto Rosselini, et aussi par Vittorio de Sica, les deux frĂšres, fils d'un avocat antifasciste, se sont intĂ©ressĂ©s dĂšs leurs dĂ©buts dans les annĂ©es 1960 aux thĂšmes sociaux. Leur cinĂ©ma atypique, marquĂ© par un style trĂšs littĂ©raire, mĂȘle histoire, psychanalyse et poĂ©sie. 
 
"Le cinéma est ma vie parce que sinon je serais seulement un fantÎme et tous les rapports avec les autres se dissoudraient dans le brouillard", disait Vittorio Taviani.

Une vingtaine de longs métrages

AprÚs avoir suivi des cours d'art à l'université de Pise, les deux frÚres décident de faire du cinéma quand ils voient "Paisa", drame néo-réaliste de Roberto Rossellini. Ils réalisent d'abord sept documentaires. Le premier, "Sani Miniato, luglio '44", sur le massacre des habitants de leur village natal par les nazis, est interdit en 1955.
 
Ils rĂ©alisent leur premier long mĂ©trage de fiction, "Un homme Ă  brĂ»ler", en 1962, avec Umberto Orsini, oĂč Gian Maria VolontĂ© est un syndicaliste paysan en lutte contre la mafia en Sicile.
 
Suivront une vingtaine de films qui racontent la réalité de l'Italie d'hier et d'aujourd'hui : ils s'emparent l'année suivante du thÚme du divorce avec la comédie "Les hors-la-loi du mariage", interprétée par Ugo Tognazzi et Annie Girardot, avant de réaliser "Sous le signe du scorpion", une allégorie des évÚnements de l'année 1968.

"Allonsanfan", premier succĂšs international

Ce n'est qu'en 1974, avec "Allonsanfan", évocation de l'Italie post-napoléonienne et de l'échec des troubles révolutionnaires qui éclatÚrent à l'époque, qu'ils obtiennent leur premier succÚs international.
 
Beaucoup de leurs films sont inspirĂ©s d'oeuvres littĂ©raires : "Les affinitĂ©s Ă©lectives" adaptĂ©es de Goethe, ou "Padre padrone" tirĂ© du roman Ă©ponyme de Gavino Ledda, qui raconte la rude destinĂ©e d'un enfant sarde Ă©levĂ© par un berger. PrĂ©sentĂ© au festival de Cannes oĂč il suscite une polĂ©mique en raison de sa duretĂ©, "Padre padrone" n'en reçoit pas moins la Palme d'or.
 
Le thÚme de l'enfance est également au coeur de "La Nuit de San Lorenzo" (1982, Grand prix spécial du jury de Cannes).
 
Vittorio et Paolo Taviani se rendent cinq ans plus tard aux Etats-Unis, oĂč ils tournent "Good Morning Babylon" peinture satirique de Hollywood.

Du G8 de GĂȘnes Ă  l'univers carcĂ©ral

Grands admirateurs du dramaturge et romancier sicilien Luigi Pirandello, ils adaptent plusieurs de ses récits dans "Kaos", film surréaliste en deux volets en forme de réflexion sur les désordres et la cruauté de la vie, qui dénonce le fascisme et la mafia.
 
AprĂšs un retour au documentaire avec "Un autre monde est possible", tournĂ© lors du G8 de GĂȘnes (2001) avec le cinĂ©aste Gillo Pontecorvo, qui dĂ©nonce les effets dĂ©vastateurs de la mondialisation, ils reviennent Ă  la fiction avec "Le Mas des alouettes"(2007).
 
En 2012, avec "CĂ©sar doit mourir" ils racontent l'univers carcĂ©ral autrement, Ă  travers la prĂ©paration d'une piĂšce de Shakespeare dans la prison romaine de Rebibbia. Le film, rĂ©compensĂ© par l'Ours d'or Ă  Berlin, raconte comment des dĂ©tenus se libĂšrent de leurs geĂŽles grĂące Ă  l'art, mais prennent en mĂȘme temps conscience de leur enfermement.
 
"Jamais on ne capitule. On dit qu'en vieillissant, on est plus gĂ©nĂ©reux, plus tolĂ©rant. C'est faux. Nous avons toujours le mĂȘme instinct de rĂ©bellion", disaient-ils Ă  l'Ă©poque.
 
Pour la premiÚre fois en un demi-siÚcle, Paolo a réalisé un long métrage seul en 2017, "Une Affaire personnelle", histoire d'amour sur fond de Résistance dans le Piémont de 1943.

Gilles Jacob : "Nous nous sommes tant aimés"

"C'est un jour triste pour la culture, un des plus grands maßtres de notre cinéma s'en va", a déclaré dans un communiqué le ministre italien de la Culture, Dario Franceschini.
 
"Don, bonté, humilité. Classe. L'homme à la casquette, qui le distinguait de Paolo. Je peux dire avec Scola : 'Nous nous sommes tant aimés.' La nuit de San Lorenzo est leur chef d'oeuvre", a réagi sur Twitter Gilles Jacob, ancien président du festival de Cannes.

 
 

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