[DEAUVILLE] "The Retrieval" de Chris Eska : un cas de conscience dans le bayou
De Chris Eska (Etats-Unis), avec : Ashton Sanders, Tishuan Scott, Keston John, Bill Oberst Jr., Christine Horn - 1h34
On pourrait croire de prime abord à un western mettant en jeu des notions telles que la ségrégation, l'injustice ou les ravages de la Guerre de Sécession. Une sorte de "Django Unchained" au petit pied. On se tromperait lourdement. La couleur de peau des protagonistes, le conflit entre le Nord et le Sud, le bayou et même le siècle où est située l'action, tout cela n'est que décor. Le vrai propos est intérieur et pourrait être transposé dans d'autres lieux et d'autres époques.
Le film s'ouvre sur un constat : même au temps de la ségrégation raciale aux Etats-Unis, il y a de gentils Blancs et de mauvais Noirs. "Ah, bon ça y est" se dit le spectateur, "on est là pour dynamiter les préjugés". Will, un adolescent Noir (Ashton Sanders) aide son oncle Marcus (Keston John) à débusquer les esclaves en fuite pour le compte de chasseurs de primes. Pas joli-joli, mais rémunérateur. L'affaire se complique quand les deux hommes sont chargés de retrouver Nate, un fuyard (Tischuan Scott), dont on leur dit qu'il est un assassin. A défaut de ramener le fugitif, les chasseurs de primes, dont aucun n'a le charme de Steve McQueen dans "Au nom de la loi", jurent de les tuer tous les deux. Le secret
L'oncle sans scrupules est rapidement mis hors champ, restent le jeune garçon, le hors-la-loi qui se révèle un homme d'une grande humanité et, entre eux, un secret. Alors qu'il croit rejoindre son frère malade, Nate marche vers sa mort sous les armes des chasseurs de primes. L'adolescent le sait, le spectateur le sait, l'homme l'ignore.
Tout le film se joue dans le regard du garçon. Va-t-il sauver celui qu'il commence à aimer ou va-t-il le mener vers le piège mortel pour sauver sa propre vie ?
Intitiatique
Le long chemin partagé par les deux hommes, l'adulte et celui en construction, est autant intérieur que dans les décors du sud des Etats-Unis. Le spectateur suit la progression du questionnement de l'adolescent. Et pourtant rien n'est dit, tout est dans la nuance du jeu d'Ashton Sanders et dans la précision de la mise en scène. Chris Eska calcule à merveille les distances entre les personnages. "The Retrieval" mérite d'être vu, et même d'être revu afin de suivre, en toute connaissance de l'histoire, l'évolution du personnage principal, ce jeune homme qui voit poindre à l'horizon de sa jeune vie une notion à laquelle personne ne l'avait préparé : sa conscience.
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