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[DEAUVILLE] "I Origins" : en quête des yeux de l'âme

A 35 ans, le cinéaste américain Mike Cahill signe "I Origins", son deuxième long métrage, en compétition au 40e Festival du Film Américain de Deauville. Comme dans "Another earth", ce film propose une science-fiction complètement ancrée dans le quotidien. Pas d'effets spéciaux mais une aventure au coeur de l'humain, de ses plus grandes interrogations. Risqué mais parfaitement maîtrisé. Une perle.
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Photogramme extrait du film "I Origins" (détail)
 (DR)
De Mike Cahill (II) (Etats-Unis), avec : Michael Pitt, Brit Marling, Astrid Berges-Frisbey - 1h47 - Sortie : 24 septembre

Synopsis : Le docteur en biologie moléculaire Ian Gray mène des recherches sur l'oeil humain quand sa rencontre avec une mystérieuse jeune femme va brouiller les frontières entre son travail et sa vie personnelle. Quelques années plus tard, la découverte scientifique révolutionnaire que lui et sa collègue Karen sont sur le point de faire marque le début d'un voyage extraordinaire amenant à relier entre eux des individus totalement étrangers, et à prouver que la science et les sentiments ne peuvent constituer deux univers séparés.

Mike Cahill possède un style et "I Origins", son deuxième long métrage, le même charme étrange qui se dégageait de son premier film "Another Earth" (présenté à Deauville en 2011). Dans les deux cas, le récit se déroule dans le monde d'aujourd'hui, les personnages sont ceux du quotidien et pourtant, dans les deux cas encore, une découverte scientifique va considérablement modifier la vision que l'humanité se fait de sa place dans l'univers et de sa destinée.

Scientifique et scientiste
Dans "I Origins", qui aurait pu s'écrire "Eye Origins", tout tourne autour de l'oeil. Organe de la vue, mais aussi ultime argument des créationnistes pour nier l'évolution des espèces. Il obsède Ian Gray (Michael Pitt) un jeune scientifique très brillant. Scientifique mais scientiste avant tout, il nie toute transcendance et se moque de tout ce qui n'est pas susceptible d'être prouvé scientifiquement.

Le but de sa recherche consite à identifier l'élément ADN manquant entre les créatures dépourvues d'yeux et celles qui en possèdent. L'argument qui clouerait définitivement le bec aux tenants de l'existence de Dieu.

Le doute et la certitude
Un récit très bien ficelé conduira le personnage du médecin à douter de ses plus fortes convictions. L'amour y sera d'ailleurs pour beaucoup. Il serait vraiment dommage de lever le voile sur le voyage initiatique (mais pas ennuyeux un instant) que suivra le Dr Ian Gray. Contentons-nous d'écrire qu' il trouvera dans le regard d'une petite indienne (la petite Kashish) de New Delhi la réponse aux questions qu'il ne se posait pas, ou qu'il refusait de se poser. La rencontre entre cette enfant et le scientifique changera à jamais l'idée que l'humanité se fait d'elle-même.

Monde parallèle
Michael Cahill n'a pas besoin de gros effets de cinéma pour emmener son spectateur dans un monde parallèle, quasiment identique au nôtre, mais pourtant radicalement décalé. Rien, ou presque, dans l'image n'est fait pour surprendre ou induire en erreur. Cahill ne joue pas avec son public, il le conduit tranquillement, uniquement avec l'histoire qu'il lui raconte. Comme dans "Another Earth" où il faisait apparaître dans le ciel une deuxième terre, réplique de la nôtre et où les drames pourraient être réparés. Il entrouvre dans "I Origins" une nouvelle porte vers un espoir, différent, espéré ou désiré.

Générique
Le casting de ce film est parfait. On y retrouve l'excellente Brit Marling qui interprétait déjà le rôle principal de "Another earth". On y remarque surtout la jeune comédienne Astrid Bergès-Frisbey dont le personnage passe dans la vie du héros comme un météore, la bouleversant à jamais. Sorte de chat écorché au charme dévastateur, cette comédienne franco-espagnole de 28 ans en est à son onzième long métrage. On l'avait remarquée dans "Un barrage contre le Pacifique" de Rithy Panh en 2008 et dans "Pirates des Caraïbes, La fontaine de Jouvence" en 2011.
Complètement indépendant, Mike Cahill non seulement réalise son film, mais il en est aussi le producteur, le scénariste et le monteur. Indispensable.

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