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"Ceux qui travaillent", une critique acerbe du monde de l'entreprise : "On continue à participer au système malgré le fait que ça broie des gens"

Dans "Ceux qui travaillent", en salle mercredi 25 septembre, le réalisateur Antoine Russbach suit un cadre d'une grande société qui perd tout du jour au lendemain. De la difficulté à trouver un emploi passé 50 ans à la nécessité de se conformer au "système", Antoine Russbach tente une critique du monde du travail moderne.

Article rédigé par franceinfo - édité par Cyrille Ardaud
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Temps de lecture : 2 min
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"Le fret maritime, pour lui, ce sont des petits points rouges qui se déplacent sur un ordinateur. Cet homme qui dirige des bateaux à distance n'est probablement jamais monté lui-même sur un bateau. Il ne connaît pas la réalité du métier." Franck est cadre supérieur dans une entreprise de fret maritime. Responsabilités par dizaines, beaux vêtements, voiture luxueuse et grande maison. Son emploi, c'est toute sa vie : il part tôt et rentre tard, son téléphone sonne à toute heure du jour et de la nuit et sa vie de famille passe au second plan. Jusqu'au jour où, pour éviter de faire perdre une importante somme d'argent à sa société, il prend une décision pour le moins contestable qui lui fera finalement perdre son emploi.

Un personnage antipathique et froid, mais aussi peut-être victime

Dans Ceux qui travaillent, le réalisateur Antoine Russbach raconte une histoire de travail. De celles, terriblement moderne, qui font froid dans le dos. Mais aussi de celles qui évoqueront forcément des choses à quiconque a déjà travaillé pour une grande entreprise. Un film terriblement en phase avec son époque selon l'acteur Olivier Gourmet qui campe le rôle de Franck : "Le film est tiré des rencontres d'Antoine (le réalisateur, ndlr). Il a choisi ce métier parce qu'il voulait quelque chose de virtuel pour faire un parallèle avec notre société. Aujourd'hui, nous consommateurs, nous achetons toujours plus virtuellement, sur internet. Nous savons que certains objets ne sont pas toujours fabriqués de façon équitable mais comme ils viennent de loin, ça nous déresponsabilise.

Pour sa perte d'emploi, puis ses difficiles recherches, le spectateur ne ressentira sans doute aucune compassion. Et pour cause, le personnage est tout sauf sympathique admet Olivier Gourmet : "On ne va pas dévoiler la décision qu'il prend mais elle est terrifiante. Et ça ne peut pas le rendre sympathique. Mais il est fragile. On comprend que cet homme a probablement quelque chose d'humain, alors on se demande ce qui fait qu'à un moment, il est devenu comme ça. Pourquoi il a ressenti le besoin de prouver toujours plus, dans une société où on demande toujours davantage ?"

"Jusqu'à quel point sommes-nous capables d'aller tout en ayant conscience du système ?"

Ceux qui travaillent raconte aussi la difficulté à sortir du système, même quand on essaie. Franck va essayer de se remettre en question et de continuer à vivre, en vain. "Il va voir une coach et il prend conscience à un moment donné de son absence auprès de sa famille, que l'amour que lui donne sa famille ne passe qu'à travers l'argent. Donc il se dit qu'il va passer plus de temps avec ses proches mais la coach dit non. Elle lui explique que d'après son profil psychologique il n'est pas apte à faire cela, et qu'il voudrait mieux continuer à chercher un travail."

Pour Olivier Gourmet, le personnage de Franck est à la fois victime et acteur du système : "C'est ça qui est aberrant. Jusqu'à quel point sommes-nous capables d'aller tout en ayant conscience du système ?" se questionne l'acteur. "On continue à participer au système malgré les ravages et le fait que ça broie des gens autour nous. C'est quoi la logique ? Où est l'humain dans tout ça ?"

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