Quel avenir pour les César après la démission de la direction de l'Académie ?
Le coup de théâtre de la démission de la direction de l'Académie des César sauve en quelque sorte la cérémonie du 28 février, qui sera présentée par Florence Foresti et présidée par Sandrine Kiberlain. Quelles en sont les conséquences et quelles sont les attentes de la profession ?
Après le coup de tonnerre de la démission collective de la direction de l’Académie des César annoncée jeudi 13 janvier, les réactions se multiplient. Pour Ariane Ascaride "C’est formidable que les gens du cinéma se soient mobilisés, l’Académie des César a senti que sa légitimité n’était pas si forte." Quelles sont les conséquences de ce retrait, quelles sont les attentes de la profession ?
Renouveler la direction
Tribune assassine de 400 figures du cinéma contre l'Académie des César, peu de femmes nommées, manque de diversité... La fronde n'était plus gérable par le président des César, Alain Terzian, et son conseil d'administration. Le coup de théâtre de la démission collective sauve en quelque sorte la cérémonie du 28 février, qui sera présentée par Florence Foresti et présidée par Sandrine Kiberlain.
"Cette démission collective permettra de procéder au renouvellement complet de la direction", composée des membres fondateurs, d'anciens présidents ou de membres de l'Association, 21 personnes au total, parmi lesquelles les cinéastes Costa Gavras, Claude Lelouch ou Tonie Marshall.
Moderniser l'institution
Une assemblée générale se tiendra donc après la cérémonie du 28 février pour élire cette nouvelle direction et préparer les modifications des statuts fondateurs, sous l'égide du Centre national du cinéma (CNC). Concrétement il s'agira de moderniser une institution jugée par beaucoup dépassée, avec une trop faible représentation des femmes notamment.
Marc du Pontavice, producteur de J'ai perdu mon corps, film en lice dans trois catégories aux César fait des propositions concrètes en ce sens : "instaurer un système plus démocratique qui procède plus par un système d'élections, que l'ensemble de la profession soit représentée au conseil d'administration. Il prone par ailleurs une limitation dans le nombre de mandats et la communication des comptes, car l'opacité génère de la suspicion et du fantasme".
Plus de diversité
Pour Arianne Ascaride "Il faut repenser la parité. Il faut repenser la diversité. Et l'Académie des César ne peut pas être un club de bridge un peu fermé, où au bout du compte on est hermétiques à ce qui est en train de se passer à l'intérieur de la société et donc à l'intérieur du cinéma". Et la comédienne de suggérer de "tout remettre plat. C’est une situation étrange de ne pas prendre en compte l’évolution du cinéma français : les jeunes réalisateurs, les réalisatrices… Il n’y a pas de représentation au sens large. Est-ce que ça vient des votants, de la manière dont on vote, de qui peut voter ? Il faut se poser toutes ces questions."
Plus de transparence
L’actrice Marina Foïs, l'une des 400 personnalités signataires de la tribune publiée dans Le Monde du lundi 10 février se félicitait vendredi des changements à venir : "Cela va être l'occasion de réécrire ces statuts qui semblent complétement obsolètes... Notre demande est imparable, parce que ce que l'on attend, c'est plus de démocratie, de transparence, de mixité et la parité, c'est des demandes auxquelles il est largement temps de répondre."
"Une transparence totale" de la part de l’Académie, c'est aussi l'attente de Marc du Pontavice. "Notre société n'accepte plus l'opacité, poursuit le producteur. Comme l'organisation est contestée dans ses méthodes, en particulier le principe de cooptation, je pense que cette réaction est très saine, très bonne et très encourageante. Pour lui, cela "montre que notre société est capable de forcer les institutions à la réforme quand elles ne répondent pas aux vœux de la société."
Soulagement dans le monde du cinéma
"Pour une fois, je suis d'accord avec Franck Riester", a réagi sur Twitter le producteur Saïd Ben Saïd (Elle, Synonymes), qui s'était montré très virulent ces derniers jours, affirmant que "le système de gouvernance des César" apparaissait "comme un effroyable scandale".
"C'est la fin d'une dictature", a affirmé de son côté Pascal Rogard, directeur général de la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques), qui n'a pas hésité à fustiger le "régime paraguayen" d'Alain Terzian, le président de l'Académie très critiqué par le 7e Art. Pour le dirigeant de la SACD, "ce comité de direction était complètement déconnecté du cinéma d'aujourd'hui". "Il faut remettre les choses d'aplomb" et "remettre du sang neuf" pour que chacun puisse "se sentir utilement représenté", a-t-il ajouté, estimant que cela pourrait se faire "d'ici l'été".
Pour la directrice de la photographie Caroline Champetier, membre du conseil d'administration, démissionner était également "la moindre des choses que nous puissions faire pour prendre conscience de ce qui se passe et d'un vent nouveau qui doit souffler sur le cinéma". Mais pour elle, au-delà des César, cette crise symbolise aussi "la fin des noces entre le cinéma et la télévision", en "posant la question du financement du cinéma depuis 30 ans par les chaînes de télévision". "M. Terzian était l'emblème de ça", à travers ses liens étroits avec Canal+, producteur et diffuseur de la cérémonie et grand argentier du cinéma français, estime-t-elle. "On est arrivés au bout".
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