Cannes 2017 : "Marlina, la tueuse en quatre actes", tarantinesque western féministe indonésien
Une belle veuve cohabite avec le corps embaumé de son mari parce qu'elle n'a pas les moyens de lui payer des obsèques. Il est là, ligoté et assis dans la pièce principale de leur pauvre maison et va assister en témoin aveugle et muet à presque toute l'action. Une bande de malfrats débarque pour voler le bétail et violer la veuve. Elle en tue une demi-douzaine, décapite le chef qui l'a violée et entreprend d'apporter sa tête au commissariat, à des kilomètres de là. Mais il reste deux voleurs dans la nature, bien décidés à récupérer la tête de leur chef.
Structure de drame classique
"Marlina, la tueuse en quatre actes" est construit comme une pièce classique, comme son titre l'indique, en quatre actes. Il y a en effet de la tragédie antique dans cette histoire de veuve qui refuse de se livrer à une bande de malfaiteurs venus la dépouiller de tous ses biens et la violer. Marlina est belle, son mari est mort et son seul enfant aussi. N'ayant plus grand-chose à perdre, elle décide de le vendre chèrement. Une amie villageoise enceinte de 10 mois (!) se retrouve à ses côtés, ravivant en elle le désespoir de la perte de son propre enfant.
Le petit Texas indonésien
L'île de Sumba sur laquelle se déroule l'action est particulière. Alors que la plupart de celles qui composent l'archipel indonésien débordent d'une végétation luxuriante, celle-ci est sèche, poussiéreuse, on la surnomme là-bas, le petit texas indonésien. Filmée à la manière des "Il était une fois...", accompagnée d'une musique qui doit tout à Ennio Morricone, l'action penche du côté du western spaghetti matiné de Tarantino. Sergio Leone avait bien filmé l'Amérique en Espagne, les grands espaces Indonésiens peuvent eux-aussi s'accorder à l'esprit du western ! Mais on est pourtant bien en Asie et la randonnée de Marlina portant à son côté la tête tranchée de son violeur évoque fortement le cinéma japonais.
Un western féministe à l'indonésienne
Le tout pourrait tourner au ridicule si le fond de l'histoire ne touchait pas à l'essentiel : la vie, la mort, le respect et la dignité. Et inutile d'ajouter qu'une fois encore dans ce film, les hommes ne s'en sortent pas avec les honneurs. Quand ils ne sont pas violeurs et voleurs, il sont crétins (les policiers) ou machos violents (le mari de la femme enceinte). Seul un chauffeur de bus se montre courageux. Ce qui ne lui réussit pas ! Comme pour Kill Bill, la salle complètement acquise à l'héroïne réagit de plaisir en voyant trancher les têtes des malfrats. Plaisir malsain, certes, mais qui permet de désamorcer la tension.
Marlina, la tueuse en quatre actes
Film indonésien de Mouly Surya
avec Marsha Timothy, Panendra Larasati, Egi Fedli, Yoga Pratama
1:33
Date de sortie inconnue
Synopsis
Au cœur des collines reculées d’une île indonésienne, Marlina, une jeune veuve, vit seule. Un jour, surgit un gang venu pour l’attaquer, la violer et la dépouiller de son bétail. Pour se défendre, elle tue plusieurs de ces hommes, dont leur chef. Décidée à obtenir justice, elle s’engage dans un voyage vers sa propre émancipation. Mais le chemin est long, surtout quand un fantôme sans tête vous poursuit.
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